Il m’était temps de donner une brève explication du célèbre et spectaculaire geyser provoqué par l’introduction d’un bonbon Mentos dans une bouteille de Coca :
Le geyser peut atteindre un mètre.
Le phénomène se produit également, dans une moindre mesure, avec toutes les boissons gazeuses : il s’agit simplement d’un relargage entre le sucre et le CO2, c’est-à-dire que le sucre prend la place du CO2 dissous qui, lui, passe en phase gazeuse provoquant des bulles. D’autre part, la gomme arabique contenue dans le Menthos réduit la tension superficielle du soda (voir danger dans le micro-ondes), permettant au CO2 de s’échapper plus facilement.
On le sait fort bien : il ne faut pas agiter une boisson gazeuse avant ouverture, auquel cas elle mousse : le CO2 s’échappe de la phase aqueuse dans lequel il reposait bien gentiment…. D’ailleurs, à chaque ouverture, même sans secouer, cela fait “pschitt” : il y a beaucoup de gaz à l’intérieur !
Enfin, les aspérités du Menthos permettent la nucléation de la phase gazeuse. Le CO2, dissous sous forme d’acide carbonique (H2CO3) profite des irrégularités de la surface du Menthos pour se transformer en gaz : les pores et fissures du bonbon sont en effet des microterritoires dépourvus d’eau (elle ne pénètre pas directement à l’intérieur), ce qui permet à l’acide carbonique de s’y loger et lui offre un cocon pour se transformer en CO2. Et le CO2 qui s’échappe d’une boisson gazeuse l’est avec la même pression que le liquide jaillissant d’une bouteille de champagne sacrifiée un jour de fête…
C’est la même chose que sur le podium ! En fait, la boisson est dans un équilibre dit métastable : son apparente stabilité ne tient qu’à un fil ; le gaz dissous, formant des bulles, ne demande qu’à jaillir à la moindre agitation…
Le Menthos a le même effet que l’agitation, et sa rugosité est primordiale : trop lisse ou imprégné d’eau (parce que déjà sucé), il ne se passe rien !
Côté relargage, le geyser est plus beau avec du Coca light, ou sans sucre ; côté nucléation le fait de sucer un bonbon comble les aspérités en dissolvant le sucre, notamment, mais aussi en le faisant rouler sur la langue.
Le phénomène de nucléation, ou germination relève à l’origine de la cristallographie : en certains endroits privilégiés, les cristaux se déposent (1, puis 2, puis 3…), et s’agrègent rapidement. Par la suite, le terme devint plus vaste : il désigne la formation d’un certain germe, par exemple au sein du Coca les rugosités du Menthos sont le siège d’un changement d’état (passage de l’acide carbonique en solution au CO2 gazeux). En chimie, cela explique l’ajout de pierre ponce lorsqu’on porte un mélange à ébullition (en particulier lors d’une hydrodistillation) : cela permet à l’ébullition de démarrer effectivement, en évitant la surchauffe et l’explosion par métastabilité (voir danger dans le micro-ondes consacré à la surfusion) : il faut créer des sites de nucléation de la vapeur.
Aussi il ne faut pas mettre un soda au congélateur, au risque qu’il explose ! La solubilité du CO2 décroît en effet avec la température : l’acide carbonique a tendance à passer sous forme gazeuse, et boom, car la bouteille n’est pas assez extensible !
Il ne s’agit pas d’un produit de solubilité à proprement parler (puisqu’il n’est pas questions d’ions), mais bel et bien de la constante d’équilibre associée à la réaction :
CO2 (aq) + H2O(l)
La constante d’équilibre, pouvant bien sûr être exprimée en fonction de la pression en CO2 vaut 1,70×10-3 à 25 °C et diminue lorsque la température fait de même : à mesure que la température baisse, la réaction est déplacée dans le sens indirect : il se forme davantage de CO2. Puisqu’un abaissement de la température favorise la production de CO2 (et d’eau), donc défavorise la production de H2CO3 (c’est bien le sens direct qui nous intéresse, puisque c’est celui correspondant à la constante d’équilibre), alors une augmentation de la température favorise la production de H2CO3 : on en déduit, via le principe de Le Châtelier que cette réaction est endothermique, tendant à modérer la variation de température induite.
L’acide carbonique n’est que modérément stable et il se décompose facilement en H2O et CO2 (le même phénomène se produit en nous dans le cadre de l’équilibre acido-basique, tamponné par le bicarbonate, voir cet article).
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