Comment prendre les internautes pour des crétins ?

Publié le 15 février 2012 par La Trackeuse @comlaet

Solution

Je suis une marque, je me fais passer pour un consommateur, je publie des avis de consommateurs positifs sur moi et éventuellement des avis négatifs sur les marques concurrentes.

Mais…

Les internautes ne sont pas des crétins. Tôt ou tard, vous avez de grandes chances de vous faire démasquer.

Le 2 janvier 2012, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a annoncé que la justice serait saisie contre 8 acteurs du web (éditeurs de sites, agence de e-réputation) ayant publié des faux avis de consommateurs ou ayant censuré des avis négatifs.

En outre, d’ici un an environ, AFNOR promet la mise en place d’une norme permettant de vérifier l’authenticité de ces avis. La France sera alors le premier pays d’Europe à disposer d’une telle norme.

“Elle définira les pratiques garantissant la fiabilité de la collecte des avis des consommateurs. La norme devrait permettre de mieux identifier les auteurs des messages en croisant les avis laissés par un même Internaute afin de vérifier leur pertinence. Enfin les commentaires seront encadrés afin d’éviter que les sites marchands ne censurent ceux qui sont négatifs”, précise Olivier Peyrat dirigeant d’AFNOR.

L’Union des métiers de l’hôtellerie et de la restauration, la DGCCRF, ainsi que des sites Internet tel qu’Ipsos, Tripadvisor, Voyagermoinscher.com, Voyagesncf.com, la Poste, des compagnies aériennes, des tour-opérateurs, se sont apparemment proposés pour financer les travaux. Chaque site d’e-commerce sera libre d’adopter cette nouvelle norme. Cependant, ceux qui disposeront de ce ‘label’  conforteront leur crédibilité et leur notoriété. Tout ceci est malheureux pour l’image de la profession mais s’il faut en passer par là…

Les faux avis s’attaquent aux blogs et aux réseaux sociaux

Pour pousser le vice encore plus loin, certaines marques ont dépassé les faux avis pour passer au niveau supérieur : les fake blogs. Ce sont des blogs créés de toutes pièces par des marques en faisant croire qu’ils sont animés par des particuliers, de manière totalement désintéressée.

En 2005, deux scandales de fake blogs ont fait le buzz sur la toile :

• Le blog « Le journal de ma peau » par Vichy

Sur son blog, Claire donne ses impressions concernant son expérience test de la nouvelle crème Vichy, récemment lancée sur le marché des cosmétiques. En réalité, le blog a été monté de toutes pièces par l’entreprise Vichy elle-même. Le vrai-faux blog est alors reconnu car les commentaires postés par les internautes étaient triés, l’identité du blogueur était faussée et la mention « Copyright VICHY » figurait dans les mentions légales du blog. Vichy fera son mea culpa : Game over -__-

Sony Ericsson lance son fake pour propulser son nouveau produit

Le DJ Laurent Wolf aurait créé un blog sur lequel il précisait avoir perdu son W800 dans une boîte branchée parisienne. Peu crédible. Le blog Wolf800 fait partie intégrante d’une opération de marketing pour promouvoir le lancement de son Walkman Phone W800 : Démasqué -__-

Les cas Facebook récents de SFR et Orangina

Mais comme si les blogs ne nous avaient pas suffit, les faux avis prennent d’assaut Facebook. Pas plus tard qu’aujourd’hui, le blog Coups de Pub publie un article détonnant “Orangina trompe ses fans sur Facebook” et souligne la tromperie de la marque. Le community manager de l’agence de la marque, forcé à faire son coming out, précise avoir créé et utilisé de faux profils Facebook pour commenter et relayer les publications de la page Orangina. Sachant que le facteur temps est essentiel dans l’algorithme Facebook, son objectif était d’optimiser la remontée des statuts de la marque sur le fil d’actualité des fans en créant de l’engagement dès leur publication via de faux profils et de faux commentaires.

Après les faux avis sur les sites de e-commerce et sur les réseaux sociaux ainsi que les fake blogs, c’est donc les faux profils qui posent problèmes sur Facebook. La marque SFR a été la première à en faire les frais pendant le lancement du nouvel opérateur Free mobile. Un faux profil répondant au nom de SFR laissait un commentaire désobligeant en réponse aux demandes des clients insatisfaits.

Cette multiplication des pages et des groupes rend la réputation d’une entreprise difficilement contrôlable sur Facebook. Le choix du community manager est donc primordial. Il est la voix de la marque et doit user de diplomatie, de bon sens, de transparence et de réactivité.

Les faux profils sévissent aussi sur Twitter. Actuellement, la rumeur court qu’un follower sur 2 de notre président aurait 0 followers. Des faux profils pour gonfler le nombre de followers, twitter en faveur de M. Sarkozy et en défaveur d’autres candidats à l’élection présidentielle ? Gaduman a fait sa petite enquête sur les faux comptes Twitter : ici

Pour aller plus loin sur les faux profils, spam et arnaques sur Facebook, consulter l’article de MyCommunityManager.

Pourquoi les marques sont-elles si tentées de nous berner ?

De nombreuses marques utilisent désormais les faux avis de consommateurs comme vecteur de communication à part entière car elles considèrent que cela peut être déterminant lors que la décision d’achat.

En effet, 88% des internautes qui consultent des avis se déclarent influencés dans leur achat. Cependant, l’influence est autant positive que négative (Fédération du e-commerce et de la vente à distance, 7ème baromètre sur les comportements d’achats des internautes, 2011).

Aujourd’hui les internautes, s’ils prennent en compte les avis de leurs concitoyens, se méfient des faux avis et ne sont pas dupent quant aux pratiques malveillantes de certaines marques. Cette perte de confiance dans les relations entre les internautes et les entreprises menace le système des avis en ligne. Selon une étude Testntrust de 2011, plus de 75% des Internautes pensent que, parmi les avis publiés sur Internet, certains sont faux. Une proportion en hausse par rapport à l’étude publiée en 2010.

Une honte pour notre profession

Les marques se scalpent comme des grandes car en usant de ces pratiques scandaleuses les consommateurs n’ont plus confiance et pire, elles décrédibilisent le métier de communicant et remettent en question l’éthique et la déontologie de notre profession. Certaines n’ont visiblement toujours pas compris qu’on ne triche pas avec ses consommateurs et qu’une vraie campagne de buzz doit se faire en toute sincérité. Fort heureusement, d’autres, comme ‘We are Social‘, se révoltent contre de telles pratiques.

Avis à toutes les marques : il y 3 valeurs fondamentales du web 2.0, qui sont la transparence, l’écoute et l’échange. Dans le cas où vous ne seriez pas enclin à cette démarche de communication responsable, vous n’êtes pas les bienvenues sur la toile.