Pour lui, le festival de musique émergente n’est pas un simple diffuseur de spectacles, mais d’abord et avant tout une vitrine pour les artistes du Québec et un acteur dans le développement de la carrière de ces artistes et de l’industrie culturelle en général.
« L’objectif était double. Nous voulions présenter des artistes de musique alternative à la population de l’Abitibi-Témiscamingue et, dans un même souffle, donner l’occasion à certains groupes qui circulaient moins de venir dans les régions. »
Du Québec en Bretagne
Rapidement, Sandy Boutin a compris qu’il y avait peu d’artistes d’origine internationale qui s’aventuraient en région. Et que plusieurs artistes régionaux méconnus rêvaient de percer en Europe. L’occasion était parfaite pour passer du réseautage régional au jumelage international. Il s’est donc mis à programmer des artistes internationaux et à inviter des diffuseurs professionnels de la francophonie à son festival pour créer des possibilités d’échange. Si l’idée n’était pas nouvelle, Sandy Boutin a su la personnaliser et l’adapter à ses besoins bien précis.
« On n’a pas inventé ça, le réseautage !, s’exclame l’imprésario. Ça fait des années que les festivals invitent des professionnels étrangers pour voir les artistes québécois. Mais ce dont je me suis rendu compte, c’est qu’on invitait souvent les mêmes personnes et que c’étaient principalement des gens qui avaient des affinités avec la chanson. Il y avait donc une partie de la musique émergente qui ne cadrait pas dans la catégorie chanson, qui avait moins accès aux possibilités de se faire voir par des étrangers. »
Le président du festival de musique émergente en Abitibi-Témiscamingue a choisi de contacter des diffuseurs européens qui n’étaient jamais venus au Québec et qui avaient une certaine affinité avec ses goûts musicaux. C’est ainsi qu’il s’est associé à l’un des plus gros festivals de musique en France, le Festival des vieilles charrues en Bretagne.
Des échanges riches
De fil en aiguille et de contact en rencontre, il est devenu le seul membre nord-américain de la Fédération internationale des festivals « De Concerts ! ». Grâce aux échanges, de nombreux artistes québécois sont invités aux événements représentés par cette fédération. L’artiste y gagne, mais le diffuseur aussi, estime Sandy Boutin. « Nous avons beau être dans des pays différents, nous avons souvent les mêmes problèmes. Le réseautage nous permet donc d’échanger des outils concrets entre événements, dans un niveau d’entraide qui n’est absolument pas mercantile. »
« Nous avions, au festival, un problème de gestion du transport, car nous n’avions pas d’outils adéquats pour coordonner toutes les navettes pour aller chercher les artistes, les journalistes, etc., illustre Sandy Boutin. Nous avons soumis cette problématique lors d’une discussion à la fédération, et les organisateurs d’un autre festival membre nous ont envoyé un outil qu’ils avaient eux-mêmes développé pour la gestion du transport. C’est un outil qu’ils auraient pu nous vendre, mais ils ont plutôt choisi de le partager avec les membres du réseau. »
Avec l’arrivée des réseaux sociaux dans le web, la façon de travailler a évolué, avoue le programmateur de festival. Mais, si les nouveaux réseaux sociaux peuvent faciliter les partages, les « vrais » échanges n’en sont que plus nécessaires selon lui, en raison de l’immensité de la disponibilité des oeuvres.
« Un groupe a beau être accessible à travers le monde entier, s’il veut se faire découvrir en France, ça prend quelqu’un pour mettre l’accent sur son oeuvre, sans quoi il va se perdre dans l’immensité du web, où il est en compétition avec le monde entier. »
Extrait de l'article "Jumelage et réciprocité - L’expérience de Sherbrooke sera mise à profit par la Chine…… et le réseautage profite à la musique émergente" de Jessica Nadeau, Le Devoir, paru le 12 mai 2012.