Pardonnez-moi de pomper notre nouveau Prédisent, mais moi Président de la République, les élèves auront cours d’astronomie !
A l’exception de Jacques Cheminade, l’OVNI de la campagne dont j’évoquais les idées délirantes sur la fusion froide et la terraformation de Mars, aucun candidat à la présidentielle (ou à quoi que ce soit d’ailleurs) ne semble accorder d’importance aux technologies spatiales. Pourtant, elles sont un secteur économique privilégié, dont le dopage permettrait de relancer la croissance en ouvrant de nouveaux horizons (c’est le cas de le dire), en réduisant le chômage, et en innovant, technologiquement parlant. Ainsi donc, étant donné l’enseignement scolaire fade, qu’on ne s’étonne pas du peu d’intérêt que suscite l’espace. En effet, je serai surpris que le bac en poche, beaucoup d’élèves savent ce qu’est le solstice ou une équinoxe. Combien d’entre eux pensent que les saisons sont dues à l’éloignement du soleil, alors qu’elles sont dues à l’inclinaison de la Terre sur son axe ?
Peut-on encore rêver ?
La vraie raison du désintérêt du spatial est qu’autrefois, dans les années 1960, avec le programme Apollo, tout le monde (ou presque !) rêvait de devenir astronaute. Du moins, l’an 2000 paraissait un univers fantastique où chacun posséderait son vaisseau spatial ; on pensait au moins qu’il y aurait une présence permanente dans l’espace (de nature moins anecdotique que l’ISS). Et ce fut la désillusion… Les navettes américaines popularisèrent à nouveau les cieux ; désormais elles sont au musée, et les Américains contraints à se prostituer chez les Russes pour leurs vaisseaux Soyouz, une technologie d’il y a cinquante ans ! D’autant qu’il s’agit d’un beau revers de fortune pour le pays de l’Oncle Sam qui n’aurait pas imaginé une seule seconde être à la merci du bon-vouloir soviétique, ou russe !
Et Obama d’annuler le programme Orion de retour sur la Lune…
Il s’agit pourtant d’un cercle vicieux : moins on fait pour l’espace, moins l’espace fait pour nous. Aussi, comment susciter des vocations si l’astronomie est à peine effleurée à l’école ?
Pour ce qui est enseigné, c’est en quatrième : un chapitre de physique consacré aux éclipses. Le reste est déconcertant : une partie du programme de seconde est un semblant d’étude du système solaire. Devinez dans quelle matière… en SVT : Sciences de la Vie et de la Terre. Peut-être faudrait-il les renommer Sciences de la Vie, de la Terre, et de l’Univers, non ?
Moi Président de la République, les élèves auront SVTU ! N’ayez crainte, l’acronyme est si laid qu’il vaut mieux réinstaurer les “Sciences nat”. Finalement, la physique, la chimie, la géologie, la biologie, et l’astronomie ne perdraient pas à être fusionnées. Comme toute classification est arbitraire, autant ne pas établir des clivages illusoires. La raison de cette séparation tient aux fait qu’on ne peut (vraiment ?) pas former de professeurs polyvalents, mais il n’est pas question pour un professeur de physique de se travestir en professeur de biologie, et vice-versa : il s’agirait d’une matière, où un professeur différent exposerait son cours.
Pour autant, les élèves s’y perdraient sûrement… Peu importe la planification, l’essentiel est d’enseigner des rudiments d’astronomie : il ne s’agit pas de verser dans l’astrophysique en décrivant l’effondrement gravitationnel des trous noirs. Je pense – humblement – qu’on n’aurait rien à perdre à parler de quasars, pulsars, magnétars, supernovas, car bon nombre de connaissances sont accessibles dès le lycée.
La Centuire de Kuiper et les planètes extrasolaires, objet le plus intéressant de la recherche actuelle (surtout parce qu’elles pourraient abriter la vie) devraient également être de la partie. Et les constellations, savoir se repérer aux étoiles ? Cela devient-il inutile avec la pollution lumineuse des villes et les GPS ?
La trajectoire des comètes, l’aphélie, la périhélie, le plan de l’écliptique, l’apogée, le périgée, la position du soleil dans la Voie Lactée (bras d’Orion !), le superamas de la Vierge, les types de galaxie…
Il est étrange qu’on soit allé sur la Lune avec un ordinateur contenant moins de mémoire que le moindre téléphone portable actuel : aujourd’hui nous disposons de supercalculateurs aux capacités prodigieuses, et nous n’en faisons rien… si ce n’est des simulations nucléaires pour construire des sous-marins lanceurs d’engins coûtant un milliard l’unité, soit moins que certains programmes spatiaux orbitaires !
Surtout, on apprend dans la filière scientifique des choses qui, bien qu’elles soient passionnantes, ne sont pas forcément utiles à tout un chacun : je pense à la géologie dont les connaissances relativement approfondies sur les marges actives et passives ne perdraient rien à laisser place à un peu d’astronomie.
Plus précisément, mes détracteurs rétorqueront qu’il y aurait trop de choses à faire. Bien sûr, pourquoi pas remettre au goût du jour l’étude du magnétisme qui s’est volatilisé des programmes du physique du secondaire alors que l’effet Hall, lui, n’a pas disparu.
Pire que cela, le magnétisme fait toujours partie du programme de Première S. Théoriquement – c’est dans le bulletin officiel – les forces de Laplace ne doivent pas être inconnues des élèves à la sortie de cette classe, mais je me demande quel professeur traite ce chapitre, dans la mesure où il n’est pas exigible au bac !
Moi qui m’intéresse à titre personnel à l’histoire des sciences me demande pourquoi on fait l’impasse sur l’expérience d’Ørsted, alors qu’elle est mentionnée dans le programme : ce n’est pas tous les jours qu’on montre que le courant électrique a une influence sur les boussoles !
De même, la conduction des potentiels d’action évoquée en Première S, ainsi que la morphogénèse végétale, sont des chapitres de SVT que tout le monde délaisse puisqu’ils ne “tombent pas au bac”, comme on dit dans le jargon…
A quoi bon apprendre la science donc ! Comme je suis passé par là, je déplore que trop d’élèves, pas tous heureusement, mais un bon nombre apprennent des choses qu’ils oublieront le lendemain du bac, plutôt de s’émerveiller sur les possibles. Pour moi, on ne peut s’émerveiller qu’en regardant les étoiles. Et si notre civilisation a tant de problèmes (à commencer par l’écologie), c’est peut-être parce qu’elle ne se penche plus vers les étoiles. A rester cantonnés sur notre petite planète (au demeurant pas si petite et pas si mal que ça), on en croirait que le monde s’arrête ici, et qu’une fois qu’on aura puisé tout l’uranium pour en faire du mox, on va tous mourir…
La religion veille
Avec leur périscope, les sous-mariniers religieux pourraient bien veiller à ce que l’astronomie ne soit pas enseignée à l’école. Si notre République se veut en effet laïque, les Eglises quelles qu’elles soient pourraient craindre l’évocation du Big Bang, ou d’une certaine histoire de l’Univers, à commencer par la date de formation de la Terre. En effet, l’enseignement de l’évolution en Terminale suscite la polémique (aux Etats-Unis des professeurs sont régulièrement condamnés pour avoir évoqué Darwin), donc s’attarder sur le disque d’accrétion de la protoplanète Terre est sûrement un affront vis-à-vis des diverses communautés religieuses qui, bien que le pape ait reconnu la plausibilité d’autres mondes habités à cause de la découvertes de planètes extrasolaires et ne soit pas hostile au Big Bang, n’ont de cesse de soutenir la Création en 7 jours vers 5000 avant notre ère.
Il semble donc que les religions aient leur mot à dire en ce qui concerne l’enseignement. On peut s’insurger ou au contraire exclure le passé lointain et se concentrer sur le présent de l’Univers (même si cela n’a pas grand sens étant donné que voir loin dans l’espace, c’est voir loin dans le temps à cause du délai-lumière).
Ce sont de grands mots… Toujours est-il que moi Président de la République (ça va me donner des idées), je ne perdrais rien à proposer à l’Education Nationale une heure optionnelle par semaine d’astronomie. Qui m’aime me suive, comme on dit !
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