Ce dimanche 13 mai, l’AC Milan va probablement vivre un dimanche très particulier. Pour tous les fans de la dernière décennie, ce dimanche ressemblera certainement à un mélange de tristesse, joie et soulagement. Certains pleureront leurs idoles de toujours, les autres profiteront du moment pour les célébrer une dernière fois, le reste se sentira soulagé de ces départs. Néanmoins, une certitude persiste. Ce dimanche 13 mai, au moment où il faudra se lever pour saluer ces immenses joueurs, tous les tifosi seront présents. Quoi qu’il arrive, quoi qu’il se soit passé, nous n’avons pas le droit d’oublier.
Alessandro Nesta, l’élégant défenseur arrivé de la Lazio de Rome en 2002, n’aura pas mis de temps pour s’imposer comme le défenseur central le plus fort de sa génération. Alors qu’il avait juré fidélité à son club de cœur, voilà que ce dernier fortement endetté n’a pas d’autres choix que de le vendre au plus offrant. Au grand dam des supporters romains qui manifestent dans les rues, Nesta rejoint Via Turati. Silvio Berlusconi qui n’a pourtant pas l’habitude de casser la tirelire pour s’attacher les services d’un défenseur, débourse la somme de près de 31 millions d’euros. Le moins que l’on puisse dire c’est que personne ne regrettera l’investissement du coté de la capitale lombarde. Le défenseur d’1m87 s’impose directement comme l’un des défenseurs de référence en série A et en peu de temps devient l’exemple de milliers de jeunes à travers le monde. « Pour être sûre de gagner un match, l’équipe du Brésil aurait encore besoin d’un seul joueur : Alessandro Nesta« déclarera la légende brésilienne Pelé. Son style défensif est un art. Il semble tout réaliser de manière distinguée. Avant d’être le meilleur stopper du monde, l’italien est un artiste. Que ce soit ses interceptions, ses tacles ou son jeu de tête, lorsqu’on le regarde chaque geste se transforme en œuvre d’art. Tout au long de sa carrière, Nesta aura dégouté l’ensemble des grands attaquants du monde, de Ronaldo à Messi. Contrairement à de nombreux défenseurs, il n’aura pas eu besoin d’être violent, voleur ou vicieux. Il était tout simplement trop fort. Nesta c’est deux Scudetti, deux Ligues des Champions, un Mondial des clubs, une Coupe d’Italie, deux Supercoupes d’Europe et deux Supercoupes d’Italie. Tout cela fait déjà de lui une légende milanaise mais s’il est tant aimé et respecté, c’est aussi pour son humilité et sa discrétion. Quand de nombreux grands joueurs se laissent aller à des écarts de conduite ou font la Une des magazines, le défenseur italien fuit les objectifs et les conférences de presse. Plutôt que de rouler en Porsche, il préfère faire une œuvre de charité sans caméra ni photographe. Aujourd’hui, il s’en va comme il a toujours été, sur la pointe des pieds et en toute humilité avec élégance.
Le deuxième départ annoncé est celui du guerrier Gattuso. L’homme pour qui chaque instant de chaque match est une bataille. En arrivant des Rangers, personne ne croyait vraiment en lui. Il n’a peut-être pas ce que parfois on appelle le génie, le talent, la classe ou un sixième sens. Cependant, il avait une chose qu’on ne pourra jamais lui enlever, la rage de vaincre. Il représentait l’âme du Milan. Au milieu des artistes, il faisait office de garde du corps, comme un spartiate parmi les poètes. Dans les moments difficiles, quand plus personne n’y croyait, Milan pouvait toujours compter sur Ringhio. Même si pour le reste des fans de football, il n’était pas le meilleur des joueurs, nous, les rossoneri, on sait que sans lui, les autres étoiles milanaises n’auraient peut-être même pas pu exister. On ne compte plus ses cris de bonheur et d’exaspération, ses tacles rageurs et son engagement sans faille pour l’équipe. Rino symbolisait à lui seul la grinta du Milan. Néanmoins, derrière cette façade, tout le monde sait que c’est d’abord un homme au grand cœur et à la grande générosité qui s’en va. À l’image de tous ces autres compères, on pourra lui reprocher ce qu’on veut, des sautes d’humeur voire des pétages de plomb, mais ces quelques lignes seront à lui pour toujours : deux scudetti, une coppa, deux supercoupes d’Italie, deux CL et une supercoupe d’Europe, comme le respect qu’on a pour celui qu’on oublie trop souvent.Le troisième sénateur à en terminer avec San siro est le controversé Clarence Seedorf. Partout où il a joué le hollandais n’a jamais laissé personne indifférent. Si vous en parlez à un tifoso, il vous répondra sans doute qu’il est lent, énervant, arrogant, dépassé, nonchalant, et ainsi de suite. Il se peut même qu’il vous avoue qu’il le déteste et qu’il ne souhaite que son départ. Cependant, il serait étonnant qu’à un moment ou un autre, il ne vous parle de son talent hors du commun. S’il y a bien quelque chose à retenir de lui, c’est d’abord cette facilité qui le caractérisait. Peu importe, l’adversaire ou le stade où il se produisait, Seedorf avait la capacité de prédominer. À l’Ajax, à Madrid, à l’Inter et bien sûr à l’AC Milan, Willy Wonka a agacé ses entraineurs, partisans et dirigeants. Toutefois, tel un magicien, il était capable de transformer les cris de colère en cris de joie d’un coup de baguette. En dix années sous les couleurs du Diavolo, l’emblématique n°10 n’a certainement pas joué que des grands matchs mais ceux qu’il a disputés resteront gravés dans le marbre. Comment pourrait-on oublier les confrontations contre Manchester United où le Bayern en Champions League ? Ou encore tous ces derbys contre les cugini où il leur rappelait amèrement qu’il était intériste autrefois. Lors de courts instants, sa qualité technique, sa précision et son génie pouvaient surpasser tout ce qui se faisait de mieux dans le monde et ensuite disparaître aussi vite. Le milieu de terrain batave a toujours choisi ce qui lui plaisait. En ce qui concerne les matchs, ce fut pareil, au grand désarroi de ses fans. Dimanche les tifosi auront aussi le choix. Ils pourront décider de retenir ses ratés ou alors se remémorer qu’il a été à un moment donné le plus grand milieu offensif du monde. Ne serait-ce pas ingrat de ne pas lui rendre tout ce qu’il a donné par moment ? Seedorf, c’est énormément de joies et de peines, de satisfactions et d’échecs mais au fond Milan aurait-il été le même sans lui ? C’est la dernière fois qu’on aura droit à son palmarès. Il professor compte deux titres de champion, une coupe d’Italie, deux supercoupes, deux supercoupes d’Europe et deux de ses quatre Champions League sous les couleurs milanaises.Le quatrième et dernier à quitter la maison rouge et noir n’est autre que Superpippo Inzaghi. Cela faisait un moment qu’on sentait que sa carrière milanaise toucherait à sa fin en 2012. En 2011, le club l’avait conservé pour lui permettre de réaliser son rêve, devenir le plus grand buteur de l’Histoire des coupes européennes. Malheureusement, le centre-avant de se remettra jamais de sa grave blessure. Il n’entre pas dans les petits papiers du Mister et se voit le plus souvent envoyé en tribune. Bref, cela n’a plus vraiment d’importance. On retiendra ses cris de rage – reteeeee –, ses buts venus d’ailleurs et surtout sa détermination et son professionnalisme. N’a-t-il pas prononcé ces mots ? : « Si tu n’es pas un Ronaldo ou un Kakà à la naissance, tu peux quand même devenir un grand joueur à force de volonté, de sérénité, de persévérance et d’amour du métier. Tu peux tirer des enseignements de chaque match. Je prépare tout dans les moindres détails : mon alimentation, ma façon de m’entraîner. C’est ça mon secret. » Comme il le dit, il n’est peut-être pas né sous une étoile comme certains joueurs mais son amour du jeu faisait la différence. À force de travail, l’ancien bianconero a atteint la barre des 70 goals en Europe dont 33 buts en Champions League pour le compte de l’AC Milan. En d’autres mots, il a autant marqué que la légende ukrainienne prénommée Shevchenko. Excusez du peu ! Pippo ne courait peut-être pas vite, n’était peut-être pas le plus grand technicien mais les vrais connaisseurs savent qu’il possède quelque chose de plus que les autres. Son sens du but était hors
norme. Il ne lui fallait pas beaucoup d’occasions pour plier le match. Un vrai milanista ne pourra jamais oublier ces soirs de Ligue des Champions où tout semblait perdu avant que Superpippo inscrive un but sur sa seule demi-occasion du match. On ne l’oubliera jamais, de même que les madrilènes, les lyonnais ou les Reds. Quand beaucoup d’attaquants paradaient, Inzagoal scorait encore et toujours. Alors que de nombreux adversaires se moquaient de son gabarit ou de façon de jouer, il n’a cessé de persévérer dans le but de réaliser son rêve. Avec Milan, il aura remporté ni plus ni moins que deux scudetti, une coppa, une supercoppa, deux CL ainsi que deux supercoupe d’Europe. Pippo c’était juste un attaquant comme on n’en fait plus. Un renard des surfaces. Un vrai ! Un de ceux qui vivent leur métier jusqu’au plus profond de leur être. Le seul et l’unique Pippo Inzaghi…Ce dimanche, ce seront quatre joueurs, stars, légendes qui nous quitteront. Comme un symbole, on saluera un défenseur, un récupérateur, un créateur et un avant-centre. Avec leur départ, on peut dire que c’est véritablement une page du Milan qui se ferme. Le dernier représentant des Meravigliosi, Ambrosini, aura fort à faire pour transmettre les valeurs milanaises à une jeune génération qui ne ressemble pas vraiment à ce qu’on a pu connaître. Ce dimanche 13 mai à 15h, ce sera l’occasion de remercier tous ces grands hommes pour tout ce qu’ils ont apporté au club, les émotions fortes qu’ils nous ont procuré. En dix années de bons et loyaux services, ils auront tout gagné et nous aussi. D’ici quelques heures, il sera temps de refermer une page faste de l’Histoire de l’AC Milan, par la même occasion un chapitre de l’Histoire du football. Contre Novara, ce n’est pas le Milan qui s’éteint. Bien sûr le club sera toujours là après eux. Cependant, plus fondamentalement, c’est une certaine idée du football et de Milan qui s’en ira. Quatre joueurs comme quatre mots pour une époque, un club : élégance, rage, talent, détermination. On ne sait pas ce que nous réserve le futur mais on sait déjà ce qu’on a perdu… Merci pour tout ce bonheur. Merci pour tous ces moments. Merci pour toutes ces victoires. Juste merci pour tout Clarence, Sandro, Pippo et Rino. Grazie Mille !!
Article rédigé par R.G
Nombre de lecture(s) : 732