Magazine Culture
A Carla
Histoires d'autobus
Pour que les Libanais, ceux qui sont restés comme ceux qui sont partis, évitent de reprendre l' "Express Beyrouth-l'enfer", contre lequel les avait pourtant mis en garde Etel Ednan dès 1970, il faudrait qu'ils fassent de toute urgence le "Voyage au bout de la violence" * auquel les invite Samir Frangié. Première parole vraie sortie depuis longtemps du pays des cèdres, son livre luit de toutes les facettes de l'intelligence comme une issue possible du long tunnel d'obscurantisme confessionaliste.Intelligence historique qui lui permet d'établir et retracer de l'intérieur et de manière imparable tout le processus d'absorption du pays par le grand frère syrien. Intelligence personnelle qui lui a permis, en dépit du combat contre la maladie, de livrer une fois de plus "un exposé saisissant, lumineux et magistral" des dysfonctionnements du Liban. Intelligence prospective qui fait de sa proposition d'un "Etat du vivre ensemble" basé sur "une culture de la vie", une clé pour l'avenir de la région, Libanais, Syriens, Palestiniens et Israéliens confondus.L'autre autobus, qu'il ne faut pas rater celui là, c'est celui que nous fait prendre au Caire le cinéaste Mohamed Diab. "Les femmes du Bus 678" est le hurlement d'un homme en faveur des femmes arabes. Sans avoir la fluidité des films de l'iranien Asghar Farhadi, "Une séparation" ou "A propos d'Elly" , ce premier film est démonstration que sans révolution sexuelle dans la révolution arabe, sans redonner leurs droits à celles qui sont "la moitié du ciel", le printemps arabe n'accouchera de rien de bon.
* L'Orient des livres 2011 / Actes Sud 2012.