Visionner les défilés Chanel de ces quelques dernières années c’est constater que la marque s’applique à rester à la pointe des tendances musicales, avec des choix résolument branchés. Si les toutes dernières collections furent présentées avec des morceaux du groupe parisien d’electro cold « Tristesse Contemporaine » ou du très branché premier album de David Lynch, on a pu découvrir les précédentes avec des titres de Murcof, de Guy Boratto, d’Hercules and Love Affair, de Seelenluft, de John Zorn, d’Alan Vega ou d’Hot Chip, pour en citer quelques uns. En 2007, la marque s’est même offerte la présence de la chanteuse Cat Power pour un live en temps réel pendant le défilé. Un luxe absolu, puisque les apparitions de l’artiste sont très rares. Par ces choix musicaux, toujours très actuels et parfois audacieux, la marque pose une attitude de leader d’opinion à la pointe des tendances, osant des univers délicats qui finalement colle parfaitement avec l’esprit de la maison: élégant mais osé, pour ne pas dire trash parfois. Engagé et moderne.
Les playlists des défilés sont à decouvrir ici !
Niveau brand content, Chanel mise aussi sur la promotion des off de la vie de la marque, en publiant des vidéos des backstages des défilés. Elle s’aventure également dans des formats atypiques comme cette vidéo qui met en scène de manière artistique les détails d’une collection, ou même celle qui pose un discours autour de la féminité et de ses variations. Découvrez toutes ces vidéos sur le blog Chanel News. Là encore musicalement, on vogue sensiblement vers les mêmes horizons qu’en défilés: M.I.A, Schlachtofbronx, Crookers feat. Style of Eye & Carli etc. De l’underground et de la hype.
Du côté des publicités TV, c’est une autre affaire. Le spot Coco Mademoiselle mettant en scène Keira Knightley dans une journée de mannequin un peu hors du commun propose une reprise de Joss Stone, « It’s a man’s world ». Allure Homme Sport diffuse un extrait instrumental du titre « I heard it through the gravepine » des Creedence. Vanessa Paradis chante elle-même « What a day for a daydream » dans la publicité Rouge Coco et Gaspard Ulliel quitte le plateau d’une interview sur fond de « She Said Yeah » des Rolling Stones dans le spot Bleu de Chanel. Entre classiques du rock, de la soul ou pop chantonnée, nous sommes ici bien loin de la hype musicale des défilés de mode. Alors, si les scénarios et la qualité photographique de ces films nous emmènent vers le merveilleux et l’extraordinaire, la musique, elle, plus sage, nous rapproche assez de l’ordinaire.
Récemment, on a pu découvrir les brand fictions « Remember now » ou « The tale of a fairy » réalisées par Karl Lagerfeld, mettant en scène les égéries de la marque comme Anna Mouglalis ou Baptiste Giabiconi. Ce sont des courts-métrages illustrant le milieu du luxe et ses travers, où le placement de produits va bon train. Karl Lagerfeld en parle comme « des films sur le mauvais usage de l’argent qui commence dans la violence et qui finissent dans les sentiments ». Il s’agit surtout de Brand content. Niveau son, notamment pour « The tale of a fairy » on est un peu surpris. La musique ressemble sensiblement à celles des téléfilms un peu mièvres et tire alors l’ensemble de la création vers le bas. Ce qui est dommage.
Chanel, très active dans la promotion de son univers de marque, nous montre à quel point elle investit différents supports médiatiques et différents formats, des plus traditionnels jusqu’aux plus novateurs et créatifs. Une manière d’honorer l’esprit conservateur de la maison, tout en maintenant sa posture résolument moderne. Musicalement, nous assistons pourtant à une sorte de fracture entre un univers pointu et surprenant et un autre parfois attendu sinon décevant.