L’entre-deux maussade, entre l’hiver terne et le printemps rayonnant, touche à sa fin : il est temps de trouver une alternative à votre jean en denim épais pour aborder fraîchement les beaux jours.
Et c’est pour remplir ce rôle que le chino est revenu en force depuis quelques années, n’étant maintenant plus réservé au rat de bibliothèque à lunettes rondes.
Inventé pour maintenir les soldats anglais au frais en Inde au milieu du XIXè siècle, il se popularise rapidement lorsque les troupes américaines se l’approprient à partir de la Seconde Guerre Mondiale.
Pourquoi chino ? Car depuis l’Inde, ces pantalons ont été amenés aux Philippines, où ils ont été revendus à l’armée américaine par des marchands chinois.
Symbole du preppysme, par opposition au jean plus caractéristique des classes moyennes, il était jusqu’il y a quelques années l’icône du gentil garçon de bonne famille.
A travers les tenues proposées, j’ai donc décidé de rester dans un style preppy et traditionnel en le rajeunissant grâce à des pièces fortes mais faciles à porter, qui proposent toutes des twists subtils et me permettent d’éviter un style trop connoté et trop sage.
Comme d’habitude, vous n’avez pas besoin d’avoir les pièces précises que je vais utiliser pour profiter des conseils et du raisonnement utilisé derrière la construction de chacune de ces tenues et les appliquer à votre garde-robe. Repérez simplement quelques idées qui pourraient se greffer à votre garde-robe existante.
Tenue 1 : L’outerwear britannique détourné
Veste Hixsept, chemise et chino Surface to Air, et sneakers Vincent Schoepfer.
La tenue est à la base relativement preppy : un chino coupe droite, une chemise rayée bleu blanc rouge et un blouson court avec coupe chemise qui n’est pas sans rappeler une Barbour, une autre icône du preppysme.
Il faut donc se concentrer sur les détails pour constater qu’au final la tenue n’est pas si connotée que cela : la couleur khaki du chino est très particulière, pas trop assimilée à la couleur militaire classique.
La veste en jean a une prise de lumière digne des plus beaux denims bruts et comporte un jeu de matières vraiment intéressant avec ses empiècements en cuir camel suédé et des boutons blancs en ivoire. La composante workwear est vraiment présente, surtout avec la poche poitrine qui rappelle vraiment les poches des jeans.
Même si la silhouette est connotée, en s’attardant sur les détails on voit que cette tenue s’éloigne avec subtilité d’une tenue preppy trop gentil garçon
Tenue 2 Le preppysme flashy
Chino et veste Hixsept, chemise Surface To Air et sneakers Vincent Schoepfer.
Cette tenue en apparence sage se distingue par ses détails. Le chino, traditionnellement beige ou khaki, a ici une couleur très particulière, entre bleu nuit et pourpre. J’ai été particulièrement surpris par le confort et la justesse de la coupe de ce pantalon. Il joue à la fois sur un léger travail de matières avec des boutons en corne, mais aussi et surtout sur les couleurs avec un liseré contrastant au niveau de la ceinture : c’est la signature d’Hixsept.
Avec un bas sombre et une chemise, on pourrait également s’attendre à du formel : les détails du chino rendent plus casual la tenue, ainsi que la veste.
J’ai vraiment eu un coup de cœur pour cette veste en denim qui mélange le rendu traditionnel d’une Barbour, l’aspect brut et workwear du denim, et le travail stylistique des inserts en cuir qui forment à la fois un bon contraste de matière et un bon contraste de couleurs.
Les sneakers achèvent de rendre la tenue vraiment passe-partout et détendue, et authentique avec la semelle espadrille.
Tenues articulées autour du Chino Melinda Gloss : le marin revisité.
Voilà un style stéréotypé clairement marin vers lequel je me suis dirigé, réalisée d’abord avec une marinière et un chino Melinda Gloss.
Le chino bleu électrique rompt davantage la monotonie des couleurs plus sombres ou plus effacées. Il faut donc le porter avec des couleurs simples, j’ai choisi encore une fois les sneakers Vincent Schoepfer afin d’avoir un bas équilibré sur les couleurs.
Le haut se concentre davantage sur les motifs, les coupes et les tissus.
La marinière Melinda Gloss est vraiment agréable et bien coupée : on peut la porter de manière vraiment détendue manches retroussées et en tournant légèrement les coutures. Ses bords francs renforcent l’impression d’une pièce brute et masculine, d’un tissu de qualité qui se suffit à lui-même.
En dehors de rayures assez claires, presque accordées au chino, elle reste très basique.
J’y ai donc rajouté un cardigan Surface to Air qui se distingue par trois matières différentes entre le corps du cardigan, le dos et le liseré. On a aussi un léger contraste de couleur entre le liseré écru et gris.
Une pièce qui m’a vraiment marqué et qui est parfaite grâce à son col pour être portée avec un tee-shirt, ou avec une chemise casual au col vraiment mou, type chambray ou flanelle à carreaux. Porter manches retroussées et avec seulement les boutons du milieu fermés, c’est vraiment un style à l’arrache qui reste sobre et facile.
Elle me paraissait indiquée pour me détacher d’un style trop marin/petit bateau.
J’ai ensuite essayé d’y rajouter la fameuse veste Hixsept. Mais c’était la fois de trop : la superposition cloche. Au début, je me suis dit que c’était car le style était vraiment différent.
Le premier rendu apparent de la veste Hixsept est traditionnel et celui du cardigan se rapproche plus du streetwear stylisé.
On rapproche en plus deux styles différents d’un même registre traditionnel : celui du marin breton et celui du chasseur britannique.
Mais là n’était pas le problème.
Tout était une question de géométrie et d’encombrement : le petit col de la veste est vraiment discret, surtout à côté des boutons écrus énormes. S’il n’est pas renforcé par un autre col dans une couche inférieur, comme simplement un col de chemise, il devient tout de suite de trop. Voyez tout de suite que la superposition est vraiment chargée entre les détails du col de la marinière, ceux du cardigan et ceux de la veste. Le message est brouillé car il y a justement trop de contrastes et rien ne ressort vraiment.
J’ai donc retenté l’expérience avec une pièce Gaspard Yurkevich, beaucoup plus sportswear : c’est un mélange entre le teddy (avec sa texture et ses bords côtes) et le perfecto avec sa fermeture à boutons asymétrique. Outre le travail de textures et de construction, on remarque aussi un contraste de couleur plutôt bien réussi qui vient enrichir un peu mais pas trop une pièce quand même bien chargée.
Ce qui va nous intéresser ici, c’est l’harmonie des cols : trois cols ronds et une superposition vraiment harmonieuse géométriquement entre le cardigan et la veste avec,, cerise sur le gâteau, un liseré un peu coloré sur la veste et un liseré de matière contrastantes plus sobres sur le cardigan.
On allie deux travaux stylistiques assez proches, éloignés en couleur pour les rendre bien distinct et qui géométriquement s’emboitent quasiment. C’est plutôt poussé mais ça colle.
A bientôt,
Valéry, du blog de mode masculine BonneGueule.fr
PS. Merci à l’Exception pour le prêt des vêtements et de son équipement photo. Merci aussi à Maxime Jérôme pour les photos et Philippine de Saint-Exupéry pour le stylisme.
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