Voilà donc un mois que le camarade Hollande est président de la République, un mois jour pour jour. Je ne reviens pas sur le plaisir que j’ai éprouvé à contribuer, au travers de mon petit bulletin de vote, comme quatre millions d’électeurs du Front de Gauche, à dégager Nicolas le petit. Ça, c’est fait et c’est bien fait. Reste que maintenant, c’est Françoué qui dirige la France. Ça ne change pas grand chose en fait.
A la gare de Juvisy, hier encore, j’avais droit aux mêmes cow boys, menton haut, regard méprisant, les mains sur le ceinturon surchargé de matériel répressif. A côté de ça, là où il y en a besoin, comme du côté de square Léon à la Goutte d’or, si j’en crois mes voisins, on ne voit toujours pas l’ombre d’un uniforme si ce n’est, une fois toutes les six semaines, quand une douzaine de bagnoles débarque pour disparaître après. Côté flicaille encore, Gervais Gantchou, inculpé pour rébellion, pourrait être le premier papa expulsé de Manuel Valls, équivalent de Sarkozy séquence 2002-2003. A quand le kärcher ?
Côté social ? Les sociaux-démocrates sont égaux à eux-mêmes. Ça jacasse dans le poste et puis tombe la réalité des décrets. Ce mercredi 6 juin au matin, pour fêter le mensoversaire je suppose, c’est celui sur les retraites qui est tombé. Exit la retraite à 60 ans automatique pour celles et ceux ayant travaillé 41 ans et plus. Le changement de lexique entre « trimestres validés » et « trimestres travaillés » réduit les contours des promesses de campagne à un simple aménagement de la contre-réforme des retraites adoptée en 2010 par la droite. Fillon a beau jeu de se gausser. Malheureusement, j’ai bien peur que, si le parti dit « sérieux » a la majorité avec les seuls députés EELV, il puisse se moquer longtemps. Le sinistre de l’Economie, Moscovici, a bien annoncé qu’il maintenait le cap de la réduction des déficits publics à 3% du PIB, pendant que Hollandréou nous amuse avec la “croissance”.
Le PS tente de déshabiller la gauche
Bref, comme l’autre pays du fromage, le gouvernement Hollande, en actes, est bien en dessous de la ligne des eaux qui marque la gauche.
C’est que l’ancien premier secrétaire du PS est un convaincu du social-libéralisme. Ce n’est pas un hasard si le think tank blairiste français Terra Nova truste les postes de collaborateurs de cabinets ministériels. Cette nouvelle matrice a théorisé le divorce entre le PS et les classes populaires dans une vision purement électoraliste, scellant le renoncement à la transformation sociale. Il n’y aura donc que des ajustements « sociaux » aux mesures libérales prises par les précédents gouvernements. Tant que ces gens-là seront capables d’assurer une majorité seuls. Ou avec la droite ? Hé, doucement amis lecteurs ! Je n’ourdis pas de procès d’intention, moi. Laissons venir.
Et qu’en est-il du camarade Françoué lui même ? Ben… Pareil qu’au PS. Le bon mot comme mode de communication, la communication en guise de ligne politique. Un sourire à la caméra. Une photo Depardon. Et cette belle ritournelle dérivée de Christophe : « Je vous dirais les mots creux ». En fait, ce garçon, en digne héritier de Lionel Jospin, ne fait de politique qu’au trébuchet du rapport de forces. Europe Ecologie-Le Vide s’en est rendu compte à son détriment. Deux petits pour cent aux présidentielles, et même la promesse d’une centrale nucléaire fermée par circonscription donnée ne sera probablement pas tenue. D’évidence, seul une majorité de gauche dépendant du groupe Front de Gauche à l’Assemblée nationale sera de nature à lui imposer une politique un peu à gauche, celle qui, finalement, limite la casse.
Quand on se rappelle les résultats concrets de la politique du gouvernement Jospin entre 1997 et 2002, le nombre de privatisations notamment, l’absence de retour en arrière sur la réforme des retraites 1995, la trahison que représente la signature du traité d’Amsterdam contre les engagements de campagne… Quand on regarde les actes du gouvernement Blair, et aussi ceux du Schröder en Allemagne, tous deux exemples à suivre pour Terra Nova… Limiter la casse serait déjà une jolie victoire. Empêcher les sociaux-libéraux de mener à bien leurs projets hallucinés de libéraliser le marché du travail pour « alimenter la croissance », pour moi qui ne suis pas un adepte de la politique du pire, je trouve que c’est en soi un objectif politique.
C’est aussi cela l’enjeu de ces législatives. C’est aussi pour cela que nous menons campagne, nous autres frontdegauchistes ; c’est pourquoi nous pensons que donner une caution « rouge » à ce gouvernement serait stupide. Le seul moyen de débattre sérieusement avec le parti dit « sérieux », c’est de le battre dans les urnes. Si nous n’y parvenons pas, ce ne sera pas de sa faute à lui. Juste de la nôtre.
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Bonus vidéo : Zend Avesta “A la manière”