Je suis allé au Plateau pour voir l’exposition de Cao Fei, dont j’avais aimé les installations cum vidéo à Venise et à Lyon. Mais ici, les installations sonnaient moins juste, la mise en scène autour de Second Life, les sculptures de son père ou les cartons de l’usine Osram n’avaient pas, à mes yeux, la même densité que la bulle vénitienne ou la tente lyonnaise. Ses meilleures vidéos naviguent entre tradition et modernité, entre Asie éternelle et modernisme occidental : ses guerriers revêtus de tenues de mangas rentrent sagement à la maison après leurs exploits urbains, ses ouvriers d’usine font de la gymnastique chinoise dans les ateliers (ci-contre, Whose Utopia, part 2 : Factory Fairytale) et les habitants de Guangzhou dansent le hip-hop dans la rue. C’est bien, mais çà manque un peu de vivacité, de densité : discours un peu trop simple, et primat de la forme.
Mais surtout c’est un travail où la frontière entre artiste et sujet s’estompe : c’est d’abord un travail de participation, de modification du réel, qui m’a fait penser à celui de Kate長™ina Šedá : l’artiste peut-il transformer le réel ? Mais Bertille Bak n’est pas absente de son travail, ses personnages savent qu’il s’agit d’un projet pour les Beaux-Arts à Paris, ils ont conscience d’entrer dans l’histoire de l’art par la petite porte et ne manquent pas d’en plaisanter.
A côté, trois autres petits films sur moniteur, des films de rituel et d’évasion : une vieille femme note les numéros de toutes les voitures qui passent, des anges sur des rails tentent vainement de s’envoler, et des enfants font fonctionner une cuisine industrielle sur rails en plein champ, avec un productivisme effréné de l’arrachage des pommes de terre à la livraison des frites. En face, ces photos très ‘Becheriennes’ des pignons des maisons des corons. A suivre, sûrement.Photos 1 et 2 Courtesy le Plateau et Cao Fei / Bertille Bak. Photo 3 de l’auteur.