Retour sur les deux notes précédentes de ce blog :
A propos du débat sur l’influence du droit communautaire sur les financements des services culturels et des remarques faites par Philippe Gimet sur le rapport du sénateur Vincent Eblé, ce commentaire de Didier Salzgeber, posté sur le groupe animé par le premier sur LinkedIn.
Merci pour cette analyse. Je rejoins cette idée qu’Il est effectivement trop tard de croire, comme le fait le Sénateur Eblé dans sa communication sur l’influence du droit communautaire sur les financements des services culturels, qu’il est encore temps « de défendre les spécificités françaises » des politiques culturelles publiques. Il est quand même étonnant de lire de la part d’un Sénateur, qu’au regard des évolutions réglementaires, il faut « renoncer » à définir ce que recouvre un « service public culturel » !
Les réponses aux questions posées par ces changements ne sont pas seulement d'ordre juridique ou technique. Il est crucial de réintroduire un questionnement par les enjeux et des processus de coopération en resituant ces évolutions réglementaires dans un projet politique global de l'Union Européenne.
L’approche exclusive en termes de concurrence ne saurait à elle répondre aux enjeux d’ordre culturel de la construction d’une Europe politique et citoyenne. Les réponses existent déjà à condition
de s’appuyer sur les expériences existantes et de sortir de la stricte approche juridique.
Ce nouveau cadre réglementaire offre l'occasion de définir le corpus à partir duquel l'intervention publique peut être synonyme d'intérêt général et de bien commun, et non d'accumulation
d'intérêts particuliers. La singularité des politiques culturelles françaises doit nous inciter à rechercher de nouvelles solidarités avec nos voisins européens, non pas en projetant notre modèle
sur l'espace européen, mais en créant les conditions d'une convergence des stratégies publiques communes en faveur de la culture au même titre que l'éducation et la recherche. Il faut sûrement
pour cela aller au-delà d'une simple gestion des activités et les réinscrire, les repositionner résolument sur le plan politique et européen.
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by Didier SALZGEBER
Didier Salzgeber est fondateur de l’Institut de Coopération pour la Culture.
Je citais également il y a peu la réflexion de Jean-Michel Lucas qui inscrit ces questions dans le cadre plus large du développement durable et des droits culturels : voir son dernier livre Culture et développement durable... il est temps d'organiser la palabre.
Dans une rencontre organisée le 30 avril dernier, par l'IRMA et le réseau MAP (réseau des musiques actuelles à Paris), en partenariat avec la Bellevilloise,Jean-Michel Lucas, présentait cet ouvrage. Ce débat du 30 avril capté par Demain TV est disponible ici
François Deschamps l’a suivi avec la plus grande attention et livre une très claire synthèse des échanges dont voici un bref extrait :
Jean-Michel Lucas (…) soutient que la culture ne doit pas être une contribution (comme « secteur » culturel) au développement durable, mais une condition de celui-ci.
Après une critique de la Directive « services » de l'Europe, en ce qu'elle ne nomme même pas le secteur artistique et culturel mais uniquement les échanges concurrentiels (sans parler de la notion « d'exception » culturelle qui l'énerve), il explique quel est selon lui l'enjeu politique, à savoir tenter de créer une unité avec les identités culturelles différentes mais qui pourtant doivent réussir à vivre ensemble. Ainsi fait-on acte d'humanité en allant vers plus de dignité et d'émancipation des personnes. L'éthique de la rentabilité ne devrait pas supplanter l'éthique de la responsabilité, de la dignité.
L'animateur de la réunion, François-Xavier Ruan, pose alors la question qui me vient souvent après avoir écouté Jean-Michel Lucas (au risque de passer pour un affreux pragmatique) : Quelles sont les pistes de travail que cette réflexion peut engager ? Concrètement, qu'est ce qu'on fait quand on rentre chez soi ?
Ferdinand Richard(AMI, Friche de la Belle de mai, expert aurprès du FIDC, fonds international pour la diversité culturelle de l'Unesco)
traduit le propos de JM Lucas en expliquant qu'il s'agit de remplacer le mouvement consistant à « aller du haut vers le bas » pour
« aller du bas vers le haut ». C'est un changement de paradigme, un mouvement irréversible pour lui en Europe, qui ne se fait
pas sans douleur, lié aux évolutions politiques mais aussi à d'autres facteurs comme les nouveaux medias. Les Etat-nation tendent à perdre leur contrôle depuis 30-40 ans, au fur et à mesure que
le projet européen se construit, en faveur des autorités locales. Le propos du CGLU (le plus gros
réseau de collectivités locales au monde) sur l'Agenda 21 de la culture est un projet de division du pouvoir des Etats-nation vers les autorités locales (avec aussi les dangers que peut
représenter l'arrivée de potentats locaux).
Notant que Jean-Michel Lucas remet souvent en cause les acteurs culturels, et que son discours est très anti-global et anticapitaliste, impliquant donc des changements de société, il se demande
ce qu'on peut en faire quand on est opérateur culturel dans la société actuelle. Le système marginalise en effet ceux qui tentent de sortir de la logique dominante (recherche de
rentabilité).
Seuls les politiques peuvent faire évoluer les choses. JM Lucas voit les choses ainsi : quand une collectivité veut créer un équipement ou un projet culturel, et bien il serait nécessaire que la politique publique introduise dans l'action le temps de l'avant, le temps du milieu et le temps de l'après ; c'est-à-dire des temps de discussion pour se demander si cette action a une valeur pour construire l'humanité, en quoi elle va donner à ceux qui y participent plus de liberté (d'opinion, de réflexion, de choix), plus de capacité à faire ce qu'ils ont envie de faire, et plus de responsabilité, de relation pacifiée avec les autres.
Philippe Berthelot(UFISC) : Comment ces acteurs culturels qui en prennent « plein leur grade » par JM Lucas
peuvent-ils arriver à encaisser ses colères -certes bénéfiques- ? Ce n'est pas simple, du jour au lendemain, après des décennies de construction collective, de constater que des
articles de textes aussi fondamentaux tels que ceux cités par JM Lucas ont pu se perdre au fil du temps, ou du moins n'ont pas été mis en œuvre. « C'est bien - dit-il à JM Lucas- de renvoyer
la faute au secteur culturel, de se flageller, mais la question est de savoir comment on arrive à redresser ce mouvement, qui ne concerne pas seulement la culture (cf. la désespérance des gens
qui œuvrent dans le domaine de la santé, comment ils se sont fait piéger dans les mécanismes de cloisonnement, de corporation, d'intérêt individuel, de représentation...) ».
Ph. Berthelot se prononce pour une méthode d'apprentissage collectif : se réinterroger sur comment les choses se fabriquent, faire de la recherche-développement , essayer de partager, et
puis sortir de nos propres problématiques d'enfermement, de construction de départ, chercher à s' arracher du passé.
(…)
Faute de suivre le débat télévisé dans son intégralité, il faut tout lire de la synthèse qu’en propose François Deschamps.
On la trouve sur la lettre d’infos dont il est responsable.
La Palabre continue. Espérons qu’elle inspirera un tant soit peu les impétrants à la lourde responsabilité de réveiller le ministère des beaux-arts, des beaux artistes et des labels au bois dormant.
Fils d'actualités très vivement conseillés :
La lettre du réseau culture sur Territorial.fr
Le "netvibes" de l'Observatoire des politiques culturelles
Les net-actualités sur le site d'Arteca
Le tableau de bord des Think tank (Netvibes)
Le calendrier francophone en sciences humaines et sociales, Calenda
CD Org, la veille de Christophe Demay
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