La dernière étude de l’IFOP[1] sur le paiement électronique montre que seulement 28% de la population française réserve un accueil enthousiaste au paiement mobile.
L’image du paiement mobile s’est récemment détériorée en France. Est-ce le fait de nombreuses promesses restées à l’état de pilote ? Est-ce le témoignage de la difficile intégration du paiement mobile dans les habitudes quotidiennes des consommateurs ?
Pourtant, les nouvelles offres foisonnent. Après des années de maturation, de rodage, voire d’attentisme, beaucoup d’acteurs se lancent tour à tour, et à grande échelle, dans l’aventure du paiement mobile, qu’il s’agisse d’acteurs innovants de l’Internet (Google, Paypal, Apple), d’opérateurs télécom (Buyster, Orange), de banques (Kwixo du Crédit Agricole, BNP Paribas…), ou de start-up innovantes (Skimm, Kiips…), avec l’espoir de développer un concept de référence et d’en massifier l’usage…
Des offres et des usages multiples
Premier constat : la diversité des offres disponibles sur le marché rend la définition du paiement mobile complexe pour le consommateur. On distingue notamment trois usages principaux : les paiements « à distance » (e/m-commerce), les paiements « de proximité » (devant une borne spécifique, chez le commerçant par exemple) et les transferts d’argent « de mobile à mobile » (entre amis notamment). Certaines offres proposent plusieurs de ces services, comme Kwixo, qui propose à la fois le paiement à distance et le paiement de mobile à mobile.
De surcroît, le moyen de paiement « sous-jacent » utilisé pour réaliser la transaction peut être différent d’une offre à l’autre : débit sur une carte bancaire, prélèvement direct sur compte bancaire, facturation via relevé d’opérateur mobile, ou encore, utilisation de comptes spécifiques pré-chargés (monnaie électronique).
Panorama des technologies utilisées
Là encore, les modèles sont variables, voire combinent plusieurs technologies complémentaires au sein d’une même offre. Voici un bref aperçu des différentes technologies.
Les principales technologies de paiement de proximité sont les suivantes :
- Le QR code[2] ou code barre 2D est un type de code barre en deux dimensions dont le contenu est décodé rapidement par un lecteur de code-barres (commerçants de proximité), un téléphone mobile ou encore une tablette. Le pré-requis est d’être équipé d’un appareil photo sur le terminal et d’une application de lecture de ce type de code. Le QR code permet de réaliser un paiement par « flash » du code, l’application lit l’identifiant qui débite ensuite les cartes bancaires ou les comptes associés.
- Les technologies NFC (Near Field Communication) et RFID (Radio Frequency Identification) sont aussi utilisées. La RFID est une technologie de communication sans contact par radiofréquences. Elle permet une détection automatique avec des distances de lecture supérieures à celles de la NFC. (Par exemple, les cartes de télépéage)
- Le « bump » permet à deux téléphones de transférer des informations en secouant des terminaux mobiles. Pour ce faire, les deux mobiles doivent être équipés de l’application et sensibles au mouvement (accéléromètre). Les deux personnes doivent valider l’échange de données avant qu’elles ne soient téléchargées sur le mobile.
Quant aux technologies de paiement à distance, elles sont le plus souvent véhiculées via des applications mobiles où l’ordre de paiement est envoyé à distance à un autre utilisateur ou un autre compte par l’intermédiaire d’une plateforme.
A titre d’exemple, Skimm combine une solution sans contact, le QR code et le paiement à distance par application mobile !
Quel avenir pour le paiement mobile ?
Ces dernières années, le paiement mobile a explosé dans certaines régions du monde. Ce fut le cas notamment en Afrique sub-saharienne (par exemple, M-pesa au Kenya) où des offres simples de transfert d’argent par mobile ont permis à une population faiblement bancarisée, mais à très fort taux d’équipement de téléphones portables, d’accéder à un service simple et à valeur ajoutée (ex : envoi d’argent par sms). De même, en Asie au début des années 2000 (Japon, Corée du Sud…), une bonne répartition des rôles entre les opérateurs télécoms et les acteurs de paiement mobile a permis de massifier l’usage du mobile dans les transactions de paiement. Le mobile est véritablement devenu un moyen de paiement à part entière (avec par exemple l’opérateur japonais, NTT DoCoMo). Ainsi, Juniper Research estime que l’Extrême Orient atteindrait 30% d’utilisateurs en 2015.
Dans l’hexagone, où l’offre est à ce jour peu lisible, le bilan est en revanche plus mitigé, malgré des campagnes marketing parfois coûteuses basées sur une volonté de créer le buzz… Longtemps restée à l’état de pilotes isolés, les initiatives ont mis du temps avant de voir le jour, ce qui a permis la multiplication des concepts chez des acteurs variés. Dans ce contexte, le succès du paiement mobile dépendra notamment de la capacité des acteurs à proposer des offres lisibles auprès des consommateurs, simples en termes d’utilisation, et interopérables entre-elles, afin d’éviter une trop grande fragmentation du marché, liée à l’adoption de solutions « propriétaires » et non compatibles entre-elles (et donc d’un utilisateur à l’autre).
A titre d’exemple, Starbucks propose en magasin un mode de paiement par application mobile utilisable uniquement dans son réseau d’enseignes. Cela permet à Starbucks de fidéliser sa clientèle mais limite fortement la généralisation de l’usage de ce moyen de paiement, avec le risque de multiplication des moyens de paiement propriétaires et la perte d’intérêt auprès des utilisateurs.
Par ailleurs, deux facteurs semblent prépondérants dans l’acceptation à grande échelle d’une offre de paiement mobile. D’une part, promouvoir l’aspect sécurisé auprès des particuliers. Et d’autre part instaurer des partenariats afin d’équiper facilement et à moindre coût les commerçants de technologies dédiées, à l’instar du récent partenariat entre PayPal et Ingenico pour l’équipement de la technologie PayPal sur les terminaux de paiement électronique.
La Commission européenne a lancé une consultation sur les paiements dans le cadre d’un livre vert[3]. L’objectif affiché par l’Europe est d’accroître la sécurité des paiements et leur transparence tout en stimulant l’innovation. La carte bancaire n’a véritablement détrôné le paiement par chèque qu’en 2003[4] , l’ancrage du paiement mobile dans les habitudes des consommateurs s’inscrit donc dans la durée, via la mise en place d’usages simplifiés et le développement du paiement sans contact de proximité. L’élargissement des offres de services sera donc progressif. Le paiement mobile sera simple et universel ou ne sera pas, du moins en 2012.
[1] Etude IFOP pour Wincor Nixdorf, « Baromètre du paiement électronique, vague 2 », janvier 2012.
[2] QR : Quick Response.
[3] Livre vert, « Vers un marché européen intégré des paiements par carte, par internet et par téléphone mobile », Commission Européenne, 11 janvier 2012.
[4] Source : Fédération des Banques Françaises.
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