C’est le début du mois et c’est le moment de faire un petit point économique. Au début du mois de mai, je constatais déjà la contraction de l’économie avec différents indicateurs qui laissaient perplexes sur une reprise tant annoncée, jusqu’en Chine. D’ailleurs, le principe même d’une reprise n’est plus guère dans les bouches, et tout le monde, l’air grave, admet qu’il y a encore quelques problèmes. Eh oui, le changement, c’est maintenant, mais pas pour le meilleur.
On découvre ainsi que du côté des banques européennes, la situation est en réalité bien pire qu’il y a quelques mois encore.
Le credit-crunch semble continuer en dépit des agitations spasmodiques des dirigeants de la zone euro dont la seule rigueur pour le moment s’apparente bien plus à la cadavérique qu’à la budgétaire. Si la presse nationale française est particulièrement réservée sur le sujet, il n’en reste pas moins vrai que deux grosses sociétés de banque et d’assurance sont dans une situation catastrophique.
Il y a tout d’abord Groupama dont les signes avant coureurs d’une maladie en phase terminale se sont accumulés (ici, là, là et encore là); on s’attendait à ce que le Ministre du Dressement Reproductif s’empresse sur le dossier et nous fasse moult déclarations d’intention, frémissantes de vigueur et de volontarisme. Mais bon, le sujet est un peu trop complexe pour Arnaud. Il l’est d’ailleurs un peu trop aussi pour Moscovici qui n’en a pas parlé. Il est probablement un peu trop complexe pour tout le monde : la presse n’en parle pas des masses, les politiciens feignent la surdité, le monde financier se racle un peu la gorge en faisant ahem ahem et on passe bien vite à un autre sujet.
Autre sujet qui n’est pas Dexia, d’ailleurs, dont là encore on sent que l’avenir n’est pas du tout assuré. Comme le remarque Charles Gave, la déroute de la banque belgo- franco- luxem- bourgeoise — qui a « organisé » les subprimes pour les collectivités territoriales françaises — semble bien avancée : elle aurait grillé en six mois les 55 milliards de recapitalisation accordés à l’automne dernier, en se retrouvant maintenant complètement dépourvue alors que la bise arrive version ouragan (et il ne s’appelle pas Winnie ou Katrina, mais plutôt King-Kong).Peut-être, à l’instar de Bankia (si si, authentique), ces banques sauveront-elles la mise en proposant des serviettes de bain à l’effigie de super-héros modernes, comme Super-Mario Draghi (qui transforme le papier en compost), ou Super-Flanby, le seul super-héros super-normal super-humide ?
En tout cas, pendant que le monde bancaire européen décroche, le monde financier américain et surtout Wall Street décrochent aussi, par solidarité, sans doute. Ça dégringole un peu dans la douleur, et on sent que les tensions sont importantes : bien que le VIX (indicateur de la volatilité) ne soit pas particulièrement spectaculaire actuellement, la SEC (gendarme boursier américain) a approuvé vendredi une proposition de gestion des cas de volatilité extrême sur les marchés en diminuant les seuils à partir desquels la bourse peut être interrompue voire fermée lorsque des hausses et surtout des baisses trop raides sont enregistrées. Forcément, c’est bon signe.
Il est évident que les tensions grecques et maintenant espagnoles provoquent au moins en partie ce qu’on observe à Paris, Londres, Francfort et New-York, et le récent passage de l’euro sous les 1.23 USD illustre assez bien la défiance qui s’est emparée des investisseurs : tout le monde sent, plus ou moins confusément, que l’Euro vit ses dernières semaines, en tout cas tel qu’il a été conçu initialement. À tel point que d’insistantes rumeurs font état de la réimpression de drachmes, et que Bloomberg s’entraîne un peu à la réintroduction de la monnaie dans ses prompteurs.
Et pendant que les bourses décrochent, l’immobilier français fait pareil. Comme il s’agit d’un marché peu fluide, la baisse est plus faible et notoirement plus lente que la bourse. Mais on sent déjà que la tendance s’est inversée, y compris dans la région parisienne, réputée pourtant imperméable à la réalité : les Français n’ont plus les moyens d’acheter. La situation française, au-delà de l’immobilier, devient même préoccupante au point d’être spécifiquement remarquée par la Commission européenne qui l’estime « au bord du gouffre ». Bord du gouffre qui ne risque pas de s’éloigner avec une sortie de la Grèce de la zone euro, dont l’analyse, par Peter Tchir de TF Market Advisor, se résume assez bien à son titre : à côté, la faillite de Lehman ressemblera à un jeu d’enfant.
Là encore, c’est forcément un signe de bonne santé. Mais ouf, comme les socialistes sont aux commandes, on peut être sûr que tout ça va bien se terminer !
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