Dans la catégorie des livres inadaptables, le SUR LA ROUTE de Jack Kerouac n’est sans doute pas le plus impossible, mais avait tous les défauts de l’adaptation. Livre dense, histoire ayant inspirée des générations, Walter Salles savait de quoi il en retournait lorsqu’il s’est emparé de la chose. Manque de chance, si son film a tous les atouts d’un film indépendant actuel (acteurs nouvelles générations, guests de luxe, lumière tamisée et sujet libéré), c’est aussi en passant à côté de son sujet.
Inspiration de la beat generation, SUR LA ROUTE peut se targuer d’avoir ouvert les portes (pas non plus tout seul, mais avec Neal Cassady, Allen Ginsberg et William Burroughs) d’une forme de liberté de la pensée, et laisser les graines de l’indépendance des nouvelles générations dans le traumatisme post-seconde guerre mondiale… Le film, lui, nous livre plutôt l’histoire des premiers hipsters, jeunes bobos new-yorkais désœuvrés qui, entre deux soirées, traversent les Etats-Unis de fond en comble pour mieux apprécier la vie. Voulant absolument couvrir toute l’histoire du film, Salles fait donc en sorte d’insérer le début, le milieu et la fin du livre, ce qui donne une histoire à vitesse grand V qui ne s’arrête pas sur les détails. Tout juste voit on le héros, Sal Paradise (alter aego de Kerouac), écrire dans son coin, ou Dean Moriarty avoir les larmes aux yeux lors des fins de soirées difficiles.
Difficile de trouver un réel défaut au film en soi, à la mise en scène diététique. Lumière du jour, caméra fluide, rien à redire sur Walter Salles qui fait le boulot. Malheureusement c’est aussi la première erreur du cinéaste de ne pas vouloir creuser plus dans l’histoire, ses péripéties de quelques jeunes illuminés dans l’Amérique des années 50. SUR LA ROUTE reste l’inspiration de beaucoup, son adaptation au cinéma n’arrive pas à créer la même alchimine. Heureusement, non?