Vu à la télé(*). Dans un reportage bouleversant et extrèmement choquant sur le massacre de Sebrenica au cours duquel furent tués à la chaîne par les Serbes, parfois après avoir été torturés, plusieurs milliers d’habitants de cette ville bosniaque, on peut voir l’un des tueurs et instigateurs présumés de cette tuerie caresser son chat avec douceur sur son balcon. Les charges contre cet homme, grâce aux témoignages, recoupements, images vidéo et dénonciations, sont accablantes. Cela ne l’empêche pas de vivre en bon père de famille et en toute impunité dix ans après le massacre entre sa femme et ses deux filles et par-dessus le marché sous les yeux des forces américaines. Quand le journaliste lui demande s’il a peur d’être arrêté, le tueur se met à rire comme si la question était saugrenue puisqu’il est innocent. Le rire n’en est pas moins gêné et même franchement jaune, le regard est fuyant. En voyant rire cet homme, je me suis dit que s’il n’avait vraiment rien à se reprocher, il n’aurait certainement pas ri. Car être accusé d’avoir participé à un massacre aussi cruel et de cette ampleur si l’on est innocent, ne peut que provoquer une réaction de protestation véhémente à la hauteur de la gravité de l’accusation et ne serait-ce que par respect pour les victimes innocentes, mais sûrement pas le rire. C’est pourquoi, en riant, cet homme paisible qui ne semble avoir peur de rien, surtout du Tribunal Pénal International de La Haye, a bel et bien, sans même s’en rendre compte, signé avec éclat (de rire) son aveu. Maintenant, que cet homme tout comme ses supérieurs hiérarchiques Radovan Karadžić et Ratko Mladic qu’on pourrait arrêter du jour au lendemain car on sait où ils se trouvent, ne soient pas inquiétés par la justice internationale reste un mystère au point qu’on peut se demander à qui profitent leur liberté et leur silence, autrement dit leur crime. S’il n’était question de la mort atroce, préméditée et organisée de milliers d’innocents, ce mystère nous porterait presque à rire tant il est absurde et aberrant, tant ça dépasse l’entendement. Mais rassurons-nous : les tueurs en liberté, eux, n’en doutons pas, doivent se réveiller plusieurs fois par nuit pour en rire, au risque de s’en fracturer les côtes. À chacun ses raisons de rire et son humour.
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(*) La vidéo du reportage est disponible gratuitement sur le site de France 5 jusqu’au 25 novembre
http://www.france5.fr/videos/?id=1959