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Fable de la vie quotidienne : Le Tatoué et l'Edenté

Publié le 27 mai 2012 par Philippejandrok

vous devez vous demander pourquoi ce blog est resté si longtemps inactif ? Il est vrai que ces dernier temps je n'ai guère eu l'occasion d'écrire, ni de rédiger des articles, trop occuper à faire le manoeuvre sur un chantier, j'ai été successivement, peintre en bâtiment, maçon, carreleur, poseur de pierre, parquettiste, plaquiste, plâtrier... décorateur, art designer et j'en passe...
Un chantier, c'est long, sale, poussiéreux, épuisant tant physiquement que nerveusement, mais c'est nécessaire pour la rénovation de son habitat, mais il ne suffit pas d'être volontaire, ni même doué, il faut savoir faire face aux imprévus, trouver des solutions, utiliser sa tête avant de développer sa force physique, et bien sûr développer également toute sa puissance car la matière est à dresser, à dominer, nous ne devons pas lui laisser le choix, nous devons lui imposer notre volonté, car cette matière est comme la nature, rebelle à se laisser modeler, rebelle l'ordre, à l'organisation, la matière est récalcitrante, elle n'en fait qu'à sa tête si on la laisse faire, il faut donc se battre en permanence avec elle, contre elle pour aller dans le sens qui nous convient, parfois, on croit la maitriser, mais il n'en n'est rien, elle est là, à vous narguer, à vous forcer à vous adapter, pour trouver le moyen de la dresser, enfin.
On apprend beaucoup sur un chantier, on apprend surtout l'humilité. Un électricien bienveillant me disait :
- vous serez fier d'avoir fait tout ça plus tard...
- Sincèrement, je n'en tire aucune fierté, lui répondis-je, la seule chose qui m'importe c'est de savoir que le travail est bien fait...
... car dans le monde ouvrier, on trouve le pire et le meilleur. Le meilleur, je l'ai trouvé chez mes électriciens et chez mon sanitaire, des hommes remarquables, avec une conscience professionnelle aboutie, doublée d'une bienveillance à notre égard proche de la protection, oui j'ai été et je reste surpris par cette bonté d'âme et cette efficacité, par contre j'ai été très déçu par un garçon que je connaissais depuis 20 ans, un "maître peintre", qui durant ce laps de temps ne cessa de se vanter de ses compétences "remarquables", de ce qu'il faisait lui par rapport aux autres, de ce qu'il savait faire mieux que les autres. Il m'a cependant appris le métier de peintre tapissier, un métier rigoureux, technique, qui nécessite une grande précision et une grande exigence : comme ce chantier était d'envergure, je lui ai proposé de venir m'aider, ce qu'il accepta, car je l'avais sorti d'un très mauvais pas tout récemment, au point qu'il en vint à m'appeler "mon frère", tellement il était heureux de mon aide spontanée et désintéressée ; "mon frère" ? La bonne blague, même si cela flatte l'ego, il ne faut jamais se laisser envouter par les douces paroles des enjoliveurs professionnels.
Durant ces vingt dernières années, j'ai souvent été là pour lui, il s'invitait à tout moment à ma table, pour passer le temps, parce qu'il était dans le quartier, pour faire sa psychanalyse gratuite, c'est tellement bien de vider son sac, de demander de l'aide et de profiter d'une bonne table.
C'est d'ailleurs incroyable cette propension des gens à s'inviter à manger chez les autres pour économiser sur leur budget et à s'imposer sur celui de leurs amis, c'est proprement phénoménale... et pourtant, si fréquent.
Mais, l'absence de scrupules est une des qualités premières du pique assiette professionnel, qui se trouve être un psycho-pompe qui profite comme un parasite de "ses" hôtes, car dans l'absolu, il n'a pas d'amis, il ignore ce que c'est, il n'a que des relations dont il profite à sa guise, or ce type de parasite gravite librement dans notre entourage et nous sommes systématiquement tolérants avec eux, car si nous croyons naïvement qu'il nous rendront un jour notre bonté, notre générosité, vous vous trompez, ils se moquent de nous et tirent sur la corde tant qu'elle ne casse pas, nul ne peut faire confiance aux paroles venimeuses de ces profiteurs qui mesurent chacune de leurs actions, chacun de leur comportement, chacun de leurs petits mensonges.
Cet "ami" avait la prétention de se prendre pour le prince du bâtiment, le Michel-Ange de la fibre de verre, il le claironnait sur tous les toits comme une girouette de clocher, à la longue, j'avais fini par le croire, or il ne faut jamais croire les fanfarons qui se mettent à la place des coqs sur un tas de fumier, ça reste toujours des fanfarons. Ainsi dans un échange de service que naïvement je croyais sincère, le parasite se rendit chez moi à 800 km de Strasbourg accompagné de son camarade, de son bon ami "le cas soss" comme il l'appelait, un soit disant peintre professionnel capable de tout et de son contraire qui le suivait comme son ombre. Ils sont arrivés comme des voleurs, la nuit tombée, faisant la tête alors qu'ils auraient du être heureux d'être avec nous, moi je les attendais comme le Messie, j'avais besoin d'aide, de soutien, le chantier était trop grand pour moi, peut-être m'attendais je trop à leur bienveillance.
Le lendemain de leur arrivée, je les ai amené sur le chantier, ils ont eu un moment d'arrêt et ont gardé le silence, soudain ils comprenaient qu'ils n'étaient pas venus en vacances et que le travail était d'ampleur, ils se sont regardés en disant qu'il n'avait pas prévu ce coup là. Ensuite, ils ont pris un jour pour se reposer, les pauvres étaient déjà fatigués avant même d'avoir commencé, ils ont dressé la nomenclature, le tableau, entre eux, sans m'en parler, comme un plan secret ourdi depuis le début. Le lendemain de leur arrivée donc, ils ont pris leur journée, et j'en profitais pour leur faire visiter la ville sous le soleil chaleureux de ce printemps précoce qui chassait péniblement l'hiver ; puis, visiblement atteint d'une "flémingite" aigüe, cette maladie qui touche les crétins arrogants, nous nous sommes installés sur une terrasse près d'un beffroi, et mon ami eut la prétention d'affirmer :
- Nous, quand on vient pour la première fois dans un café on se fait payer le coup pour l'honneur que l'on fait à ces gens d'être chez eux.
La table était mise, je savais désormais ce qu'il me restait à faire, payer le coup à ce chauve qui se prenait pour Bruce Willis et à son acolyte édenté qui se baladait en jogging addidas et en basquettes de supermarché, j'avais là une belle brochette de cas sociaux de la banlieue de strasbourg qui se prenaient avec arrogance pour des aristos de la capitale, ou comment les misérables croient encore au père Noël en le prenant pour un grand naïf.
L'attitude hautaine était choquante à plus d'un titre, d'autant que ce coup, j'avais l'intention de le leur offrir pour leur souhaiter la bienvenue, mais pourquoi cet "ami" avait il eu la prétention de m'imposer sa ridicule volonté en me forçant ainsi la main ? Déjà, il ourdissait, il mijotait un sale coup et j'étais l'objet de sa farce amère, moi, je ne voyais pas le mal, pas encore. D'autant que son attitude hautaine et prétentieuse dans cette région où la simplicité et l'honnêteté sont des vertus communes, faisait de lui et de son camarade, de parfaits imbéciles dès le départ et me mettait d'emblée très mal à l'aise, heureusement que le "qu'en dira t-on" me passe au-dessus de la tête.
Enfin, je ne mis guère de temps à comprendre à qui j'avais véritablement à faire, et en une semaine, ces deux feignants causèrent plus de dégâts que de réussite sur un chantier difficile, soit, mais pas insurmontable pour les "professionnels" qu'ils prétendaient être.
Ils sont arrivés conquérants, les je sais tout du bâtiment, se moquant ouvertement de mes idées pour régler les problèmes de chantier, et j'avais soudain à faire à deux crétins qui savaient tout et qui ne foutaient pas grand-chose, des ouvriers jaloux, peu scrupuleux, qui faisaient tout pour couler le navire au lieu de participer à la construction de l'arche, de mon arche, de mon refuge, du projet d'une vie.
M'ayant expressément demandé de déposer la fibre de verre du plafond des pièces et des murs, ils décidèrent par la suite que c'était désormais trop dur et qu'il fallait faire un faux plafond en placo-plâtre. Le "jogging", son camarade inséparable, décida de sa propre initiative de surbaisser le plafond à 2m46 alors que nous avions bien 293cm à l'origine et de magnifiques arrondis, je lui fis la remarque qu'il était désormais trop bas et que cela dénaturait une pièce à l'origine si belle, mais il m'affirma avec un aplomb digne des plus grands menteurs être à 260, menteur comme un arracheur de dents qu'il n'avait déjà plus, à présent la pièce n'avait plus l'air de rien, j'étais contrarié mais je faisais confiance aux hommes de l'art, moralité, il ne faut jamais faire confiance à des ouvriers véreux, ils ont toujours une idée tordue derrière la tête et passent leur temps à mentir pour ne pas se faire engueuler, ils sont menteurs comme ils sont lâches et traîtres comme des scorpions.
En conséquence, nous avons acheté du matériel qui n'était pas prévu au budget pour faire ce plafond et en le laissant faire par ce "professionnel" du bâtiment qui se croyait très capable, celui-ci s'avéra être un minable bricoleur et un criminel. Ainsi, après avoir posé les rails il mit trois jours pour suspendre quelques panneaux avec le chauve et lorsque je pris la relève, je m'aperçût que les suspentes fixées au plafond étaient insuffisantes pour maintenir les plaques car les panneaux se détachaient, je le lui fis remarquer, mais non pour lui il n'y avait pas de problème, pourtant j'insistais sur le fait que c'était une chambre à coucher et que je n'avais aucune intention de mettre les gens en danger par une installation bancale qui risquait de s'écrouler sous l'explosion du mur du son, car ces explosions vibratoires développent une force impressionnante :
- Mais non, me répondit il, pas de risque.
- "Pas de risque" ? Tu parles, le plafond tenait par l'opération du Saint esprit et il s'en fallait de peu qu'il ne s'écroule. Je lui intimais l'ordre de se préoccuper du plus pressant et de ne plus perdre son temps avec ce plafond qui n'était pas prévu à l'origine. Plus tard, des professionnels, des vrais, virent ce travail inachevé et me firent part de leurs impressions sincères, la conclusion était sans appel, tout était à refaire et les plaques à descendre avant la catastrophe inéluctable. Cela m'apprendra à faire confiance à des "salopards", il n' a pas d'autre mot qui me vient à l'esprit à cet instant.
Alors que nous posions la pierre dans la cuisine "le jogging édenté" allait poser une pierre mal taillée, je l'en empêchais en lui proposant d'aller en tailler une autre, mais le chauve tatoué à l'Égyptienne sur le dos et les bras, qui passait son temps à faire des pauses en fumant des "clopes" et en buvant café sur café, lui dit :
- Mais pose le qu'est-ce que tu en as à foutre, c'est pas ton carreau...
- Ah bravo, belle mentalité! répondis-je.
Il en fut à peine gêné ; cette remarque illustra leur brève passage sur mon chantier, or je ne pouvais me résoudre à pareille attitude, car lorsque l'on fait un travail on le fait jusqu'au bout, et bien, c'est une question d'honneur, de respect de soi-même, mais ces gens là n'avaient pas une once d'honneur, des crapules de la pire espèce, capables d'arnaquer un ami de 20 ans et de me mettre en péril, moi et les miens par des installations bancales.
Pour les loger, je leur avais trouvé un gite bien mieux que le notre, ils trouvèrent le moyen de briser une porte, celle des toilettes sous prétexte que le chauve était resté coincé à l'intérieur. Comme des voyous ils cachèrent les dégâts, en me faisant croire qu'ils n'avaient pu contacter le logeur qui vivait dans une maison, face de la leur, le mensonge était pour eux une seconde nature.
Dans un autre registre, le chauve avait eu le culot de me dire :
- "t'inquiète pas s'il faut rester jusqu'à 22h30 on restera"
Or, il aurait été souhaitable qu'ils aient pu rester jusqu'à ces heures indues, comme je le faisais au quotidien, mais, les promesses d'un ami sont déjà difficiles à tenir, ajoutées à celles d'un ouvrier roi des menteurs, il ne fallait donc pas attendre beaucoup de ces promesses, de ces paroles vides de sens, car le chauve prometteur appliqua le respect stricte des heures syndicales alors que je n'étais pas une entreprise, il me rendait service, je n'imposais rien, j'attendais qu'il m'aide, comme je l'avais aidé, mais il n'en fut guère capable.
Dès le début des travaux, il imposa une tension, une colère, une ambiance épouvantable, il insuffla le mal, je lui demandais s'il avait un problème, s'il désirait en parler, non, tout allait bien, il n'y avait pas de problème, pourtant, le problème était bien présent, car cet homme n'était jamais content, il faisait une tête qui trainait jusqu'à ses pieds dès qu'il pointait le bout de son nez, il faisait d'interminables pauses, prétendait être sur le chantier avant tout le monde ce qui n'était jamais le cas, moi j'étais sur place avant eux et je restais longtemps après eux, en fait, ils étaient venus passer des vacances à mes frais, et c'est exactement ce qu'ils firent, pas grand-chose ; ils se permirent également de critiquer les ouvriers du cru en prétendant être bien meilleurs que les autres mais ces deux catastrophes à l'esprit malveillant, étaient nuls, incapables, bon à rien, mauvais à tout et surtout, haineux et ils l'étaient par simple volonté personnelle.
Ainsi, comment expliquer qu'un ami de 20 ans avec lequel j'avais été le meilleur des amis pu devenir aussi abjecte, aussi insupportable, aussi pourri qu'il le fut ?
Quelques semaines plus tôt, il était venu me trouver la queue entre les jambes pour m'expliquer les problèmes qu'il rencontrait, il ne pouvait payer l'avocat qui s'occupait de son divorce et était prêt à faire un mauvais coup comme celui qu'il avait fait à la Meinau (quartier chaud de Strasbourg) en tant que garde du corps d'un dealer, une soirée, Mille euro et un calibre dans la poche. Moi, naïf, je tentais de le protéger de lui même en lui prêtant la somme nécessaire, et en la prélevant sur mon budget chantier, en échange de quoi il s'engageait à venir m'aider. Mais les voyous ont la mémoire courte, il s'imposa malgré tout à venir me voir, mais pas pour travailler il s'attendait à ce que je lui donne encore de l'argent pour ses beaux yeux, croyait-il que l'argent se trouvait sous le sabot d'un cheval ? Il devait imaginer que sa seule présence suffisait à ouvrir un tiroir caisse d'où l'or coulait à flot, j'aurais bien aimé posséder la clef d'un tel tiroir imaginaire, s'il existait.
Comme les gens peuvent être naïfs, croire qu'un ami était disposé à sortir son carnet de chèque en lui donnant carte blanche, il devait être profondément imbu de lui-même ou parfaitement crétin, et je crois rétrospectivement qu'il était bien les deux.
Quoiqu'il en soit, j'ai perdu 1000 euros avec cet individu mais j'ai gagné une liberté qui n'a pas de prix ; je me suis débarrassé d'un pique assiette et d'un parasite de la société. Dans l'absolu, c'est moi qui ai fait une bonne affaire, lui, il a perdu un de ses meilleurs amis, une bonne table, une écoute et un soutien, à jamais. Je ne regrette donc pas de m'être débarrassé d'un tel individu qui se prétendait mon "frère", au contraire, car il ne l'a jamais été, tout comme il n'a jamais été un ami, c'était une ordure dès le début, même s'il s'était racheté une conduite pour rentrer dans le rang, mais l'ordre, le respect des convenances ce n'était vraiment pas sa tasse de thé, sa longue descente aux enfers commençait et je n'étais qu'une étape sur cette route semée de tristesse et de déception, à présent, il était perdu et allait joyeusement retrouver le chemin du crime, usé par le travail, par la vie, il savait que bientôt il perdrait son emploi et qu'il n'en retrouverait pas un autre dans les mêmes conditions, il sera contraint d'accepter les conditions des employés français, lui qui travaillait en Allemagne, à moitié moins de salaire pour le même travail, et à son âge, malgré son expérience, jamais il ne retombera sur ses pieds, que lui restait-il à présent ?
Les chemins courbes et l'argent facile quitte à risquer la prison, enfin, c'était un malin et dans son milieux il pouvait aisément manipuler les crétins, il manipulait déjà son "cas soss", mais jusqu'à quel niveau et surtout jusqu'à quand ?
Même les patrons du milieux cherchent à raccrocher les gants un jour ou l'autre à un âge où lui, désirait faire carrière ?
Il était assez pourri pour y parvenir, mais enfin je n'avais plus à me soucier de ce chauve tatoué qui se prenait pour le dieu d'Egypte qu'il était loin d'être.
Nous vivons une époque formidable...


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