"Je constate que le concours d'inélégance se poursuit. Robert Badinter se réveille sur ce sujet, sans doute sur instruction de François Hollande qui règle de nouveaux comptes avec Nicolas Sarkozy", a lancé le secrétaire national de l'UMP dimanche matin lors du Grand Rendez-vous Europe 1/i>Télé/Le Parisien-Aujourd'hui en France.
L'outrage ne décoiffera pas Rober Badinter. Dans une tribune limpide et concise, l'ancien garde des sceaux a posé un constat sans appel sur ce qui est passé d'une bizarrerie française à une choquante anomalie démocratique.
L'"insoutenable exception française" comme la qualifie Badinter, c'est de voir la République française faire de ses ex-présidents des membres perpétuels d'une juridiction constitutionnelle sans qu'ils soient comme les autres membres de obligés prêter serment, de respecter toutes les obligations, qu'ils ne sont pas soumis au régime disciplinaire qui pèse sur les autres membres du Conseil et enfin, que même une condamnation pénales ne les expose pas à suspension ou révocation de leurs fonctions.
Badinter fait mouche lorsqu'il souligne que la QPC a achevé de transformer le Conseil constitutionnel en instance juridictionnelle. Mais c'est une nouvelle fois la personnalité de Nicolas Sarkozy qui souligne les zones d'ombre de notre Constitution.
La plupart des proches de Nicolas Sarkozy ont pronostiqué que celui-ci irait siéger au Conseil constitutionnel. C'est son droit, les indemnités mensuelles (12 000 €) sont confortables. Mais cette fonction est-elle compatible avec des activités politiques ou professionnelles ? L'arrivée possible dans cinq ans, dans la même instance, de François Hollande ne serait pas plus opportune. Le toilettage de l'institution semble incontournable.
Dans toute sa sagesse, Robert Badinter propose une solution susceptible de satisfaire tout le monde : "Nous attendons donc du président Hollande qu'à l'occasion de la révision annoncée du statut du président de la République, il soit mis un terme à cette insoutenable exception française. Si la passion de juger de la constitutionnalité des lois anime d'anciens présidents, ils pourront toujours être nommés membres du Conseil constitutionnel pour neuf ans par l'un de leurs successeurs ou le président de l'une ou l'autre des assemblées. Ainsi pourront-ils exercer la fonction de juger au sein du Conseil constitutionnel dans les mêmes conditions et avec le même statut que les autres membres. Le Conseil constitutionnel et l'Etat de droit n'auront donc rien à perdre à cette réforme et la crédibilité de l'institution et sa renommée internationale ne manqueront pas d'y gagner."