Sur près de 13 millions de nouveaux cas de cancer chaque année dans le monde, environ 2 millions seraient causés par des maladies infectieuses, estime cette étude publiée dans l'édition en ligne du 9 mai du Lancet Oncology. Helicobacter pylori, VHB et VHC, HPV…tous ces agents infectieux contre lesquels il existe des traitements, sont des facteurs majeurs, mais évitables de cancers. Cette étude menée par des chercheurs de l'Agence Internationale de Recherche sur le Cancer (IARC) et financée par la Fondation Innovations en Infectiologie (FINOVI) et la Fondation Bill & Melinda Gates, confirme l'importance de la prévention et du traitement des agents infectieux dans la lutte contre les cancers.
Ici, les chercheurs ont estimé la proportion de cancers qui pourrait être attribuée aux infections, à la fois dans le monde et dans les huit principales régions du monde (Afrique sub-saharienne, Afrique du Nord et Asie de l'Ouest, Asie centrale, Asie de l'Est, Amérique du Sud, Amérique du Nord, Europe, Océanie) à partir des statistiques 2008 provenant du rapport Globocan qui présente l'incidence selon l'âge et le sexe pour 27 cancers dans 184 pays. Les 10 infections prises en compte dans l'étude sont :
· Helicobacter pylori (estomac)
· Hépatite B et C (foie)
· HPV (col de l'utérus, pénis et autres sites)
· Virus Epstein-Barr (lymphomes et nez / gorge)
· Cellules humaines T type virus T-lymphotrope humain (leucémies et lymphomes)
· Virus herpès humain 8 (HHV-8) (sarcome de Kaposi)
· Infection chinoisede douve du foie (vésicule et voies biliaires)
· Vers (trématodes) du genre Schistosoma (vessie)
Pour chacun des cancers, les scientifiques ont calculé la « fraction attribuable dans la population » (population attributable fraction-PAF) qui peut théoriquement être évitée, soit par une prévention soit par le traitement d'un facteur de risque spécifique.
Principales conclusions :
· La fraction attribuable dans la population (PAF) aux agents infectieux atteint 16,1% des cancers, ce qui signifie que près de deux millions nouveaux cas de cancer sont attribuables à des infections.
· Helicobacter pylori, hépatite B et C, et HPV, sont responsables, à eux seuls de 1,9 million de cas de cancer,
· Chez les femmes, le cancer du col de l'utérus représente environ la moitié de la charge des cancers liés aux infections, chez les hommes, les cancers du foie et l'estomac représentent plus de 80% des cancers liés aux infections.
· 30% des infections responsables de cas de cancers surviennent chez des personnes jeunes, âgées de moins de 50 ans.
· Des disparités sont constatées dans l'influence de ces infections sur l'incidence des cancers. Ainsi, pour l'Europe, les infections sont à l'origine de (seulement) 7% des cancers, alors qu'en Afrique subsaharienne, de 32,7% des cancers et, en moyenne, dans les pays les moins développés de 22,9%.
L'étude suggère donc, en fin de compte, qu'en traitant et en prévenant mieux certaines infections, on pourrait réduire une cause majeure de cancer dans le monde, donc l'incidence des cancers, donc le nombre de décès par cancer. L'étude confirme donc l'importance d'une voie de prévention (par la vaccination, la sécurité des injections, les traitements antimicrobiens) complémentaire de la voie thérapeutique et de la prévention vis-à-vis de facteurs évitables (tabagisme, alimentation) ou génétiques.
Source: The Lancet Oncology, Early Online Publication, May 9 2012 doi:10.1016/S1470-2045(12)70137-7Global burden of cancers attributable to infections in 2008: a review and synthetic analysis. (Visuel HBV –CDC, vignette Cellule cancéreuse Institut Pasteur)