Hier j'ai rencontré cette femme, elle avait tant de choses à me dire, alors que nous nous étions jamais rencontré avant. J'ai marché dans cet escalier sentant l'encaustique, la cire d'abeille, le bois ancien, j'ai sonné.
Une amie commune m'avait donné son adresse, je l'avait averti de ma venue, elle était ravie d'avir de la compagnie. Depuis quelques mois, elle était veuve, sa vie continuait différemment, sans tristesse mais avec ce vide toujours plus présent.
Elle m'a proposé un thé, une large théière fumante, une petite table ancienne, des tasses de porcelaine fine, et deux fauteuils crapauds, un peu affaissés. J'ai pris des notes, j'ai noté l'ambiance avant même la première question.
Elle m'a raconté un bout, plutôt des bouts de vie, la sienne. Je venais pour mon livre sur les féminités, pour explorer les facettes à travers l'âge, le temps, les dernières décennies qui ont données tant aux femmes françaises. Elle a ri de ses souvenirs, parfois elle a marqué une pause, j'ai écrit, annoté, repris ses propos. Elle avait été libre très tôt, en avance sur son temps, avec ses corsets, puis ses premiers soutiens-gorges, et même un pantalon. Elle se rappelait cette époque.
Celle aussi où elle sortait, le jour simple vendeuse dans un magasin de parfums, le soir, avec des amis, et l'argent de sa famille, elle devenait danseuse. Un gin, Une vodka, elle buvait, chantait, vivait avant de revenir à la grisaille du lendemain. Elle riait de ses explications sur cette robe à perles, asymétrique, courte sur sa cuisse, longue sur son autre mollet, le charleston.
Je lui posé des questions sur l'usage des bas nylon, de la lingerie pour l'autre livre en cours. Elle a rempli ma tasse, elle m'a proposé des sablés, des macarons car "je sais que nous les aimons tous les deux !". L'ambiguité de cette phrase montrait la malice de cette femme âgée, belle, encore belle, séductrice même, malicieuse très sûrement. Je lui ai répondu avec mes yeux, posant mon stylo. La vie était dans ses paroles, nous ouvrions un nouveau chapitre, quelques secrets peut-être.
Le voyage commençait, dans ses souvenirs coquins, dans une vie libre, dans son bonheur, dans ses joies du passé, et probablement quelques ruptures difficiles.
Un voyage dans ses amours.
Modèle : Karolina KURKOVA
pour le magazine VOGUE MEXICO
Photographe : Mariano VIVANCO
Styliste : Sarah Gore Reeves
Mode par Gucci, Versace et Jean-Paul GAULTIER
Maquillage : Pep GAY
Coiffure : David von Cannon
Nylonement