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François Hollande et la chasse aux déficits

Publié le 09 mai 2012 par Pslys

Le déficit de croissance

Nicolas Sarkozy se flattait que la France n’ait pas connu de trimestre de récession depuis 2009, mais le bilan en terme de croissance est pourtant peu flatteur. Cette année, l’activité progresserait de 0,7%, avant un rebond à 1,75% l’an prochain. La nouvelle majorité espère que la France retrouvera ensuite un rythme de croisière de 2%. Or, ces hypothèses déjà basses sont jugées trop optimistes par la Commission européenne et par le Fonds monétaire international (FMI).

Qui aura raison ? Dans le passé le FMI s’est toujours trompé, mais les gouvernements français ont souvent dû revoir leurs prévisions à la baisse. Or sans croissance, impossible de ramener à l’équilibre les comptes publics. C’est pourquoi, certains placent leur espoir dans la mise en place d’un pacte de croissance, qu’Angela Merkel a accepté finalement de discuter avec ses partenaires européens.

Mais entre le souhait des pays d’Europe du Sud (mettre en place un plan de relance par la construction d’infrastructures) et la position allemande (un simple renforcement de la Banque européenne d’investissement), le fossé demeure important.

Le déficit d’emplois

Trois chiffres : 10% environ pour le taux de chômage national, un peu plus de 20% pour les jeunes de moins de 25 ans, et environ 40% dans certaines cités sensibles. Le chômage frappe durement les jeunes et l’emploi n’arrive pas à intégrer les habitants des banlieues difficiles. Autrefois, leurs parents trouvaient des postes dans les usines, où ils acquéraient une qualification. Mais ces emplois ont disparu avec l’effondrement de l’industrie. Ces jeunes sont désormais condamnés à la précarité.

Les mauvais chiffres du chômage devraient s’aggraver, car de nombreuses entreprises ont retardé l’annonce de leurs plans sociaux après les élections, comme Air France-KLM, Areva ou les constructeurs automobiles.

Le défi est énorme. On estime qu’il faut au moins 1,2% de taux de croissance pour que la France commence à créer des emplois nets.

Le déficit public

Où trouver une centaine de milliards d’euros d’économies ? C’est le montant que le gouvernement devra rechercher au cours des cinq prochaines années, s’il veut ramener à zéro, comme prévu, le déficit des finances publiques (Etat et Sécurité sociale) en 2017. Un effort jamais accompli dans notre histoire, alors que les comptes sont dans le rouge depuis plus de trente ans.

Le programme d’ajustement transmis aux autorités européennes par le gouvernement Fillon prévoyait de trouver 36% de cette somme en augmentant les impôts et 64% en réduisant les dépenses.

Le projet de François Hollande mise également sur des hausses d’impôts, mais reste très elliptique sur la baisse des dépenses publiques. Sa solution ? François Hollande prévoit de limiter leur hausse à 1% par an. Ainsi, si la croissance s’élève à 2% comme prévu, le gouvernement réalisera une économie d’une dizaine de milliards d’euros chaque année. Seulement, il n’est pas certain que la croissance atteigne 2%, et il est peu probable que la progression des dépenses publiques soit aussi limitée. Seule bonne nouvelle : malgré la perte du triple A, la France n’a jamais emprunté aussi peu cher (2,9%).

Le déficit du commerce extérieur

Record battu l’an dernier : le déficit des échanges extérieurs de la France a culminé à 69,6 milliards d’euros. Et l’année 2012 commence mal. Ce mauvais résultat illustre la difficulté de la France à trouver sa place dans la mondialisation. Environ 58% des importations françaises viennent d’Europe, mais les excédents son réalisés avec des partenaires secondaires (Liban, Emirats Arabes Unis, Singapour), en dehors du Royaume-Uni.

Si la part de l’hexagone dans le commerce international recule, c’est parce que son industrie souffre. Nous sommes le pays de la zone euro dont la part dans l’activité a le plus chuté entre 2000 et 2010 : 5,2% contre une moyenne de 2,7% chez nos voisins. Ce recul traduit le déclin de la compétitivité française. La France pâtit du coût élevé du travail : il s’élève à 35,3 euros par heure contre 34,2 euros en Allemagne, selon Natixis. En dix ans, il a progressé presque deux fois plus vite en France que chez notre partenaire.

Malheureusement, le projet de François Hollande ne prévoit pas de mesures spécifiques sur ce point. Il place en priorité les éléments de compétitivité dits « hors coûts », notamment l’insuffisance d’innovation qu’illustre la faiblesse des dépenses de recherche et développement (2,26% du PIB en France, contre 2,82% en Allemagne). Il mise aussi sur un meilleur financement des PME avec la création d’une banque publique d’investissement. Insuffisant.

La persistance d’un fort déficit des échanges extérieurs en 2012 forcera le nouveau gouvernement à traiter ce sujet et à négocier avec les partenaires sociaux un transfert d’une part des cotisations patronales sur d’autres impôts : taxe carbone, ou CSG… Un sérieux casse-tête.


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