Comment l’Euro a permis aux Grecs de vivre au dessus de leurs moyens

Publié le 01 juin 2012 par Copeau @Contrepoints

On ne peut pas résumer le problème de la Grèce au fait que de nombreux Grecs ne paient pas leurs impôts. L’euro, en particulier, est souvent incriminé. Petite étude de cas appuyée sur un graphique…

Par Acrithène.

On ne peut pas résumer le problème de la Grèce au fait que de nombreux Grecs ne paient pas leurs impôts. L’euro, en particulier, est souvent incriminé. Petite étude de cas appuyée sur un graphique…

En bleu sur ce graphique, le besoin de financement extérieur représente la différence entre les dépenses de la Grèce et ses revenus (déficit de la balance courante, en comptabilité nationale). On voit que ces déficits ont considérablement cru à partir de la fin des années 1990, faisant exploser la dette extérieure du pays. Un diagnostic qui précède la crise financière de 2008. En quoi cette évolution est-elle liée à l’euro ?

La dette extérieure est le pendant du déficit commercial, c’est-à-dire d’un volume d’importations trop important au regard des exportations. En clair, les Grecs consomment à crédit des produits étrangers. Or, au début des années 1990, les importations grecques étaient limitées par le coût de l’endettement, qui atteignait des niveaux considérables (comme de nouveau aujourd’hui) mais aussi par la dépréciation de la drachme sur le marché des changes qui renchérissait le prix des biens étrangers. C’était une période où les importations étaient de plus en plus chères, et le crédit hors de prix.

On voit très clairement sur le graphique comment l’euro a bouleversé cet équilibre.

  • D’abord, la marche vers l’euro a provoqué une convergence des taux d’intérêts à travers la zone euro, comme si tous les Etats emprunteurs se valaient. Cette convergence est en partie due à l’idée implicite que la zone euro ne laisserait pas un de ses membres faire faillite, du fait du coût tant économique que politique induit. Sur cette base, il devenait logique que la dette grecque soit jugée d’aussi bonne qualité que la dette allemande (en violet). C’était très loin d’être le cas au début des années 1990.
  • Ensuite, lorsqu’un pays a un déficit extérieur, sa monnaie tend à se déprécier car les agents doivent acheter des devises étrangères pour régler leurs factures. La dépréciation de la devise est une sanction rééquilibrant le marché en rendant sa compétitivité à la nation touchée. Or à partir de 2001, la drachme n’existant plus, ce mécanisme ne pouvait plus fonctionner. En fait, le taux de change a même évolué en sens inverse ! Importations peu chères, emprunt à faible taux, quoi de plus encourageant pour être tentés de vivre à crédit ?

Finalement, l’élévation du niveau de vie en Grèce depuis l’adoption de l’euro est totalement virtuelle, créée par une monnaie européenne qui s’apprécie alors que la drachme se serait dépréciée, et par une dette peu onéreuse permise jusqu’à la crise financière par l’idée d’une solidarité tacite entre pays de la zone euro. En 2007, les dépenses grecques excédaient déjà de 15% leurs revenus, voilà qui dédouane Lehman Brothers d’une part des malheurs du monde…

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