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Quand les citoyens se passent d’Etat

Publié le 25 mai 2012 par H16

« Si l’Etat n’était pas là, il faudrait l’inventer » répètent ses thuriféraires à qui mieux mieux pour en justifier autant l’existence que les ponctions fiscales afférentes. La réalité, bien sûr, est qu’à chaque fois qu’il le peut, le citoyen a tout intérêt à se passer d’État, et ce ne sont pas les habitants de Kauai qui diront le contraire…

L’histoire est relatée en anglais par CNN et se déroule dans le parc national de Polihale, qui a été fermé en décembre dernier suite à des inondations. Ces inondations ont entraîné des dommages assez importants sur la route d’accès au parc, estimés à 4 millions de dollars.

Comme par hasard, l’agence en charge de la gestion des ressources naturelles et du parc ne dispose pas de cette somme, et les assurances ne semblent pas couvrir ce genre de dégâts. Avec un tel montant, le parc n’aurait pas pu ouvrir cet été, et les meilleures estimations portaient à deux ans le temps nécessaire à la réfection des infrastructures endommagées.

De façon parfaitement logique, tant que les réparations ne sont pas faites, les commerces attenants ne peuvent fonctionner et sur une aussi longue période doivent s’attendre à fermer purement et simplement, notamment ceux dont les revenus dépendent totalement de l’ouverture du parc pour fonctionner.

Grue à KauaiDevant ce constat et la probable perte de leur affaire, les résidents et personnes directement concernées par la bonne réfection de la route ont abandonné rapidement l’idée de faire faire par l’État ce qu’ils pouvaient faire eux-mêmes. S’associant rapidement les uns avec les autres, ils ont donc loué les machines et utilisé leurs bras pour remettre les infrastructures en bon état.
Ce qui devait finalement prendre plusieurs mois et des millions de dollars s’est étalé sur huit jours. Comme l’explique Troy Martin, qui a prêté les machines et donné l’acier nécessaire aux réparations :

« Nous n’aurions pas dû avoir besoin de faire ceci, mais lorsque toute cette affaire atteint le niveau de l’État, cela devient si bureaucratique que quelque chose qui nous a pris 8 jours leur aurait pris des années. Nous nous sommes donc rassemblés, la communauté, et nous l’avons fait nous-mêmes. »

Finalement, on en arrive à la conclusion que ceux qui sont les principaux bénéficiaires de la route sont aussi ceux qui l’ont remise en état, et ce plus vite et pour un prix inférieur à l’entité plus ou moins abstraite qui en est normalement responsable… Cette remarque peut facilement s’étendre à d’autres routes, d’autres domaines et d’autres communautés, mais le constat est globalement le même : l’État n’est pas le garant que ce qui doit être fait le sera, qu’il le sera dans un temps raisonnable, et qu’il le sera pour un coût normal.

En période de crise, les individus et les communautés seront de plus en plus confrontés à ce genre de décision et devront régulièrement agir pour faire par eux-mêmes ce qu’avant l’Etat entreprenait, avec les lourdeurs et les débordements budgétaires inhérents à sa nature : l’État, en définitive, dépense pour d’autres que lui de l’argent qui ne lui appartient pas, sa motivation pour en faire un aussi bon usage que possible ne tient donc qu’à l’implication fort variable des gens qui l’animent. Or, lorsque la situation se tend et que les budgets se font plus critiques, chacun est tenté de tirer la couverture à lui : on peut donc parier que la dépense sera mal calibrée, mal gérée, et mal planifiée.

Cette petite aventure dans une communauté américaine montre à merveille que la plaie bureaucratique est partout la même, et que partout, la solution n’est pas dans une vaine optimisation de cette bureaucratie, une espèce de raffinement ultime qui permettrait d’avoir un état utopique, efficace et bon, mais qu’elle repose avant tout sur les volontés individuelles des personnes directement concernées par le problème.

Dans quelques semaines, quelques mois tout au plus, l’État français, comme d’autres avant lui, sera aux abois. Chaque Français pourra alors faire le choix de s’entêter, rester le cul vissé sur une chaise et attendre que la République et ses commis lui viennent en aide. Chaque Français pourra réclamer (à bon droit, d’ailleurs, vu les colossales ponctions qu’il aura dû subir) que ce soit l’État qui nettoie le merdier dans lequel le pays se trouvera. Et on peut le parier, la majorité des Français fera exactement ce choix-là.

Mais ceux qui s’en sortiront seront ceux qui auront la présence d’esprit de chercher d’abord en eux-mêmes et autour d’eux les bonnes volontés individuelles, ceux qui ne se reposeront en rien sur l’organisme étatique, cancéreux en phase terminale.

Ils ne seront pas nombreux. Pire : attendez-vous à ce que ceux-là soient rapidement jalousés.



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