Il est faux de considérer en premier lieu que des services dits publics en tant que « droit d’accès à » devraient obligatoirement être rendus par des entreprises publiques.
Par Lucien Oulahbib.
Qu’est-ce qui pèche dans ce raisonnement… « comptable » ?…
Mis à part qu’il soit injuste de faire ce genre de calcul puisqu’il existe déjà l’impôt sur le revenu et sur le patrimoine (aux diverses taxes), il est également faux de considérer en premier lieu que des services dits publics en tant que « droit d’accès à » devraient obligatoirement être rendus par des entreprises publiques. L’évidence n’est pas sûre.
Ceux qui défendent cette idée présupposent en effet que ces dernières, n’ayant pas le profit comme fondement, mettront en avant bien plus de « moyens » que des entreprises de droit privé nécessairement cupides et orientées. Rien n’est plus faux, du moins hormis les brebis galeuses bien sûr, d’autant que n’importe quel économiste, honnête, sait que pour faire du profit il faut que le produit soit suffisamment attractif pour attirer un marché porteur, surtout en situation concurrentielle. À moins d’admettre implicitement le raisonnement marxiste stipulant que tout profit serait le résultat d’un travail non payé. Ce qui s’est avéré faux, sauf pour certains cas en particulier en Chine et dans les pays socialistes où la militarisation du travail empêchait que des protestations voient le jour comme c’est le cas dans les pays démocratiques et depuis que les libéraux se sont battus en 1830 pour les libertés, dont la liberté syndicale.
Mais revenons aux faits présents. Ainsi l’enseignement privé croule sous les demandes. Or, il est stoppé dans son développement à cause d’un numerus clausus qui l’empêche d’ouvrir de nouvelles classes. De plus, du fait que par un tour de passe-passe juridique le budget public participe pour une part à son financement, il fait croire qu’il est partie prenante de sa croissance alors qu’il suffit de rappeler que ce financement, puisqu’il est public, provient en réalité de la poche de ceux qui mettent leurs enfants dans le privé et ainsi payent deux fois : par leur impôt et par ce qu’ils versent à l’école de leur choix.
Ainsi, au lieu de se demander pourquoi le service public de l’enseignement a de moins en moins de bons résultats, surtout le Collège général, l’enseignement professionnel, etc., les Aubry et leurs répliques écologistes vont exiger « encore plus de moyens » alors qu’il s’agit d’un problème d’organisation et de motivations payées à leur juste prix. Idem pour la santé, où rien ne dit que l’on soit moins bien soigné dans le privé que dans le public en particulier au niveau dentaire et ophtalmologiste, dermatologique, orthopédique, sans parler des soins lourds…
Mais l’idée socialiste mécaniste – que reprend la nouvelle génération socialo/écolo comme si rien ne s’était passé depuis cent ans – consiste à faire comme dans certains pays communistes tel Cuba : tout sacrifier en termes de richesses pour la santé et l’éducation, ce qui permet d’en faire des vitrines pour la propagande, peu importe si le reste de la production laisse à désirer. De plus, si Cuba en effet a pu avoir quelques résultats en la matière (la Hongrie était réputée aussi), sa population est bien moins nombreuse, et surtout ne répond pas à la question majeure de la participation effective de cette population à son propre développement effectif et global qui ne serait pas seulement réduit à quelques aspects de la vie domestique, tels ces animaux que l’on engraisse pour s’en servir ensuite comme mets festifs afin de consolider son pouvoir par le prestige et l’autorité.
Il y a donc une confusion multiforme qui sème ce sentiment de malaise à la veille de ces élections législatives fantômes qui suivent une élection présidentielle avec un drôle de vainqueur par défaut.
Certes encore, l’accès à certains droits et biens se comprend en régime démocratique, sauf que leur mode d’acquisition ne passe pas nécessairement, et même plus, ne doit pas passer par la construction d’une énorme bureaucratie dont l’objectif pratique consiste à se perpétuer en réalité, malgré toutes les bonnes intentions, puisque l’effet cumulatif des énormes moyens mis en branle à mauvais escient et de manière trop généraliste rate en fait le but officiel affiché : satisfaire le plus grand nombre. Ce qui a toujours été le but des penseurs libéraux contrairement aux rumeurs.
Pourtant, et cela a été vu au niveau économique dans les pays soviétiques à économie dirigée, l’étatisation de l’économie ne permet pas de produire ce qu’il faut. Pourquoi ? Parce que le Gossplan soviétique par exemple prévoyait bien que l’industrie dite « lourde » produise les tonnes de ceci et de cela sauf que l’absence d’industries dites « légères », bref l’adéquation entre une offre et une demande, faisait que l’on pouvait seulement avoir ici du 36 et du 37 en pointure de chaussure, et uniquement sur un à deux modèles, et il fallait attendre le mois suivant pour le reste des pointures parce qu’il fallait recalibrer à nouveau les rares machines généralement importées (et allemandes). Ne parlons pas des invraisemblances comme le fait de produire tant de tonnes de clous sans se préoccuper de leurs tailles ni de leurs fonctions… tant et si bien que certaines usines, non évaluées évidemment, fabriquaient d’énormes clous, inutiles, mais correspondant à la norme demandée en termes de tonnage.
En France l’on produira tant de « tonnes » de bacheliers et d’étudiants sans se préoccuper de leur insertion, du moins jusqu’au second cycle. Et en santé, chaque député-maire voudra son hôpital soigneusement rangé à côté de ses ronds points interminables et de leur maison de la culture (fatiguée de redondance militante). La médecine sera, elle, principalement axée sur la physiologie et guère sur le psychosomatique, les médecines douces, massages et SPA. Le médecin ne sera pas formé en psychologie mais en maths et physique comme si ces matières pouvaient aider à faire la différence entre une hypocondrie et un mal réel.
De façon générale, les solutions plus conformes à la réalité existent bien pourtant : décentraliser, permettre aux gens de choisir leur protection sociale, réduire ainsi les coûts sans amoindrir la solidarité, construire une réelle démocratie participative dans laquelle le citoyen influe sur le marché par sa critique des produits et déjà ses choix de consommation, qu’il s’agisse d’une école ou d’un produit plus commun. Qu’il existe des limites et des sas, des évaluations et des soutiens (bourses etc.) est une chose, mais que l’on profite en quelque sorte de la nécessité de protéger l’accès aux droits en créant une oligarchie d’État parlant « au nom » du peuple, en est une autre.
C’est l’émergence de cette nouvelle féodalité de type idéologique qui pose de plus en plus problème, et qui freine en réalité la réelle remise à flots d’une France de plus en plus en souffrance. Voilà d’ailleurs le paradoxe : ceux-là même qui l’appauvrissent montrent les stigmates de la misère qu’ils produisent afin de se faire élire, stigmatisant ceux qui réussissent quelque chose malgré tous ces fils à leurs pattes.