Tous à Londres !

Publié le 06 juin 2012 par Yvesd

Londres, ceux qui connaissent un peu le savent, est une ville très spéciale. Haut lieu du shopping et repaire de traders cupides, tentaculaire et parsemée d’espaces verts, avant-gardiste et kitsch, flegmatique et agitée, la capitale de feu l’empire britannique continue à fasciner une bonne partie du monde civilisé, France comprise. France surtout du reste comme vient de le montrer l’importance de la couverture médiatique du jubilé de « diamant » de sa Très Gracieuse Majesté la Reine Elisabeth deuxième du nom. Faut dire aussi que c’était bien impressionnant : des foules en liesse à faire pâlir de jalousie un 14 juillet sur les Champs Elysées et des hordes de sujets acclamant durant quatre jours une souveraine inoxydable, indéboulonnable et populaire en plus et en dépit (ou à cause allez savoir…) de ses gouts vestimentaires. On connaît des chefs d’état ou de gouvernement « continentaux » (comme disent nos amis british) qui pourraient s’en inspirer utilement. Un état de grâce qui dure six décennies ça force quand même le respect. Madame Trierweiller, si vous lisez toujours « Restons Correct ! » : faudrait peut-être essayer de nous relooker le François si vous voulez que ça dure encore un peu...

Reste que cette fascination qu’exercent la monarchie Britannique et sa capitale sur Josette, Marcel et la grande majorité de nos concitoyens, tout bons républicains qu’ils puissent être par ailleurs, ne peut que nous « interpeler » comme disent les sociologues qui passent à la télé. Surtout quand on sait qu’il y aurait près de 400 000 Français bien d’chez nous, le plus souvent sortis de notre incomparable école publique, laïque et obligatoire qui auraient d’ores et déjà installé leurs pénates dans le « Grand Londres ». Plus de Français à London qu’à Bordeaux ! Soyez sympa, ne dites rien à Juppé, ça risquerait de le défriser un peu plus… « Mais que diable sont-ils allés faire dans cette galère mégalopolistique ? » s’interrogent candidement et en chœur nos élus les plus en vue et nos fonctionnaires les plus hauts. « N’ont-ils pas tout ce qu’il faut en France : des transports en commun sans souci, un Pôle Emploi ultraperformant, d’excellentes universités et, depuis peu il est vrai, un président normal ? ». Ils pourraient ajouter une bureaucratie exemplaire d’efficacité, une justice diligente et compréhensible par tous, un parlement qui s’occupe de savoir à quoi servent les impôts qu’il vote… Je vous laisse le soin de compléter la liste si le cœur vous en dit.

Y’a juste un truc auquel ils n’ont (curieusement ?) pas pensé, un gadget pour intello tordu, pour blogueur déjanté, pour soixante-huitard attardé, un truc qu’on appelle la Liberté individuelle. La Liberté de créer, d’entreprendre, de se déguiser en ce qu’on veut. Celle aussi de s’exprimer, de se moquer de tout ou presque (sauf des tenues vestimentaires de la Reine évidemment), de grimper sur un escabeau à Speakers Corner (au nord-est d’Hyde Park pour les touristes égarés) pour haranguer la foule (tout est relatif) en faveur de la détaxation de la (vraie) galette-saucisse ou de la conquête de Mars. Et ce n’est pas que symbolique : ça a aussi le grand mérite d’éviter d’avoir à supporter les contraintes et les frais d’une campagne présidentielle, comme y fut obligé récemment l’excellent Jacques Cheminade de ce côté ci du Channel. Ne cherchez donc pas plus loin les raisons d’un succès qui ne se dément pas, qui faisait déjà de Londres the place to be à la fin des années 60, aux temps héroïques de ma folle jeunesse, des Beatles et du Sgt Pepper’s Lonely Hearts Club Band, des boutiques de fringues allumées de Carnaby Street et des mini-jupes de Mary Quant : c’est juste un p’tit air de Liberté.

Le message du jour s’adresse donc à tous les amoureux de la Liberté en question : Tous à Londres ! Dès que les supporters ahuris des JO auront levé le camp, évidemment.