Le film « Sur la route » de Walter Salles : voyage au bout de la route... (4/5)

Par Sheumas

Ce qui compte pour le réalisateur comme pour l’écrivain Jack Kérouac, c’est de saisir ces instants de folie et d’insatiable transgression, c’est de filmer le vertige et ce moment presque palpable où, selon l’expression chère à Shakespeare, « la vie sort de ses gonds ». Cette trépidation de la vie qui crée de beaux délires de mots, d’idées et d’images neuves et, en fin de compte, l’essence même de Littérature... L’Ecriture comme une ligne blanche sur l’interstate, ouvre la porte du Rêve et creuse la route (de la même façon que Proust creusait la mémoire). Elle fait émerger le mythe américain. « Quelque part sur le chemin, je savais qu'il y aurait des filles, des visions, tout, quoi ; quelque part sur le chemin, on me tendrait la perle rare ».

   C’est bien là que le roman dépasse le film... « Sur la route » s’apprécie davantage à « la qualité du pneumatique ». Certes, la caméra « cire les pneus », multiplie les loopings, les têtes-à-queues, les dérapages contrôlés : plans, horizon de routes, Rocky Mountains, fleuve Colorado, lumières de Denver la nuit, visage « solaire » de Dean en contre-plongée et gracieux minois de Marilou en plongée en pamoison dans le désordre des draps, séquences cut dans les bars, hôtels, lits, siège arrière de « carlingue », cadence de la Remington qui saisit enfin l’histoire, kilomètres de feuilles collées les unes aux autres... Le film finit par tourner en rond et lasser le spectateur qui cependant n’a qu’une hâte, lorsqu’il quitte la salle obscure, dévaler la prose de Kérouac.