On continue de faire un rapide topo, comme toutes les quinzaines environ, sur chaque année par ordre décroissant. Cette fois-ci : 2005, année remplie de belles révélations. Les américains de Clap Your Hands Say Yeah, tout d'abord, et leur douce folie, malheureusement nettement plus emballante sur disque que sur scène. L'inverse ou presque des Spinto Band, dont le disque excellent aussi, lasse un poil plus. Leurs prestations scéniques sont, par contre, de celles qu'on n'oublie pas. Et puis, les anglais nous auront sortis plein de petits frères de Franz Ferdinand, formations éphémères qui ne vaudront sans doute pas plus que leur premier album : influences Gang Of Four pour Bloc Party et The Rakes ou style plus proche de The Fall pour Art Brut. Côté américain, deux songwriters aux vélléités diamétralement opposées. D'un côté, Sufjan Stevens, petit génie de la pop, aux mélodies finement ciselées et à l'ambition démesurée. Il abandonnera pourtant assez rapidement son projet fou de faire un disque par état américain. Le gargantuesque "Illinoise" impressionne tout d'abord avant de paraître parfois indigeste. Un avant goût de la suite ? De l'autre côté, le trublion Adam Green qui se moque pas mal de son petit talent en bâclant faussement ses petites sucreries de crooner de supérette. Bizarrement, on en redemande. Enfin, dans ce top 10, on retrouve aussi un brillant songwriter folk adepte du violon en la personne d'Andrew Bird, ce qui n'est pas si courant, l'un des groupes américains les plus essentiels de l'époque, The National, impeccable en studio comme en concert, et enfin le collectif canadien Broken Social Scene à l'écriture inspirée qui brasse tous les spectres du rock indépendant. Déception côté français : rien de franchement mémorable à me mettre entre les oreilles.
10 - Andrew Bird - The Mysterious Production of Eggs
Petit oiseau devient grand avec cette "mystérieuse production d'oeufs" tous plus beaux les uns que les autres. Le songwriter américain Andrew Bird s'impose avec ce deuxième disque au charme évident.
9 - Art Brut - Bang Bang Rock'n'Roll
Un curieux groupe anglais décide de chanter The Fall avec un nez rouge et un chapeau pointu. Cette pantalonnade pourrait sembler de mauvais goût mais force est de reconnaître que leur rock qui a l'avantage de pouvoir être pris au premier comme au second degré fait du bien par où ça passe. Et puis un chanteur qui proclame qu'il veut être l'homme "who writes the song that makes Israel and Palestine get along" ne peut pas être foncièrement mauvais, non ?
8 - The Rakes - Capture / Release
Encore
des anglais inspirés par le post-punk de la fin des années 70, en tête
desquels Gang Of Four, le fond politique en moins, l'humour en plus.
L'humour, c'est d'ailleurs ce qui fait avec les mélodies bien sûr (le
titre "Open Book" sera rendu célèbre par une publicité),
l'attrait principal de The Rakes. Aux dernières nouvelles, le groupe
serait déjà séparé après seulement trois albums. Jamais il n'a réussi à
reproduire ce premier coup de maître.
7 - Adam Green - Gemstones
Sa nonchalance revendiquée et son humour décalé (mention spéciale à "Choke on a Cock" au titre éminemment explicite) pourraient presque paraître comme de l'arrogance. Il n'en est rien, Adam Green est le crooner le plus cool de l'histoire. Pas un grain de bile et pas mal d'inspiration, comme quoi les apparences sont parfois trompeuses.
6 - Bloc Party - Silent Alarm
Buzz britannique de l'année savamment orchestré par le NME, après Franz Ferdinand et avant les Arctic Monkeys. Le problème, c'est que bien souvent le succès critique est justifié. Ce "Silent Alarm" demeure quelques années après un très efficace condensé de rock tendu inspiré par la new-wave, de Police aux Cure en passant par Joy Division.
5 - Sufjan Stevens - Illinoise
Sufjan Stevens signe sa grande oeuvre pop sur l'état américain de l'Illinois. Malheureusement, si l'ensemble est de très haute tenue, je ne peux m'empêcher de penser que le mégalomaniaque songwriter aurait dû faire une coupe franche et n'en garder que la moitié. Cela aurait déclenché l'envie d'y revenir plus souvent.
4 - The Spinto Band - Nice And Nicely Done
Une modeste bande de potes sort une jolie boîte à joujoux pop incroyablement addictifs. En concert, leur musique prend encore plus d'ampleur. Elle dégage un évident capital sympathie et provoque d'irrésistibles envies de dodeliner de la tête. Délicieusement régressif.
3 - Broken Social Scene - Broken Social Scene
Meilleur groupe de la nouvelle scène rock venue du Canada avec Arcade Fire, Broken Social Scene est un collectif aux multiples ramifications, de Feist (ancienne petite amie du leader Kevin Drew), Stars à Metric. On retrouve cette pluralité d'influences dans cet album éponyme, leur troisième, encore plus long en bouche que le précédent, le déjà excellent "You Forgot It In People".
2 - The National - Alligator
The National est aux années 2000, ce que les Pixies, Sonic Youth ou REM sont aux décennies précédentes, l'un des groupes marquants de son époque. "Alligator" est incontestablement leur chef d'oeuvre, alternant intelligemment les tempos pour livrer quelques titres bien furieux tels "Abel" ou "Mr November".
1 - Clap Your Hands Say Yeah - Clap Your Hands Say Yeah
On pense aux Talking Heads, à Arcade Fire, en plus braillard, plus sale, plus modeste. Les Clap Your Hands Say Yeah ne visent pas les premières places dans le panthéon du rock et c'est justement ce qui les rend d'autant plus attachants. Indispensable.