Une question d’âge est un drôle de roman. Enfin, drôle, pas tellement…
Un couple, faisant partie de la bonne société, décide d’adopter un enfant. C’est un choix, pas un dernier recours. Seulement, si un enfant est souvent synonyme de joies à venir pour les futurs parents, le parcours avant l’adoption définitive est souvent semé d’embûches. C’est d’ailleurs ce long cheminement dans les méandres de l’administration qui constitue ce que l’on pourrait qualifier de part documentaire du livre. Le ballet des assistantes sociales, pas toujours très professionnelles (mais ça va très prochainement changer, à bon entendeur…
), des médecins chargés de valider les bonnes moeurs du couple, et les multiples démarches à l’étranger sont autant d’entraves au bonheur familial…Dans ce roman est évoqué, sans aucun détour (mais alors aucun !) une adoption qui se passe mal. Très, très mal. Le complexe d’Electre (le complexe oedipien inversé, pour une fille) touche de plein fouet la petite fille adoptée qui devient au fil des années absolument insupportable et inhumaine avec ses parents. Des serviettes hygiéniques usagées mises dans le cartable de la mère prof, à la consommation de drogue dure, en passant par la diffamation, la jeune fille fait subir à sa mère des atrocités inimaginables. Une question se pose alors : comment à son tour ne pas regretter cette adoption ? Tout simplement, parce qu’un enfant biologique peut tomber aussi dans cette folie destructrice.
Le récit fait la part belle à la souffrance de la mère et à ses multiples tentatives pour renouer le dialogue avec sa fille, pour ne pas perdre l’amour de son époux et pour résister aux calomnies qui l’accablent.
Si ce texte appartient bien au genre romanesque, et non au témoignage, la surenchère, à ce point, me paraît être beaucoup trop développée. La fin aussi m’a laissée quelque peu dubitative sonnant un peu comme un conte de fée version télé-réalité.
Il n’en reste pas moins qu’Une question d’âge reste un récit intéressant qui offre un point de vue décalé sur l’adoption, qui sait en vanter la beauté sans en cacher les difficultés que ce choix implique dans la vie des parents et des enfants. (La réflexion sur les liens entre les enfants biologiques et les enfants adoptés au sein d’une même fratrie est d’ailleurs assez développée.)
Evelyne Pisier, Une question d’âge, éditions du Livre de poche