Sait-on pourquoi?
Me demande-t-on parfois.
Rarement, mais parfois.
Non, on ne le sait pas, réponds-je, avec cette force didactique et pédagogique qui me caractérise, accompagnée d'une ample tape sur l'épaule pour soulager autant que réconforter l'infortuné questionneur qui perd ses cheveux à force de se poser des questions à la con. Le nombre de chauves augmente dangereusement d'année en année à force de se poser des questions sans réponses. Un jour, les chauves domineront le monde, et les cheveux seront un loisir de riches.
Quant au beauf dont il était question pas plus tard que y a quelques lignes, une piste sérieuse nous mène à l'hypothèse que des générations de penseurs ont cru que la sociologie - du préfixe latin socius: uni, partagé, mis en commun; et du suffixe latin loggia: balcon couvert ou renfoncement en retrait de façade formant un espace spacieux à arcades à colonnes - tentait une approche factuelle de la compréhension architecturale du balcon couvert partagé dans l'histoire de l'homme, balcon qu'il pouvait partager pour y bronzer uniformément, y étendre du linge imprégné de Cajoline dans la plus pure tradition ménagère occidentale bourgeoise et consumériste, ou pour y faire griller des sardines afin d'enivrer de parfums iodés et piscicoles une voisine fort dévêtue. Par exemple l'été au mois de mai. Voire fin avril si on est naturellement pourvu d'un gros pull à loggia même grossièrement tricoté. Avec aussi des pots de géraniums.
Il faut bien comprendre une chose, c'est que des générations d'hommes se sont fait la guerre, depuis l'Antiquité jusqu'à nos jours et même pendant les soldes, et même en pleine semaine. C'était souvent pendant la quinzaine du blanc, où le blanc tuait tous les noirs qu'il rencontrait. Et tous ceux qu'il ne tuait pas, il les ramassait pour les mettre dans des champs de coton, pour faire un joli contraste visuel, par souci d'esthétique donc. Les hommes se sont battus de tous temps, pour des questions de territoire, des questions de richesse, des questions de religion, des questions pour savoir qui est le plus fort, des questions pour être un champion. Les hommes ont toujours fait la guerre, mais ce n'est pas le sujet qui nous intéresse, donc oublions. Même si nos manuels d'histoire nous disent "N'oubliez jamais", ben si, on oublie, on s'en fout on est insouciants et on est des jean-foutre. De plus, que des blancs aient été massacrés, que des noirs aient été massacrés, que des arabes aient été massacrés ou que des juifs aient été massacrés, de toutes façons il fallait bien qu'ils périssent un jour, on ne pouvait pas les laisser vivre indéfiniment, sinon on se serait retrouvés avec pleins de vieux blancs, de vieux noirs, de vieux arabes ou de vieux juifs à la retraite avec une situation ingérable dans les maisons de retraite pour choisir les programmes de télé et les menus à la cantoche. Les esclavagistes et les nazis étaient des gens sérieux doués d'une capacité de compréhension des enjeux sociaux à long terme.
Le beauf est une espèce qui dépasse la compréhension et l'entendement de l'être humain normal, c'est-à-dire moi.
Il cumule les handicaps, le beauf est un handicapé, mais n'a pas pour autant droit aux places bleues chez Leclerc, ce n'est que juste retour des choses. S'il n'existe pas de justice divine, au moins existe-t-il une justice humaine qui distribue les places bleues à bon escient, et l'on peut s'en réjouir. Le premier grief qu'on puisse faire à un beauf est d'avoir un goût de chiottes. La preuve, c'est qu'il choisit ta soeur. Tu en sais quelque chose, ta soeur n'est ni une mère ni une femme ni une fille, c'est ta soeur. Étonnamment, le beauf a eu un jour dans l'idée de pécho ta soeur, et tu te demandes bien pourquoi puisque ta soeur n'est pas attirante, toi-même n'ayant jamais eu dans l'idée de pécho ta soeur, ce qui est bien normal puisqu'elle n'est pas belle. Le beauf fait fi de ces considérations esthétiques pourtant naturelles autant que primordiales en vue d'une reproduction de l'espèce de dégénéré va, ce qui démontre une absence de goût patente, et son attrait pour les enfants laids, qu'on peut taper plus facilement que les enfants beaux il est vrai, les dégâts psychologiques étant moindres chez un enfant moche, car un enfant moche même avec un oeil au beurre noir reste un enfant moche, et la différence n'est pas flagrante. C'est même un devoir de frapper les enfants moches, afin de leur faire prendre conscience du fait que leur vie ne sera pas des plus belles, au lieu de laisser planer le doute en toute hypocrisie. Il faut le mettre très tôt au contact des réalités, pour son bien. La réalité à cinq doigts ouvre sa conscience de petit être malchanceux, et c'est finalement faire oeuvre de bonté à son égard.
Le deuxième grief qu'on puisse faire à un beauf est d'être un sédentaire, il n'est pas un nomade. Au lieu d'aller péter dans la cuisine et se gratter les couilles dans la salle de bains, il fait tout dans son canapé. C'est que le canapé fait face à son principal pôle d'intérêt culturel qui est sa télé, et un bon moyen de reconnaître le beauf consiste à regarder sa télécommande - le commutateur automatique de programmes sans fil plastifié - et à constater que seul le bouton marqué "1" est usé, et que les boutons "5" et "7" sont tous neufs, et même pas déballés du polystyrène originel. Ceci est un marqueur fort dans la sociologie du beauf, consignons donc très soigneusement ce fait sur un coin de table par exemple, afin de l'avoir toujours à l'esprit ou pas loin si l'on est en déplacement dans un département limitrophe d'où on se trouve, qui peut très bien se situer au sud de la Loire, ça s'est déjà vu, ce n'est pas une légende. J'ai moi-même beaucoup pratiqué ce genre de voyages en départements limitrophes à la découverte de l'inconnu, le tout étant de partir avec une carte détaillée qui recense clairement TOUS les départements limitrophes et les possibilités d'y établir un camp de base ou au moins un avant-poste avec un sac de couchage, des barbelés et un panier de pique-nique. Si l'on s'aventure d'ailleurs sans visa ou titre de séjour dans un département limitrophe, on doit se munir obligatoirement, outre le fait d'être à jour dans ses rappels de vaccins, d'un fusil à pompe et de munitions en grande quantité pour fusiller chaque indigène rencontré, notamment aux check-points aux mains des milices autochtones, ceci pour faire baisser les tensions naturelles qui existent entre les différentes communautés.
Le beauf a une capacité très marquée à faire baisser le niveau intellectuel de ta famille, sa grande force résidant dans son insondable médiocrité, qui va de pair généralement avec un potentiel de connerie abyssal. Le seul point positif du beauf est qu'il a toujours une bière au frais qui t'attend. Reconnaissons-lui cette vertu, c'est presque souvent la seule et elle est à mettre à son crédit. Mais son utilité sociale s'arrête ici, et il devient même nuisible lorsqu'il n'a plus une goutte d'apéro à te proposer pour ne serait-ce qu'atténuer et diluer dans l'alcool les liens que tu as dû tisser avec cet être abject par la faute de ta soeur qui, décidément, n'aura jamais eu de plomb dans le crâne, puisque toute petite elle te tirait les cheveux, puis adolescente dansait sur du disco sans jamais avoir honte, et finit en toute logique sa vie au bras d'un imbécile qui lui aura fait trois petits monstres à son image -à lui-. La déchéance totale et sans une échappatoire possible. Dieu n'est pas gentil, il a la vue bouchée par les nuages. Dieu ne devrait atterrir que sur des planètes où il fait beau, même si le goudron brûlant des pistes d'atterrissage collerait aux pneus de son vaisseau divin. Mais l'aéroport n'est pas une structure adaptée à une visite de Dieu, car il sonnerait aux portiques de détection, puisque Dieu est Tout et qu'il a forcément du métal sur lui, d'où problèmes avec la douane et les services d'immigration. Si l'on veut que Dieu vienne un jour à notre secours, il faut désactiver les portiques de détection des aéroports, sinon on n'arrivera pas à le choper, on l'effraiera avec des alarmes. Mieux vaut essayer de l'attraper avec une tapette à Dieu géante avec de l'ambroisie et de l'hydromel pour l'appâter.
Dans un souci de maintien de ma dignité et de mon port naturellement altier, j'ai réussi à échapper à cet écueil qui est la condition du beauf, et de par ma position extérieure j'ai pu devenir un expert ès beaufologies reconnu par nombre d'éminents intellectuels du monde entier, à commencer par le plus grand d'entre eux, qui est je vous le donne en mille, le premier. Ou peu s'en faut, ne chipotez pas. J'ai vu les dégâts beaufesques que peut donner le mariage de mes deux soeurs, et je me suis résolu à ne jamais franchir le pas. Nous ne sommes liés avec madame pow wow par aucun contrat ni pacte ni serment, pour la bonne raison que je ne m'entendais pas avec sa famille, et pour laquelle je serais devenu un beauf tout ce qu'il y a de plus beaufique. Il faut dire que je leur déplaisais fortement, un mec de gauche dans une famille de droite, ça piquait les yeux, ça leur chatouillait les trous de nez, j'étais un genre de bolchevique vaporub qui donnait rapidement un coup de chaud aux joues. J'ai préféré ne pas me lier à ces gens qui sont des beaufs venus de l'ouest, intrinsèquement et de manière irrémédiable. Alea jacta ouest.
Considérant avec toute l'honnêteté intellectuelle qui nous caractérise ce faisceau d'indices graves et concordants, nous pouvons dès lors en tirer les conclusions qui s'imposent, à savoir:
- Le beauf est raciste car il n'aime pas les gens qui ne sont pas comme lui. C'est pour cette raison que nous n'aimons pas les beaufs, car ils ne sont pas comme nous.
- La soeur est un beauf qui s'ignore, puisqu'elle n'hésite pas à se lier - lors d'une cérémonie où tout le monde est bien habillé mais fait la gueule à la famille d'en face en se disant que c'est des cons - à un être intellectuellement diminué dont elle se reconnaît l'égale. Je voudrais pas dire.
- Le beauf est une race nuisible qui a pour projet la domination du monde. Lorsque tout le monde sera devenu des beaufs, la consanguinité inter-beaufs signera la perte de cette bien piètre espèce.
En conséquence, je m'assieds au bord de la rivière et je regarde passer les cadavres de beaufs au fil de l'eau, je peux même voir en la saison du frai d'autres beaufs remonter le courant à contre-sens, avec une carte de pêche et du fil solide je pourrais en attraper, mais en-dessous d'une certaine taille y faut les relâcher. La darne de beauf en papillote ou le beauf fumé au bois de hêtre peuvent être des solutions envisagées pour limiter la prolifération de l'espèce.