Au pied de la montagne des singes se tenaient les singes rouges qui vivaient heureux ne demandant que leur juste chance dans la vie.
Il était prouvé depuis longtemps qu'un passage à la grande école ne garantissait en rien un travail dans le pays-village à tête de chien. Leur existence était un mystère pour les singes d'une autre génération et le resterait. Obsurcis par les nuages du sommet, les singes de la montagne ne consédéraient en rien les petits singes rouges auxquels ils ne pensaient jamais.
En fait c'est faux, ils y avaient pensé à ces petits singes ce jour de février là quand ils ont décidé de leur exiger des sous pour renflouer leurs investissements gaziers, nordiques, d'amphithéâtre Nordiques, d'Îlots ou tout simplement pour baigner dans la saisons des bonis.
Les singes rouges vivaient leur vie, innocents et relativement en marge, dans un pays-village qui ne demandait pas mieux que de les y garder. Ils regardaient de leur branche de petit arbre la litanie de violence et d'excès du monde des grands singes mais y étaient peu impliqués. Vivre en harmonie avec les vieux singes de la montagne était déjà suffisant, si il fallait en plus qu'ils fassent la gigue des excès...non, ils auraient un jour eux aussi, leur juste chance. Chacun sa branche.
Quand un troupeau de singe de la race des macaques est devenu maître de la montagne, les petits singes rouges n'en ont pas fait de cas. Les autres non plus d'ailleurs, ils avaient aidé à les rendre maitre de la montagne en quelque sorte et si les macques régnaient c'était en grande partie parce qu'on leur avait laissé le champs libre d'investir les lieux.
Mais 9 ans dans la chaise du pouvoir dans le pays-village à tête de chien avaient installé un lourd système de corruption dans le régime. Laissez faire, laissez faire, laissez faire jusqu'à ne plus être capable de cesser de faire. Il fallait bien que quelqu'un rembourse tous ses excès. Les petits singes rouges étaient innofensifs aux yeux des macaquess, peu en nombre, peu de poids politique ou économique, pourquoi ne pas les dégarnir un peu. Peu d'impact en perspective.
Là, était l'erreur des singes de la montagne.
Tentant de jouer de l'image publique les singes de la montagne ont réussi à faire tanguer celle-ci pendant un temps. Mais derrière les lunettes fumées de ses dirigeants, il n'y avait que de l'ombre, de l'ombre qui ne trompait pas les autres races de singe logeant au pied de la montagne. Les singes de la montagne, sans complètement s'en rendre compte devenaient eux même aveugles. Sourds aussi. Puis finalement muets.
Pas les singes du pays-village.
Pratiquant d'abord la colère, puis la résistance, (que les singes de la montagne ont tenté de déguiser sous toutes les formes de dénomination) ils ont finalement opté pour le bruit, pour la cacerolazo. La cacerolazo était une pratique qui avait été en partie initiée sous le régime de Salvador Allende au Chili quand des habitants étaient spontanément sortis dans les rues afin de frapper sur leurs casseroles pour signifier qu'ils avaient faim (en Algérie aussi semble-t-il). Quand les États-Unis ont assassiné Allende et installé Pinochet qui a aussitôt interdit les rassemblement de plus de 4 personnes, les chiliens se sont regroupés intelligemment par groupe de 4 et ont continué de taper sur leurs casseroles pour se plaindre.
C'était beaucoup de cela dont il s'agissait: de plaintes, de part et d'autres, chez toutes les races de singes.
Étais-ce la danse des morts ou la danse des vivants qui se dansaient au rythme des casseroles dans les rues?
Seul le temps pourrait le dire.
Il ne s'agissait plus uniquement des petits singes rouges. Il s'agissait d'une bonne partie de la race. Une vague de 70% de mécontentement qui se levait tranquillement.
Un important clivage, non sans ciccatrices visibles à court terme, se formant toutefois entre les singes des villes et ceux des régions. Entre les générations aussi.
Mais pour le moment, la fumée sortait de la tête de la montagne des singes.
Une montagne en forme de tête de singe.