Le 22 mai, journée internationale de la biodiversité.
par Christophe Aubel, directeur d'Humanité et Biodiversité
L'ONU a fait du 22 mai la journée internationale de la biodiversité. Au lendemain de la prise de fonction du nouveau président de la République et de la nomination d'un nouveau gouvernement, ce 22 mai est une occasion unique pour construire la recapitalisation, l'équité et la démocratie écologique dont notre société a besoin.
L'Homme est partie intégrante de la biodiversité. La qualité des relations qu'il entretient avec l'ensemble du vivant est une dimension constitutive de son humanité et de son avenir. En rupture avec l'illusion d'une indépendance croissante des humains et de la nature, nous affirmons que permettre à la biodiversité de se déployer dans l'espace et d'évoluer dans le temps constitue donc à la fois un impératif moral et la condition d'un développement vraiment soutenable de nos sociétés, dans leur diversité. Et nous soulignons que face à la rapide dégradation de la biodiversité, dans l'intérêt même de nos sociétés, cela doit être une priorité nationale.
Trois orientations peuvent permettre de traduire ces constats en politiques : la biodiversité partout, pour tous et par tous.
- La biodiversité partout, car il ne s'agit pas de se limiter à protéger quelques éléments remarquables de cette biodiversité mais de la prendre en compte dans toutes ses fonctionnalités, en permettant son développement et celles de ses capacités d'évolution partout où les humains vivent et agissent. C'est l'enjeu de la "recapitalisation écologique".
- La biodiversité pour tous, car il faut veiller à un partage équitable, tant dans notre pays (sans oublier l'outre-mer), que dans l'ensemble du monde, de tous les biens et services que nous procurent la biodiversité et des "capacités" qu'elle offre aux humains. C'est l'enjeu de "l'équité écologique".
- La biodiversité par tous, car la réussite implique d'associer et de mobiliser tous les citoyens et tous les acteurs, publics et privés, les entreprises, les collectivités locales, les associations, tant à la définition des objectifs qu'aux actions à mettre en œuvre. Cette mobilisation-association de tous devant trouver sa traduction dans une meilleure articulation entre démocratie élective et démocratie participative. C'est l'enjeu de la "démocratie écologique".
L'association Humanité et Biodiversité, que préside Hubert Reeves, a écrit au président de la République, au premier ministre et aux ministres concernés en proposant des mesures concrètes pour répondre à ce triple enjeu.
Parmi ces mesures :
- La stratégie nationale pour la biodiversité doit devenir l'une des priorités du gouvernement, affichée en tant que telle dans le discours de politique générale du premier ministre qui déléguera à la ministre de l'écologie ses compétences de coordination interministérielle en ce domaine.
- La nécessité de prendre dès la première loi de finances des mesures en faveur de la biodiversité, que se soit par la suppression de mesures de subventions néfastes ou par la création de dispositifs basés sur le principe pollueur-payeur, par exemple par une redevance pour la destruction de services écologiques rendus par la biodiversité. Ces flux financiers devront abonder un fond pour la recapitalisation des territoires.
- Le soutien dans l'action des collectivités territoriales par la promotion des stratégies régionales biodiversité et des atlas communaux de biodiversité. La nouvelle étape de la décentralisation doit permettre de confier un rôle d'animateur chef de file aux régions dans le domaine de la biodiversité.
- La création d'une agence de moyens et d'expertises, cette "Ademe de la biodiversité" devra améliorer l'action de l'Etat acteur, et de l'Etat "conseil" des autres parties prenantes (collectivités, entreprises, etc.)
- Les filières des métiers de la biodiversité, l'innovation tel le biomimétisme, seront soutenues, de même que l'éducation et la formation à la connaissance par tous de la diversité du vivant.
- La trame verte et bleue deviendra une composante pleine et entière de l'aménagement du territoire doté d'un poids juridique suffisant et à plus long terme les plans locaux d'urbanisme deviendront des plans locaux d'aménagement et de gestion de l'espace permettant notamment de construire l'avenir des territoires ruraux dont on a vu la souffrance lors des dernières élections.
Construire la recapitalisation, l'équité et la démocratie écologiques, c'est se donner un atout de plus pour répondre aux défis économiques et moraux de notre siècle. Au pésident de la République et au premier ministre de saisir cette opportunité.
Christophe Aubel, directeur d'Humanité et Biodiversité