Essai de poésie non-lyrique
C'est un personnage à la dérive. Un naufrage. Sa vie sexuelle et sentimentale est aussi terne que son activité professionnelle. Il est amoureux de sa voisine du dessous et lui laisse des poèmes anonymes sur le paillasson. Des poèmes réalisés à partir de mot découpés dans une presse quotidienne qui ne sert qu'à ça. Il ne va plus au travail mais au bistrot du coin, où il s'alcoolise en morne compagnie.
L'univers onirique et fantasmatique du personnage envahit évidemment l'espace de la planche. Les symboles sexuels dont la subtilité allie les lectures de Penthouse et de Georges Bataille abondent. La mise en scène est sobre avec quelques audaces comme les pensées parasites des figurants, déjà lues chez Muñoz et Sampayo il y a quelques décennies.
Si le titre de l'album est une référence à Gainsbourg, la couverture renvoit plutôt à Dutronc.Le grand mérite de Gérald Auclin dans cette aventure de Victor, un héros qu'il semble avoir déjà utilisé auparavant, c'est de débarrasser la dépression de tout romantisme et de tout mise en valeur. Rien n'exalte ici les vertus créatives et la splendeur d'un état désespéré. Le crâne chauve et plat de l'anti-héros et son attitude générale n'évoquent nullement la pose du louzeur magnifique. Même si certains de ses collages-poèmes pourraient dans un autre écrin retenir l'attention, ils n'apparaissent ici que comme grotesquement décalés.
Forcément un tel projet qui tient autant de Houellebecq que de Martin Veyron recèle peu de joies et est peu propice à déchaîner l'exaltation. Ceci dit, la couverture et son recto, est assez distrayante grâce à son côté primaire.
Les Illusions de Gérald Auclin, The Hoochie Coochie, 2012, noir et blanc, nombre de pages : à vue de nez entre 60 et 80 (les indés ne savent toujours pas numéroter leurs pages, ou ne veulent pas, pour une raison très obscure). 12€. code EAN : 9782916049243. En vente à Aaapoum Bapoum.