Je n'ai été amoureuse que de deux garçons. Et qui portaient le même nom de famille. Conrad était le premier, et je l'aimais comme on ne peut aimer que la première fois. Les yeux fermés, parce qu'on refuse de les ouvrir. Avec étourdissement, bêtise et ferveur. Un genre d'amour qui ne se reproduit jamais.
Ensuite, il y a eu Jeremiah. Dans son regard, je voyais le passé, le présent et le futur. Il ne connaissait pas seulement celle que j'avais été, mais celle que j'étais devenue, et il m'aimait toujours.
Terriblement émouvant, c'est ce qui ressort de cette lecture (en fait, une relecture... et cela a du bon, mes nerfs n'étaient plus électrisés, je savais ce qui m'attendait, j'avais juste besoin / envie de me rassasier de l'air salin de Cousins). Et il faut dire que la série de Jenny Han possède un charme inégalable : c'est beau, c'est doux, c'est touchant. Cela vous berce et cela vous rappelle votre jeunesse, alors qu'on est une toute jeune fille en train de faire ses premiers pas dans le monde des grands. Être adulte, ça ne veut pas simplement dire porter des talons hauts et jurer fidélité vitam eternam à son amoureux. C'est surtout une prise de risque de chaque instant, savoir dire oui, saisir la chance au tournant, affirmer ses choix, reconnaître ses erreurs, oser, aimer, chavirer, rompre, y retourner encore et toujours.
La jeune Belly nous réserve donc un dénouement poignant et qui promet d'affoler les battements de votre coeur. Ce dernier tome sera celui des grandes décisions et des nouveaux départs ; je pense qu'il ne manquera pas de vous étonner, de vous décevoir et de vous bouleverser à plus d'un titre. L'ambiance n'est plus à la rigolade, le passé doit être rangé dans des boîtes en carton, comme une maison qu'on referme après les vacances d'été. Pour bien faire, les souvenirs vont et viennent, ils aident à compléter l'histoire et à fignoler les contours des personnages, ils sont aussi les petits cailloux invisibles pour nous guider jusqu'à la fin.
Cette deuxième lecture a su me réconcilier avec le sentiment d'amertume ressenti la toute première fois, alors que j'avais avalé avec gourmandise et incompréhension les tours et détours proposés par l'auteur. Non, je n'étais pas contente. J'étais outrée. Il y avait tromperie sur la marchandise. Et puis le temps a passé, j'ai replongé et j'ai aimé. J'ai retrouvé tout ce qui avait su me séduire et me conquérir dès les premières notes : la nostalgie, la famille, les amours compliquées, les blessures de l'enfance, les rêves de l'adolescence, le calme de la maison de la plage, et l'impression de velours dans le déroulement de l'histoire... en bref, j'étais totalement sous le charme.
Je conserve donc un profond attachement à cette série et aux trois livres qui la composent, car au-delà du ton doucereux qui semble être la marque de fabrique, il y a aussi une réelle tristesse et détresse derrière chaque mot, chaque choix de vie. Et forcément, cela me parle...
L'été devant nous, par Jenny Han
Albin Michel, coll. Wiz, 2012 - traduction par Alice Delarbre