La nouvelle ère des applications mobiles, ouverte par Apple il y a moins de 4 ans, n'en est qu'à ses balbutiements et l'expérience utilisateur sur smartphone reste encore trop souvent copiée sur les "habitudes" du PC et du web. Thomas Husson (Forrester) esquisse dans un billet les évolutions qui caractériseront la deuxième vague, dont quelques-unes devraient trouver un écho dans les services financiers.
Avec une diffusion de plus en plus importante des smartphones dans les pays développés et une utilisation en croissance exponentielle des applications qui leurs sont dédiées, l'enjeu du mobile, pour toutes les entreprises, dont, en particulier, les banques, est de répondre aux attentes des consommateurs et de rester pertinentes et visibles au sein d'AppStores qui regroupent désormais des centaines de milliers de titres.
Or, s'il est facile de croire que les applications bancaires resteront toujours parmi les plus populaires parce qu'elles sont incontournables et que leurs utilisateurs sont captifs, la réalité est que les institutions financières doivent tout de même faire des efforts pour fidéliser leur clientèle sur mobile. A défaut, elles risquent, a minima, de perdre des opportunités de contact et, au pire, de voir les consommateurs rechercher une meilleure expérience chez les concurrents...
Première étape dans cette voie, les applications doivent évoluer régulièrement, en s'enrichissant progressivement de fonctions et de services supplémentaires... La recommandation parait triviale pour certaines catégories de logiciels (notamment les jeux) mais elle devrait s'appliquer beaucoup plus largement. Non seulement de nouvelles versions permettent-elles d'attirer l'attention des utilisateurs et de relancer les usages mais, surtout, leurs attentes changent, leurs exigences s'affirment et se déplacent... et il faut impérativement y répondre, dans des délais raisonnables, sous peine de les "perdre".
Pour choisir les évolutions à introduire dans ces cyles réguliers, les techniques classiques de consultation des utilisateurs sont évidemment les plus simples à implémenter, notamment par le biais de questionnaires intégrés directement au sein des applications. Mais il ne faut pas non plus hésiter à tester des fonctions originales, qui ne rencontrent pas nécessairement d'écho a priori. C'est en effet parfois par la pratique que le succès se fait et non en interrogeant le public. Et, pour ceux qui craignent de perturber la majorité silencieuse, pourquoi ne pas offrir une solution "expérimentale" dédiée aux volontaires, à l'image du "Lab" de BNP Paribas ?
Plus concrètement, quelles sont les idées à développer pour passer à cette fameuse deuxième vague d'applications ? La première pourrait être la contextualisation, dont on parle depuis si longtemps mais qui n'a pas encore été réellement ne serait-ce qu'effleurée, surtout dans des solutions bancaires. Ne pourrait-on imaginer, par exemple (anecdotique), un outil de consultation de comptes qui "apprendrait" à proposer par défaut la gestion de budget quand l'utilisateur est à son domicile et une visualisation immédiate des réserves disponibles (voire une offre de crédit à la consommation...) s'il se trouve dans une zone commerçante pendant la période des soldes ?
Immédiatement derrière cette avancée dans la contextualisation, il devient urgent de se pencher sérieusement sur les possibilités offertes par l'analyse des immenses gisements de données que détiennent les banques sur leurs clients, qui pourraient utilement compléter et rendre beaucoup plus pertinente la personnalisation qui l'accompagne. J'avoue être légèrement excédé par le discours récurrent qui écarte d'emblée toute initiative dans ce domaine sous prétexte de réglementation et de toute-puissance de la CNIL. Je suis, pour ma part, intimement convaincu qu'il est possible, avec un peu de bonne volonté et d'intelligence, de concilier la protection des données personnelles et leur utilisation pour offrir des services à forte valeur ajoutée.
Pour revenir sur un terrain moins polémique, de nombreuses fonctions présentes sur les téléphones modernes restent inexplorées et sous-utilisées par la plupart des logiciels. Thomas Husson évoque ainsi les systèmes de notification, dont je soulignais déjà le potentiel il y a quelques jours, mais il en est bien d'autres et la liste ne fait que s'allonger avec le temps.
Une autre piste ambitieuse proposée, qui n'est pas naturellement abordée par les institutions financières, est la création de nouveaux business models. Quand Forrester l'évoque, elle s'adresse évidemment plutôt aux startups du mobile. Pourtant, regardez ce que Barclays est en train de construire avec son porte-monnaie mobile Pingit : il y est effectivement question de la définition d'un modèle financier totalement nouveau, rendu presque indispensable par la demande pressante des consommateurs pour des services gratuits. La suggestion peut donc bien s'appliquer aux banques...
Ce ne sont là quelques exemples de directions possibles pour les futures applications mobiles, les options disponibles sont beaucoup plus nombreuses.. Il ne donc reste plus qu'à attendre d'être surpris par les prochaines applications des banques. Ou bien par celles des développeurs tiers qui tireront parti des APIs ouvertes qui sont mises à leur disposition (par Axa Banque et le Crédit Agricole) pour, justement, accélérer les cycles d'innovation...