Témoignages - Editions Flammarion - 379 pages - 19.90 €
Parution en novembre 2011
Le sujet : textes, extraits de carnet de note et surtout, conversations entre la journaliste Agnès Michaux et Nicola Sirkis, chanteur du groupe Indochine.
A eux deux, ils reviennent sur 30 ans de vie de groupe et surtout, 30 ans de textes, revenant sur chaque chanson...
Tentatrice : Ma "fanitude" envers Indochine
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Mon humble avis :je vais être honnête, je pense que ce livre passionnera tout fan du groupe, mais qu'il laissera de glace les autres lecteurs, à moins d'être étudiant en musicologie ou ethnologue. Car Indochine, c'est tout de même 30 ans de musique, de succès en montagnes russes, d'un groupe plus souvent décrié par la critique et rhabillé par ses détracteurs anonymes qu'encensé. Et pourtant, même si donné pour mort dans un fin des années 90, Indochine s'est offert le luxe, 10 ans plus tard, de remplir le Stade de France et de tourner en France à guichets fermés. Un beau pied de nez à ceux qui n'y ont jamais cru et qui n'y croient toujours pas. Il n'empêche, le groupe a évolué, un seul des membres d'origine est encore là (Nicola Sirkis), la musique n'est plus la même, les textes sont de plus en plus ficelés, aboutis avec toujours autant de poésie. Le public des débuts est toujours là, et il se voit rejoint par des plus jeunes, par ses enfants. Indochine est donc devenu un groupe intergénérationnel.
J'ai déjà dit sur ce blog l'importance que le groupe Indochine revêt pour moi depuis mon adolescence : une ouverture sur le monde et une introspection. C'est avec Indochine que j'ai regardé avec attention le planisphère pour situer chaque lieu cité dans un texte ou dans un reportage sur le groupe. C'est avec eux que ma curiosité littéraire a dépassée ce que me proposait l'école ou les étagères familiales. Je suis allée vers Salinger, Cendrars... Bref, je voulais comprendre les allusions littéraires et géopolitiques. Alors je cherchais.... Et puis, la révélation : un reportage des Enfants du Rock sur le groupe qui enregistre à Montserrat, une petite ile des Caraïbes. Coup de coeur pour les paysages, l'atmosphère, la végétation, le crépuscule. Dès années plus tard, je m"installerai au plus près de cette île : en Guadeloupe. Mais revenons en au livre.
Agnès Michaud, par de belles introductions plutôt poétiques, annonce chaque album. Les paroles de chaque chansons occupe une page ou deux et en face, Agnès et Nicola discutent, en toute simplicité, honnêteté, transparence, lucidité sur ces textes et les événements vécus par le groupe ou le chanteur Nicola. Car bien sûr, sa vie personnelle transparait discrètement dans ses textes. Mais dans ces conversations, jamais d'impudeur.
Kissing my songs, c'est remonter à la genèse de chaque chanson. Pourquoi, comment, dans quel état d'esprit, résultat... Nicola Sirkis avoue, confesse, préférer oublier certains textes et en revendique la plus grande partie avec une certaine et légitime fierté. Mais franchement, j'ai trouvé très intéressant de savoir où une chanson peut prendre sa source : parfois, un petit rien et d'autre fois, un fait "divers" gravissime qui inspirera tout un album (comme celui du suicide des deux jeunes filles qui, il y a quelques années sautaient du haut du falaise dans le Pas de Calais et qui inspirera Alice et June).
J'ai découvert avec surprise d'autres influences musicales, littéraires et poétiques qui m'avaient échappées (je n'ai pas fini d'alourdir ma PAL), j'ai compris différemment certaines chansons dont je m'étais fait mon interprétation personnelle (que je garderais, car la poésie, c'est cela, l'auteur propose, le lecteur dispose et les textes de Nicola Sirkis sont pour moi pure poésie). Je sais dorénavant qui est "Juliette". J'ai vraiment noté une évolution dans les textes, collage de mots parfois hasardeux mais à la chouette sonorité au début pour avoir, avec Alice et June et la République des Météors, un fil rouge, des textes puissants, révoltants, douloureux, amoureux.
Et puis ce livre est aussi une réflexion sur la vie du groupe, sur le ressenti du succès. Et l'on découvre, avec stupeur pour moi que l'ambiance du groupe initial (avec Nicola, Dominique, Stéphane et Dimitri) était souvent tendue, que chacun ne réagissait pas forcément de la même façon face au succès. Bien sûr et hélas, la mort de Stéphane est évoquée à plusieurs reprises, mais toujours avec pudeur. Et Nicola ne cache pas ses passages à vide, ses moments de déprimes ou d'enthousiasme amoureux, qui font dire que c'est un homme comme les autres. Oui, mais avec un talent énorme !
A lire et à relire (pour ma part), avec son MP3 à proximité pour se remettre en tête les chansons qui nous ont moins marqués !
Et merci Agnès Michaud et Nicola Sirkis pour ce chouette livre !