Les filles trouvaient qu'elle avait un point de vue trop cynique sur l'amour, mais comment aurait-il pu en être autrement ? En surface, les relations entre hommes et femmes étaient synonymes de baisers doux, robes blanches et mains enlacées. Mais en-dessous, ce n'était qu'un chaos terrifiant menaçant d'éclater au grand jour.
Sally, Bree, April et Celia se rencontre au mythique Smith College, une université pour femmes où elles font leurs études et ont une chambre dans le même couloir. Elles sont très différentes, et naît entre elles une amitié très forte, qui va se prolonger. Quelques années après, elles se retrouvent pour le mariage de Sally.
Je dois avouer que ce roman m'a pas mal surprise. En effet, mue par un réflexe pavlovien, quand on me dit "quatre copines", je pense "Sex and the city" (ou éventuellement "Desperate housewives"). Je m'attendais donc à quelque chose un peu de l'ordre de la chick-litt, et pas du tout. Du tout, du tout. Car ce roman nous interroge sur la question de la place de la femme dans la société, le féminisme, les relations de couple, et le fait de manière très informée. En fait, chacune des filles incarne un peu une des voies possibles, sans être pour autant caricaturales, sauf April, mais je n'ai pas aimé April de toute façon, j'y reviendrai. Commençons par Celia : c'est la Carrie Bradshaw du groupe, les chaussures en moins, celle qui soude le groupe, celle qui a des ambitions littéraires mais ne parvient pas à les réaliser, celle qui enchaîne les relations désastreuses ; pragmatique, elle incarne un peu la normalité, elle est féministe, se dit telle, mais de manière modérée. Sally, elle, incarne la femme-femme, un peu obsédée par le mariage et d'ailleurs, c'est elle qui se marie. Bree m'a parue énigmatique : elle arrive en première année d'université fiancée à Doug, mais suite à une infidélité elle le quitte, et ne tarde guère à se mettre en couple avec Lara ; néanmoins, elle a du mal à assumer cette relation, et ne se considère pas comme lesbienne ; disons que je l'ai trouvée assez incohérente par moments et on ne sait pas trop où la situer. Quant à April, c'est le seul personnage qui m'a agacée profondément et avec qui je ne me suis pas trouvé le moindre point commun : écologiste et féministe intégriste, culpabilisatrice et moralisatrice, donneuse de leçons, elle voit du sexisme partout et c'est quelque chose que j'ai du mal à supporter ; néanmoins, le personnage permet d'en apprendre plus sur les différents courants féministes, et de poser les bonnes questions en mettant parfois le doigt là où ça fait mal. Disons que ce personnage était nécessaire aussi parce que ce que le roman montre finalement, c'est le goufre qui existe entre les idéologies et la vie réelle, et notamment la réalité de l'amour, qui ne s'embarrasse pas de principes ; comme le dit Bree, "le sentiment amoureux a du mal à saisir le progrès social". Et April reste totalement dans l'idéologie, et condamne les erreurs de ceux qui sont amoureux parce qu'elle ne sait pas ce que c'est. En outre, elle a tendance à charger les hommes en général de tous les maux de la planète. Cela m'énerve. Moi les hommes, je les aime (enfin pas tous hein !).
Sinon, ce roman est passionnant d'un point de vue culturel. J'ai toujours été un peu fascinée par les grandes universités américaines, les campusleurs us et coutumes bien plus funs que les nôtres, il faut bien le dire, et j'ai appris plein de choses, notamment grâce aux très nombreuses notes de bas de pages des traducteurs.
En revanche, je ne félicite vraiment pas la personne, qui qu'elle soit, qui a écrit la quatrième de couverture et qui spoile un événement qui occupe toute la fin du roman. Je vous jure que je vais finir par créer un logo pour signaler les quatrièmes à fuir !
En bref donc, un roman très intéressant et instructif !
Les Débutantes
J. Courtney SULLIVAN
Rue Fromentin, 2012