Aujourd’hui intéressons-nous à un vieux titre qui fait peau neuve : Wingman, la première série à succès de Masakazu Katsura diffusé en 1989 dans le Club Dorothée.
Après une diffusion censurée de l’anime à l’époque et une sortie partielle du manga par Manga Player en 1998 (avec des couvertures d’une rare laideur), le fidèle éditeur français de l’auteur, Tonkam, reprend le flambeau. Il propose depuis la fin avril de suivre les aventures du jeune Kenta, un fan de sentaï devenu un super-héros, qui part à la rescousse d’un monde opprimé !
Action, romance et super héros au programme de ce titre paru il y a une trentaine d’années dans le Weekly Shonen Jump et qui conserve une grande partie de son charme dans cette nouvelle édition Deluxe !
En route pour la critique… Bonne lecture
Traaaaaansformatiooooon !
Kenta Hirono est un lycéen comme les autres…Ou presque. Passionné par les super-héros et ardent défenseur des forces du bien, l’adolescent passe son temps à jouer au justicier. Enfilant son costume de Wingman, notre héros autoproclamé chasse le crime dans les salles de classe et y met un sacré bazar, ce qui ravit ses camarades et énerve au plus haut point ses enseignants comme madame Matsuoka, son professeur principal qui est bien décidée à le remettre sur le chemin des études !
Mais Kenta est têtu et il prend sa destinée de sauveur de l’humanité très au sérieux. Cela dit… Il n’a pas totalement tort. Il y a bien un monde à sauver : celui d’Aoi, habitante du monde de Powdream, qui vient littéralement de lui tomber dessus. Cette jeune demoiselle légèrement vêtue s’est enfuie de son monde pour échapper au dictateur Rimel, qui vient de prendre le pouvoir par un coup d’état.
Mais Aoi ne s’est pas échappée les mains vides : elle a en sa possession le cahier des rêves, qui permet de rendre réel tout ce qui y est inscrit. Rimel veut ce cahier et il est prêt à tout. Pour protéger Aoi et ce trésor, Kenta s’empresse d’y dessiner son costume de Wingman. Mais être un super-héros est plus difficile qu’on ne le pense et quand les sentiments s’en mêlent, tout se complique…
J’aurais voulu être… un sentaiiiiii ♫
Publié pour la première fois en 1983 dans le célèbre Weekly Shonen Jump de la Shueisha, Wingman nous présente donc un jeune adolescent fan des héros nippons de l’époque : les sentais, que nous avons-nous aussi connu dans les années 80 avec San Ku Kai, X-Or et d’autres.
Ces hommes solitaires œuvrent pour le bien dans leur costume excentrique fait de tissu ou de métal mais surtout de milles et un gadget. Ils poursuivent une lutte manichéenne et sans relâche contre un être despotique, cruel et machiavélique qui n’a pour but que d’envahir ou de détruire tout ce qui lui tombe sous la main. Un méchant quoi, comme l’ont célébrement parodié les Inconnus ou encore France Five.
Voilà donc ce qui fait rêver notre jeune Kenta. Mais à défaut d’ennemi ou même de pouvoirs d’envergure, l’adolescent pourchasse les mauvais élèves… Jusqu’au jour où ! L’arrivée de Aoi transforme ses rêves en réalité : un monde est à sauver des forces du mal et devient le guerrier qu’il a toujours voulu être en dessinant sur un simple cahier. Simplissime mais efficace : les possibilités sont infinies !
Le scénario est donc fixé en deux temps trois mouvements et une fois qu’il a accepté la facilité du synopsis, le lecteur peut se prendre au jeu et imaginer ce qu’il ferait lui-même de ce cahier… Après tout, depuis que les héros de Marvel ont débarqué en force dans nos cinémas et excepté le monde parallèle, on peut facilement retrouver du Kick-Ass ou du Peter Parker dans notre lycéen nippon des années 80.
Un classique qui vieillit bien…
Enfin la pilule passe d’autant mieux que Wingman / Kenta, en fan absolu de ses modèles, se jette à corps perdu dans ce nouveau destin. Il associe un héroïsme aveugle à une volonté inébranlable et ce cocktail suscite autant le respect que l’amusement… Le justicier soigne autant son costume que ses entrées, réfléchit à ses poses de victoires autant qu’au look de ses attaques et adore faire dans le théâtral. Le ridicule ne tue pas et, mieux, distrait le lecteur qui comprend dès le départ que tout ceci n’est pas à prendre au sérieux.
Néanmoins, la compassion n’est jamais loin et notre sauveur en collants gagne notre sympathie lorsqu’il décide, malgré son impuissance et ses faiblesses humaines, de continuer le combat. Nous sommes bien dans un shônen et c’est avec une certaine nostalgie qu’on en retrouve de nombreux codes comme le dépassement de soi, les ennemis de plus en plus forts, la progression du héros, le caractère manichéen des protagonistes… Même topo pour la narration par épisode qui reprend la formule bien connue : une situation – un ennemi-un combat-une morale.
Ces ficelles sont aujourd’hui dépassées mais l’étiquette « shônen comme au bon vieux temps » semble briller sur la couverture de Wingman et à travers son graphisme d’époque, ce qui lui permet d’arborer ses trois décennies sans rougir.
Les débuts d’un certain M.Katsura…
Ces 30 ans sont aussi 30 ans de carrière pour un certain Masakazu Katsura. Ce mangaka est aujourd’hui l’un des plus célèbres et emblématiques publiés dans l’hexagone aux cotés de Toriyama, Hôjo et Inoue, pour des raisons qui dépassent largement Wingman et son adaptation télévisée. Katsura signa le début des éditions Tonkam avec Video Girl Aï, qui posa les jalons du shôjo lycéen en France, voir les débuts du shôjo en France tout court (avec Sailor Moon chez Glénat ).
Après de nombreuses séries sur les relations amoureuses, le mangaka est depuis revenu à ses premiers amours, les supers héros, et publie depuis quelques années un titre beaucoup plus noir mais très analogue, et qui connait lui aussi de nombreux fans : Zetman.
En plus de l’apprécier pour les qualités expliquées ci-dessus, tous les amateurs des œuvres de Katsura pourront déceler dans Wingman des embryons de son style. Il y excelle déjà dans le triangle amoureux, s’adonne pour la première fois au mythe du super-héros, contre-plonge régulièrement sur des petites culottes qu’il dessine déjà à sa façon.
Cette première histoire est aussi l’occasion de découvrir des protagonistes précurseurs dans la mangagraphie de l’auteur : même si son chara-design a énormément évolué – quasiment autant que le trait de Tsukasa Hôjo de Cat’s Eyes à Angel Heart - on peut retrouver du Yota, Ai ou Moémi de Video Girl Ai ou encore du Koga de Zetman dans les personnages de Wingman. Seul le coté obscur Batmanien qui ne se dévoile chez l’auteur que plus tardivement, manque à l’appel. Encore que, en fouillant bien, on finit par se rendre compte que le manichéisme des premiers volumes s’effrite sur la fin de la série.
Cette réédition de Wingman vient donc compléter à merveille l’ensemble des œuvres de Masakazu Katsura. Dans une édition deluxe composée de 7 volumes de belles factures, on y redécouvre avec une agréable nostalgie une histoire de super-héros qui a bien vieilli, sans doute parce qu’elle ne se prend jamais trop au sérieux. Classique voir culte pour une génération d’anime fan ou de Katsura-addicts, Wingman peut même prétendre à un public plus large et constitue une très bonne porte d’entrée pour tout les curieux qui s’intéressent aux shônens des années 80 !
Titre : Yume Senshi Wingman
Auteurs : Masakazu KATSURA
Date de parution : 25 avril 2012
Éditeurs fr/jp : Tonkam / Shueisha
Nombre de pages : 336 pages
Format : 12,7 * 18,2
Prix de vente : 10.95 €
Nombre de volumes fr / jp : 1 / 7
WINGMAN © 1983 by Masakazu Katsura/SHUEISHA Inc.
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