Eduquer à l’Internet libre

Dans l’imaginaire collectif, comme dans celui de ses concepteurs, Internet rime avec liberté : liberté d’expressions, de publications, de partages, de confrontations d’idées.

Internet est aujourd’hui un espace infini, à l’interface des réglementations nationales et internationales et des régimes de protection de la propriété intellectuelle. Espace marchand également où les ventes en ligne ont une croissance exponentielle, et où les espaces publicitaires se multiplient à l’identique. La Toile est en passe de dépasser la télévision dans les médias les plus regardés chaque jour.

Aujourd’hui de plus en plus d’adolescents y détaillent même leur vie et offrent à qui veut les circonvolutions de leur intimité par la pratique des journaux « extimes » publiés sur les réseaux sociaux et décrits par Sébastien Rouquette, maître de conférence à l’université de Clermont-Ferrand II. Ces ados, par milliers, se livrent à cœur ouvert, et laissent, à jamais, trace de leurs émois du moment.

Dans le même temps, cette impression de liberté s’écorne chaque jour davantage. L’exemple le plus récent est un accablant rapport de la FCC (Federal Communication Commission) sur le programme Google Street View rendu public mi-avril. Lancés en 2007, les véhicules du programme Google Street View ont quadrillé les rues afin de les intégrer à Google Maps. Mais quand une voiture de Google Street View tombait sur un réseau wifi ouvert –c’est-à-dire un routeur non protégé par un mot de passe– elle enregistrait tout le trafic numérique qui y passait. Aussi longtemps que la voiture était dans les parages, elle aspirait tout un flux de données personnelles : logins, mots de passe, emails dans leur intégralité, historique de navigation, détails médicaux, recherches sur des sites de rencontre ainsi que films et musique consultés en streaming. C’est de l’espionnage. La pratique a aujourd’hui cessé chez Google. Mais quid des milliers autres applications qui font de même avec nos publications.

Aujourd’hui deux avenirs se dessinent pour la Toile. D’abord ouvrir le grand chantier de la régulation des échanges, des contenus mais aussi de la surveillance au risque de brider un peu plus la liberté. L’autre possible, qui a de loin ma préférence, est celui de l’éducation à l’usage d’internet. En la matière, beaucoup reste à faire alors que nos enfants sont tous ultra connectés aujourd’hui.

Aux côtés des parents, l’école est aujourd’hui un lieu primordial d’explication et de pédagogie sur l’usage d’internet, sur ses avantages et ses limites, sur ses potentialités comme ses risques. Au moment où Vincent Peillon lance son grand chantier l’éducation, une initiation à la technologie internet me paraît fondamentale, et ce dès l’école primaire.