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Gertrude, une veuve aisée, Candide, sa nièce et Évariste, un jeune noble, sont les personnages centraux de cette comédie en trois actes, qui se déroule sur la place d’un village près de Milan: les Maisons-Neuves.
Candide et Évariste sont amoureux mais d’autres les aiment également en secret et voient d’un mauvais œil cet amour naissant. Il suffit alors d’une belle matinée où une quinzaine de villageois sont sur la place, à flâner ou à travailler, pour qu’un incident très banal déclenche une mini-révolution. L’objet déclencheur de toute cette animation est un éventail, celui de Candide qui se casse en tombant de la terrasse de la villa où elle brode à côté de sa tante, tout en observant et en écoutant ce qui se passe autour d’elles.Évariste s’empresse alors d’aller acheter un nouvel éventail chez la mercière voisine puis de le donner à la jolie Jeannine, une jeune paysanne très courtisée, elle aussi, en lui demandant de le donner en secret à Candide. Cette dernière, qui a vu toute la scène, imagine alors que son amoureux la trahit en offrant un cadeau à une autre. Morte de jalousie, elle cherche à se venger sans attendre. Justement le comte vient de demander sa main à sa tante… Une série de quiproquos s’ensuit, entraînant, comme toujours, jalousies, mensonges, médisances et bagarres. Tout le monde prend parti pour un camp ou pour un autre tout en y cherchant uniquement son propre compte, bref, les sentiments de tous s’exacerbent et se dévoilent jusqu’à ce que tout s’apaise et reprenne son cours habituel. L'éventail est passé de main en main avant d'aboutir enfin à celle à qui il était destiné. Nous sommes dans une comédie délicate, légère et enjouée où, naturellement tout est bien qui finit bien.
L'intérêt ne vient pas de l'histoire elle-même mais du pétillant tableau de mœurs qu'il dresse, fait de réalisme et de tolérance contre tous les excès de pouvoir. Ses personnages sont loin d'être des abstractions ou de simples pantins. Ils sont complexes et bien vivants et représentent toutes les classes de la société: paysans, artisans, commerçants, bourgeois et nobles plus ou moins désargentés. Ce que j'aime dans sa pièce, c'est le côté très italien d'une scène de village où chacun adopte spontanément une attitude théâtrale, amplifiant les sentiments et cachant son cynisme sous une certaine forme de désinvolture et de bienveillance dans l'allégresse tourbillonnante des scènes de rues où tout se déroule aux yeux de tous. Pour qui connaît bien ce pays, la moindre place de ville ou de village est un plateau de théâtre en soi. C'est une pièce amusante à lire. J'aimerais bien la voir jouée maintenant.
L'éventail de Carlo Goldoni (Venise, 1707 - Paris, 1793) Entre Molière et Marivaux, il a écrit plus de 200 pièces dont les principales sont des comédies dont les plus célèbres sont : La Locandiera, La trilogie des Villégiatures, Grabuge à Chioggia, (Le baruffe chiozotte), La petite place (El Campiello), Les Rabat-joie, (I Rusteghi)...
Il Ventaglio. Comédie en trois actes et en prose, représentée pour la première fois à Venise en 1765. Traduction de Michel Arnaud. (Collection Unesco d'0156uvres représentatives; Introduction de Silvio d'Amico, Les Editions Nagel, 1956Première participation au challenge de Nathalie: Il viaggio et nouvelle participation au challenge de Anne: Voisins voisines