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Boycott, enfin un peu de lucidité

Publié le 17 mai 2012 par Magazinenagg
Enfin, un peu de lucidité commence à infiltrer les médias. Le texte de Marc Simard ci-bas est particulièrement lucide et éclairant.
Dans le conflit opposant le gouvernement aux étudiants, à la gogauche et aux groupuscules anarchiques de tous genres, le gouvernement récolte ce que les gouvernements successifs ont semé depuis des décennies. Tous les gouvernements qui se sont succédé à Québec depuis au moins quarante ans ont, d’une réforme à l’autre, laissé croire que l’État pouvait satisfaire toutes les attentes de tous les groupes d’intérêt.
Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que les étudiants aient cru qu’il suffisait de le demander pour obtenir la gratuité universitaire. Une fois le processus de contestation enclenché, les syndicats et les extrémistes de tout acabit en ont pris le contrôle au détriment des étudiants et de la population.
Je ne peux que souhaiter que le fiasco de ce conflit serve de leçon à tous les tenants de l’État providence. Un jour ou l’autre, il faut payer ses factures. Demander aux Grecques ce qu’ils en pensent! _______________
Marc Simard. L'auteur enseigne l'histoire au collège François-Xavier-Garneau, à Québec. La Presse
L'affrontement entre les étudiants et le gouvernement au sujet des droits de scolarité nous révèle quelques enseignements sur la société québécoise.
1. Les «grévistes» veulent être écoutés, mais n'entendent rien. 
Depuis le début des manifestations, les étudiants qui boycottent leurs cours exigent qu'on accueille leur discours, mais ils ne veulent pas entendre les arguments de leurs confrères majoritaires ni l'assourdissant «NON» que leur oppose la société. La génération des enfants-rois ne tolère pas d'être contredite ni même rappelée à l'ordre.
2. Les «grévistes» ne veulent pas négocier, mais gagner. 
Plusieurs observateurs de bonne volonté insistent depuis plusieurs semaines pour que le gouvernement négocie avec les étudiants boycotteurs. Ils ne veulent pas comprendre que ceux-ci sont entrés en croisade avec comme seule perspective la victoire et que leur mouvement est manoeuvré par un groupe radical qui n'acceptera rien d'autre que le gel, dans une perspective de gratuité.
3. La démocratie étudiante est gravement malade.
Intimidation, violence, non-respect des injonctions, entorses aux droits démocratiques des opposants, les étudiants malmènent la démocratie et l'État de droit. Après cette crise, le gouvernement devra légiférer pour encadrer les associations étudiantes et leurs pratiques. Le vote électronique, notamment, devra leur être imposé.
4. Ce mouvement est corporatiste et même réactionnaire. 
Dans ce débat, le progressisme est à «droite» et la réaction à «gauche». La proposition gouvernementale (augmentation des droits plus amélioration du régime de prêts et bourses) suppose de faire payer davantage les riches, de protéger l'accessibilité et de mieux financer les universités, valorisant ainsi la qualité de l'éducation. Les opposants campent sur le gel et suggèrent même qu'on coupe les universités et qu'on éviscère la recherche.
5. Le terrorisme est de retour au Québec, sous l'appellation de désobéissance civile. 
Il a d'ailleurs reçu la bénédiction d'anciens du FLQ et de quelques artistes excités. Certains aiment croire que les casseurs et les perturbateurs des services publics proviennent de l'extérieur du mouvement étudiant. C'est de l'aveuglement volontaire.
6. Les syndicats et les groupes populaires ont fait dévier le débat. 
Obnubilés par leur haine du gouvernement Charest, accusé de tous les maux, et du néo-libéralisme, qu'ils voient partout, ils sont entrés dans la danse avec comme objectif de faire tomber le gouvernement libéral. Ils s'appuient pour ce faire sur la CLASSE, pour laquelle le débat sur les droits n'est qu'une étape vers la révolution anarchiste.
7. Les enseignants qui soutiennent ou même encouragent les «grévistes» nuisent à la profession.
Les profs qui portent le carré rouge, manifestent ou défient des injonctions prétendent promouvoir les droits sociaux ou même faire oeuvre de pédagogie. Une brève conversation avec eux montre toutefois qu'ils sont obsédés par leur aversion à l'endroit des libéraux, leur hostilité envers le capitalisme et leur romantisme révolutionnaire. En défiant la loi et l'État de droit pour des motifs aussi mal fondés, ils piétinent leur éthique et ternissent l'image du corps enseignant.
8. Le gouvernement Charest ne peut pas céder à ces revendications. 
Négocier une baisse des droits ou accepter un moratoire (requis par les syndicats et par les «roses») équivaudrait à légitimer la violence et à s'agenouiller devant les pressions d'un groupe minoritaire: la raison d'État ne le permet pas. De plus, un recul équivaudrait à un suicide politique pour le premier ministre et le PLQ.
9. Le recours aux tribunaux est entré dans les moeurs. 
À moins que le gouvernement n'accorde aux associations étudiantes le droit de grève en l'encadrant strictement, les étudiants brimés feront de plus en plus de demandes d'injonctions. On peut même penser que ceux qui ont subi des dommages dus à ce conflit intenteront des recours collectifs contre leurs associations, les syndicats d'enseignants qui ont appuyé le boycottage et les institutions qui n'ont pas rempli leurs devoirs légaux.
10. La démocratie est à la fois vulnérable et solide. 
Les Che et autres Trotsky en herbe jouent une pantomime de Mai 68 et s'imaginent faire la révolution. Mais outre qu'ils oublient les leçons de l'histoire (notamment comment les étudiants français furent torpillés par leurs alliés syndicaux), ils sont aveugles à une des grandes lois des bouleversements révolutionnaires: que ceux-ci ne peuvent aboutir que s'ils ont le soutien de la population, de la police et de l'armée

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