Les trente-six premières heures. En Colombie. Bogota. Et deux...

Publié le 23 mai 2012 par Fabrice @poirpom

Les trente-six premières heures. En Colombie.

Bogota.

Et deux détails piquent les yeux à en chialer des arepas au fromage: le boucan que font les murs de cette ville; le bordel pas-cher-pas-cher des rues.

Les murs d’abord. Ils hurlent. À tous les coins de rue. De la fresque multicolore au pochoir posé à la va-vite, du lettrage ultra soigné au gribouillis cafouillé, le béton de Bogota est particulièrement bavard.

Traversée d’une partie de la ville le lundi matin, jour férié, en transmilenio, ligne de bus publique. Et tout ce qui fait plus de quatre mètres de large et deux de haut s’est fait rénover par Stinkfish, Toxicomano ou Bastardilla, les plus connus du pays.

Les mutants de Stinkfish, les punks de Toxicomano, les chamans urbains de Bastardilla.

Et des dizaines d’autres gravitent autour. Et, à pied, usant les semelles dans les petites rues du nord de la ville, les murs parlent plus fort encore. Ils sont installés sans pour autant faire partie du décor. Car les gens les voient. Les écoutent.

Une règle, implicite, semble être respectée par tous les gribouilleurs de la ville, star de la bombe comme anonyme: ne s’en prendre qu’aux murs gris et moches. Conséquence: trois écoles dominent sur les murs. Le gris; le gris rénové par les gribouilleurs; ou les couleurs, vives, des échoppes et maisons repeintes en bleu, jaune, rose ou rouge.

Lorsque les murs se calment, les rues prennent le relais. Sur le bitume, une enfilade de p’tits biz-biz. Par dizaines, par centaines. Lascars et donzelles vendent de tout. Mais de tout. Pas cher et super quali.

Des lunettes de soleil, des films piratés, des CD de karaoké, des loupes, des culottes, de la merde en barre et en plastique… Il y a aussi celui qui vend des sculptures de verre qu’il façonne et colore, là, assis sur des marches. Il y a le furieux qui vend des tirages photo: il a un groupe électrogène auquel sont branchés ordinateur et imprimante photo. Il gueule son tarif à tue-tête pour imprimer photos de mariage et de vacances.

Il y a aussi le dingue qui a installé une meuleuse sur le trottoir pour polir les BlackBerry un peu usés et rayés.

La super star, dans toutes les rues, c’est le vendeur de minutos. Il n’a qu’un panneau s’il ne vend que çà, une vieille carriole s’il vend des chips, des clopes à l’unité ou d’autres bricoles inutiles mais qui dépannent. Panneau ou carriole, il y a l’info tarifaire écrite quelque part.

Minutos

200 pesos

Parce que la population de Bogota est tout le temps à l’arrache. Tout le temps en iench. Tout le temps sans forfait, sans solde de carte pré-payée. Alors les vendeurs de minutos sont un petit service rendu à la communauté. Ils ont deux, trois, quatre téléphones portables à disposition. Avec du crédit. Pour deux-cents pesos, soit huit centimes d’euro, il y a moyen de passer un p’tit coup d’fil rapide. Dire rien d’important. Mais pour pas cher.

Les trottoirs de Bogota, c’est une kermesse du n’importe quoi. Et les murs une cacophonie colorée.