Avec ses 360 habitants, Pougne et Hérisson sont deux hameaux des Deux-Sèvres formant une commune du pays de Gâtine. La problématique de ce village était : comment construire une identité pour son territoire et attirer les touristes lorsqu'on ne dispose pas de personnage célèbre, ni de monument prestigieux, ni de spécialité gastronomique ?
On élit un maire (Bernard Boileau, 1989) qui impulse la bonne idée d'un conteur un peu fou, jusqu'à créer une manifestation culturelle originale, intitulée 'Le nombril du monde', afin de donner à sa ville une notoriété nationale.
storytelling
Historique :Tout commence lors de l'organisation d'un comité d'animation pour préparer le 14 juillet et les fêtes locales. Cette commune anonyme et tranquille fait alors la rencontre étonnante du conteur vendéen Yannick Jaulin. L'artiste racontait d'étranges histoires se déroulant à Pougne-Hérisson, avec son imagination seule car il ne connaissait pas encore le lieu. Ce dernier, militant de la cause rural, est charmé par le hameau de Hérisson, qui selon lui est le centre des histoires du Monde.
Abracadabra :Et c'est comme ça que, " sur une boutade, l'image du 'Nombril du Monde' est apparue. Une grande aventure commençait " dixit le maire de la commune.
Ainsi, au cœur du pays de Gâtine, un peu au nord de Niort, il y aurait une mine contenant le 'minerai à histoires' de tous les contes du Monde. Le village est donc baptisé " Nombril du Monde " en 1990. Et il en fallut du courage pour se lancer dans cette aventure. " Il faut reconnaître, avoue Bernard Boileau, que, au début, on a peur de se faire ridiculiser. Les gens de la commune nous observaient avec méfiance, ceux des bourgs voisins se moquaient bien de notre Nombril. Mais, en 1992, quand on a vu plus de trois mille personnes au festival, on a compris que l'image 'Nombril du Monde' était positive. "
Ce délire verbal de conteur, transformé en véritable storytelling pour la commune, est alors pérennisé avec l'organisation d'un festival de conte autour du nombril ! 1992 devient logiquement l'année du 'Sacré nombril'. Tous les deux ans (mi-août), de nouvelles histoires viennent nourrir le mythe et, peu à peu, le maire institutionnalise ce fabuleux projet : " Il y a eu toute une évolution dans la perception de notre projet. Au départ, on fonctionnait avec les bénévoles du comité, on n'avait pas besoin de plus. Dès le second festival, il fallait des parkings, monter des gradins, installer des scènes..., on avait besoin de davantage de bénévoles. Petit à petit, la mentalité des gens du village a évolué [...] Des personnes qui, au début, étaient un peu réticentes, ont ainsi montré leur désir de devenir un peu plus acteurs de l'événement. Ca a été un virage dans l'évolution des mentalités du village. Depuis le festival augmente toujours en espace, on a toujours besoin davantage de lieux et on a des voisins qui acceptent de prêter leur terrain ou leur grange. Maintenant, la population adhère. "→ Une osmose parfaite entre l'image vécue, l'image voulue et l'image perçue.
Aujourd'hui, la notoriété de la commune atteint une dimension nationale, le festival accueille de nombreux conteurs et l'économie locale a repris des couleurs. Et l'histoire ne s'arrête pas là, des travaux de rénovation de la commune ont été engagés, un projet 'Jardin des Histoires' soutenu par le programme européen de développement rural (programme LEADER) est lancé et la création d'un site internet sur mesure, à l'image du village, c'est-à-dire original, attire beaucoup de touristes. Je vous invite à vous rendre sur ce site qui dégagent tout l'univers chaleureux et l'atmosphère douce du 'Nombril du Monde' : une authentique petite bouillotte en cet hiver glacial.
Promis, ceci n'est pas un conte. En effet, une petite collectivité anonyme peut se forger une identité forte et générer des flux touristiques importants, tout ceci en s'appuyant sur le tissu local, un brin de culot, une grande motivation (pugnacité ?) ainsi qu'une dynamique de réflexion, d'information et de partenariats.
NB : le reportage de France 3 ici