Terdav Trail World Tour, St Jacques, 29 e étape: une Meseta pas si monotone.
Publié le 22 mai 2012 par Sylvainbazin
Hier, j'avais pu un peu me reposer après mon arrivée en début d'après-midi à Hontanas. Le reste de la journée s'était passé très tranquillement et j'avais agréablement dîné en compagnie d'un très agréable groupe franco-espagnolo-italiens, des amis qui font chaque année ensemble un tronçon. Maria, une italienne, romaine, et Jean-Antoine, qui vient de la Ciotat, bavardent avec moi. Nous parlons bien entendu du chemin, de la longueur de mes étapes, de projets de trekking, de Terres d'Aventure et de pas mal d'autres choses.
Une bonne nuit plus tard, j'ai cependant un peu de mal, un peu plus que d'habitude, à sortir du lit. Les kilomètres, les jours de marche, commenceraient ils à peser? ou bien est-ce la légère appréhension des deux étapes assez longues qui m'attendent aujourd'hui et demain? Ou bien tout simplement que le lit est, après tout, un endroit confortable...enfin je m'en extirpe tout de même.
Après un petit déjeuner à la mode des auberges de ce type- c'est à dire léger- je repars donc pour près de 60 kms à travers la très rédoutée, pour son aspect austère et monotone, Meseta. Je suis plutôt agréablement surpris: certes certaines lignes droites sont longues et certaines portions des plus dénudées, mais le paysage est bien plus varié que prévu. Je croise d'abord les ruines du couvent San Anton, en remontant, tranquillement car je suis parti prudemment, une bonne file de randonneurs. Je rejoins ainsi mes nouveaux amis de la veille, qui doivent arrêter leur promenade à Léon, samedi. Outre ces ruines, le paysage est rythmé par quelques villages et aussi par des variations de terrain. J'ai un peu de mal à rentrer dans mon effort aujourd'hui, mais j'avance tout de même. Mon regard se perd parfois dans les immenses étendues, mon esprit vagabonde, sans pouvoir bien se fixer sur une pensée très précise.
Après Hornillos del Camino, je découvre aussi que cette Meseta n'est pas forcément si plane: une vraie côte, un petit col, m'attends. J'y prend un bon rythme et m'amuse à doubler un vététiste... La vue sur l'immense étendue de cultures, d'éoliennes et de prairie, en haut, est tout de même assez surprenante. Le plateau qui suit, rectiligne et dénudé, l'est aussi. Mais il ne dure pas si longtemps: une descente suit, et me revoilà sur une large piste, sillonant les cultures à perte de vue. Curieusement, après un passage un peu difficile, mon pas se fait plus alerte. Je passe Boadilla del Camino, un petit village un peu délabré, mais en travaux, pour longer les rives du canal de Castille.
Là, ce léger changement de décor et de milieu naturel, au milieu du plateau et des cultures, produit un effet finalement très fort sur la nature qui environne immédiatement le chemin: on retrouve des arbres, les oiseaux sont là, ils chantent. Des batraciens se font également entendre. L'eau c'est la vie, et je le sens bien dans cet oasis.
J'atteint ainsi Fromista. Là, je décide, comme je l'avais prévu de m'accorder une pause repas. Je ne trouve qu'un bar me proposant une pizza surgelée, directement sortie du congélateur à l'entrée. Ca me rassasie un peu, c'est déjà ça. J'ai tout de même marché 36 kms et il m'en reste 21 pour atteindre Carrion de los Condes, mon étape du jour.
Je longe d'abords la route pendant trois longs kilomètres. Le temps a bien changé depuis hier et il commence à faire presque chaud. Cette région, d'ailleurs, doit être presque totalement intenable par grande chaleur. Grillade de pélerin assurée. Les pauvres japonais et coréens que j'ai doublé tout à l'heure, totalement enmitouflés (je pense que les guides de randonnées de ces pays là doivent conseiller de ne rien exposer au soleil: ils sont couert intégralement de la tête au pied. Mais pas toujours avec des vêtements adaptés à la chaleur, ils me semble souffrir beaucoup pour certains...) ne s'en sortiraient sans doute pas. Ensuite, je prends une variante du "camino" officiel, qui continue de longer la route pendant quinze kilomètres, par des chemins à travers champs. C'est tout de même très rectiligne et parfois ennuyeux, mais je m'en accomode. Les canaux d'irrigation sont intéressants à observer, je plonge aussi parfois dans mes pensées. Aujourd'hui, elles vont vers mon passé, récent ou plus lointain, pour sans doute mieux se tourner vers le présent et l'avenir... de beaux souvenirs, pour combler ll'instant, pour sourire intérieurement.
Je rejoins ensuite encore un canal, que je suis quelques kilomètres. Il est un peu plus sauvage et bien agréable. Les oiseaux chantent, j'aperçois le vol d'une cigogne, les joncs et les fleurs égayent les lieux.
Malheureusement, les sept derniers kilomètres, je longe à nouveau la route par une piste aménagée pour les pélerins. C'est tout droit, et vraiment pas drôle. Je suis bien content d'atteindre enfin Carrion.
Dans le village, pile sous le porche de l'église, j'ai la bonne surprise de rencontrer Francisco, un ami coureur qui m'avait hier laissé un message m'indiquant qu'il me retrouverait peut-être à Leon.
En fait, il a fait aujourd'hui une immense étape de 85 kilomètres depuis Burgos, en courant, et est donc arrivé avant moi ici. Il est habitué à faire ainsi des sections du Saint-Jacques. Là, il a prévu d'aller de Burgos à Leon en trois jours, avant de reprendre son travail. Nous prenons un apéritif amical et sympathique. Francisoc vit entre sa maison de Bordeaux et son travail dans le pays basque espagnol. Il navigue donc entre les deux paus, et court bien entendu les plus beaux trails des deux côtés des pyrénées.
Demain, je vais parcourir encore une bonne soixantaine de kilomètres dans ces décors parfois surprenant, parfois lassant, mais qui finalement ne laissent pas indifférents... Cela fera déjà un mois que j'ai quitté mon domicile d'Aix-les-Bains. Allez, je termine en musique ce soir:
De beaux souvenirs, Benjamin Biolay, cherchez sur You Tube le copier/coller n'est pas pratique dans ces cas là sur l'ipad... ;-)