Le quinquennat de Nicolas Sarkozy restera emblématique d’une politique française en Afrique décomplexée et arrogante. Au jour de l’investiture de François Hollande, alors que se multiplient les réactions à l’hommage scandaleux au colonialiste Jules Ferry, on est en droit de se demander ce qu’il adviendra de la promesse socialiste de « mettre fin à la Françafrique ». Déclarant vouloir « mettre fin à la Françafrique », François Hollande a répété tout au long de sa campagne que le « changement » concernera aussi les relations franco-africaines, répondant au souhait d’une partie importante des citoyens, y compris des militants socialistes, souhaitant se démarquer des frasques passées. Sous la présidence de Mitterrand, puis sous le gouvernement de Lionel Jospin (dans un contexte de cohabitation), des responsables socialistes ont en effet largement contribué à maintenir la mainmise de la France sur ses anciennes colonies, sans rien changer d’autre dans le système criminel de la Françafrique que ses principaux bénéficiaires. François Mitterrand, malgré le discours de façade prononcé à La Baule en 1990, avait conservé ce système, le poussant même à son paroxysme en entraînant l’État français dans une complicité toujours inavouée, celle du génocide des Tutsi au Rwanda. Au sein du PS, si la volonté de tourner la page est affirmée, plusieurs personnalités sont encore liées à des réseaux de la Françafrique et la campagne électorale a vu plusieurs responsables de ce partis’afficher ostensiblement avec des dictateurs africains. La lignée des annonces de rupture avec la Françafrique se divise jusqu’ici en deux ensembles : celui des responsabilités politiques écourtées et celui des promesses éphémères. Souhaitant que cette étrange « malédiction » cesse enfin, l’association Survie se montrera particulièrement attentive aux premiers gestes de François Hollande et aux premières mesures de son gouvernement.
- Au-delà de la suppression de la cellule Afrique de l’Élysée promise par François Hollande, quel renforcement des pouvoirs du parlement en matière de politique extérieure ?
- Quelle position sur les visites officielles de dictateurs et la validation des simulacres électoraux, et plus largement quelles relations diplomatiques vis-à-vis des régimes dictatoriauxquand en pleine campagne électorale divers collaborateurs de François Hollande se sont affichés aux côtés de dirigeants illégitimes : Ségolène Royal auprès de Blaise Compaoré en novembre 2011, Laurent Fabius auprès d’Ali Bongo au Gabon en février 2012, ou encore Jean-Louis Bianco auprès d’Alassane Ouattara en avril 2012 ?
- Quelle remise en cause de la présence militaire et des opérations extérieures en Afrique, alors que le PS a soutenu les deux interventions françaises de 2011 en Côte d’Ivoire et en Libye ?
- Quelle position concernant la levée du secret défense sur les archives liées à l’implication des plus hautes autorités de l’Etat dans plus d’un demi-siècle de crimes néocoloniaux, élément clef pour lutter contre l’impunité, alors que les gouvernements socialistes ou de la gauche plurielle couvrirent ainsi les complicités françaises dans l’assassinat de Thomas Sankara, le génocide des Tutsi au Rwanda et l’élimination du Juge Borrel ?
- Quelles actions pour passer d’une aide au développement dévoyée et corruptrice à une logique de redistribution des richesses et d’accès de tous et toutes aux biens publics ?
- Quelle position sur le Franc CFA, quand Michel Rocard avait été le premier promoteur de la dévaluation du Franc CFA, finalement imposée par le gouvernement d’Édouard Balladur en 1994 ?
- Quelle position sur les agissements d’entreprises françaises à capitaux publics, comme Areva qui dévaste le nord Niger ?
- Quelle volonté réelle de « décoloniser les esprits », quand le Président nouvellement élu choisit de célébrer Jules Ferry, héraut de la colonisation et du racisme d’État ?
- la fin du ‘domaine réservé’ du Président de la République en matière de politique étrangère ;
- l’arrêt du soutien politique et diplomatique aux dictateurs – en refusant notamment de les recevoir à l’Élysée, de leur rendre visite et de reconnaître leur « victoire » lors des simulacres d’élections ;
- la fermeture des bases militaires et la fin des opérations extérieures en Afrique qui ne sont pas placées sous mandat, commandement et uniforme de l’ONU ;
- le lancement d’un processus de transfert de souveraineté monétaire aux États de la zone CFA, de retrait de la France des institutions du Franc CFA et de restitution des réserves de change ;
- la levée du secret défense sur les archives concernant les crimes françafricains, afin d’aider enfin la justice à faire son travail, notamment sur les questions ayant trait à l’implication de la France dans le génocide des Tutsi au Rwanda.