Le sympathique garçon coiffeur auquel je confie régulièrement le soin de me couper les tifs (comme d’habitude, les oreilles bien dégagées, merci…) est formel : François Hollande se teint les cheveux et, d’après lui, c’est pas beau. Déjà qu’il a des boutons plein la gueule et qu’il se déplume plus que Sarko… C’est ce qu’on appelle un avis d’expert, de ceux qu’il est toujours intéressant de recueillir et de prendre en compte si on a quelques ambitions politiques. On a de fait trop tendance à l’oublier : les coiffeurs, qu’ils soient pour hommes, pour dames ou pour les toutous ont ceci en commun avec les patrons de bistrot et les vendeurs de (vraie) galette-saucisse d’être des vecteurs essentiels de formation de l’opinion publique. Surtout les coiffeurs ! C’est bien normal quand on pense à la position dans laquelle ils exercent leur art : rien d’étonnant à ce qu’ils aient un accès privilégié à l’oreille de leur clientèle. C’est sur que, question proximité auditive, ils ont un net avantage sur les diseuses de bonne aventure, les vendeurs d’assurances-vie à domicile ou les moniteurs d’aquagym. Sans parler évidemment des cireurs de chaussures.
Faut-il en déduire pour autant que shampouinage et frisottage sont les deux seules mamelles du débat politique et de la propagande électorale ? Sans doute pas. Pour autant il ne faut pas nier qu’en politique comme en recherche d’emploi le look, la présentation si vous préférez, ça compte quand même un peu. Si vous ne me croyez pas, pensez plutôt à ce qui est arrivé à cette pauvre Eva Joly qui, faute de s’être trouvé un professeur de Français compétent, un coiffeur digne de ce nom et un oculiste convenable, s’est non seulement vautrée dans les profondeurs du classement à la présidentielle mais a probablement gâché aussi toutes ses chances d’être nommée un jour Haute Commissaire du Peuple à la Chasse aux Exilés Fiscaux dans le gouvernement de Jean-Marc Ayrault. Du coup, la voilà obligée de s’incruster au Parlement européen pour y subir les taquineries de Cohn-Bendit et examiner des projets de résolutions sur la réglementation de la pêche au trou hivernale dans le golfe de Finlande ou l’extinction du paupérisme en Grèce après dix heures du soir. Ce n’est pas pour être désagréable avec elle mais faut reconnaître qu’elle l’a quand même un peu cherché.
Si j’ai donc un conseil à donner aux d’jeunes et aux moins d’jeunes qui, à l’occasion des législatives, se lancent en politique, c’est de commencer par faire la tournée des salons de coiffure de leur circonscription. Inutile de vous épuiser à arpenter les marchés pour serrer la louche aux p’tits commerçants ou pour distribuer à leurs clientes des tracts qu’elles ne liront pas. Inutile également de gâcher vos soirées à organiser des réunions publiques pour haranguer trois papies désœuvrés ou venant juste de s’engueuler avec bobonne. Concentrez vous plutôt sur les échoppes des membres de l’honorable corporation des coiffeurs-visagistes et autres barbiers du coin. Ne venez surtout pas les voir les mains vides de toute proposition programmatique les concernant. Entre la prime de maquillage pour les shampouineuses et le remboursement des frais d’abonnement à l’Equipe pour les coiffeurs pour hommes, vous avez le choix. S’agissant des coiffeurs pour dames de sexe masculin, vous pouvez éventuellement aussi faire subtilement part de votre engagement en faveur du mariage gay... Vous ferez comme vous voudrez mais si, faute d’avoir suivi ce conseil, vous vous prenez une taule dès le premier tour, ça ne sera pas la peine de venir pleurnicher après dans les jupes de « Restons Correct ! ». On vous aura prévenu.
Message personnel à Valérie Trierweiler pour conclure : c’est vous qui voyez mais, changement pour changement, faudrait peut être envisager aussi celui du capilliculteur élyséen.