Carlo Maria Cipolla (1922 - 2000) est un historien économique italien qui fut professeur à l’Université de Berkeley et à l’Ecole normale supérieure de Pise.
J’avais entendu parler du livre de Carlo M. Cipolla au début des années 90. Paru initialement en 1976 en édition américaine, il venait de sortir en Italie (1988) sous le titre d’Allegro ma non troppo, et j’en avais noté la référence dans mon calepin espérant le lire un jour en français. Or, il se trouve qu’il vient tout juste d’être traduit, que je l’ai trouvé dans ma boîte aux lettres il y a quelques jours et que j’ai enfin pu le rayer de ma liste des livres à lire. Comme quoi, tout vient à point à qui sait attendre.
Le bouquin n’est pas épais, il s’agit d’un court essai d’une soixantaine de pages qui tente de théoriser la stupidité humaine en évaluant son impact sur nos destins personnels autant que sur la société dans son ensemble. Sous des airs d’approche scientifique, graphiques à l’appui, aucuns chiffres ni aucunes sources d’études ne sont cités car c’est surtout l’humour qui caractérise cet ouvrage, pour preuve la première ligne du texte « L’humanité est dans le pétrin. Ce n’est pas une nouveauté, cela dit. »
Ensuite l’auteur va s’évertuer à nous prouver que tous nos malheurs ont pour origine, la stupidité humaine, une cause à laquelle on ne peut échapper car quelle que soit la catégorie de population considérée (ethnique, géographique, socioculturelle etc.), le pourcentage de gens stupides y est toujours égal. Pour son étude il divise l’humanité en quatre grandes catégories (les crétins, les gens intelligents, les bandits et les êtres stupides) dont il tire cinq lois : 1- Chacun d’entre nous sous-estime la quantité d’individus stupides en circulation 2- On trouve la même proportion d’individus stupides dans tout groupe social quel qu’il soit 3- Est stupide celui qui fait du tort à un autre ou à d’autres sans en tirer aucun avantage pour lui-même, voire pour en subir une perte 4- Les individus qui ne sont pas stupides sous-évaluent toujours le potentiel de nocivité des personnes stupides et commettent trop souvent l’erreur majeure de traiter ou de s’associer avec elles 5- L’individu stupide est plus dangereuse que le bandit.
J’en devine qui se prépare à lever le doigt pour poser la question « Mais qu’elle est la différence entre un crétin et un être stupide ? » Le crétin ne nuit qu’à lui-même, répond doctement Mr Cipolla.
Venons-en maintenant à mon avis, j’ai souri en lisant cet ouvrage, mais j’avoue avoir été légèrement déçu. Comme je le disais au début de cette chronique, j’attendais depuis plus de vingt ans ce livre, donc mis à l’aune de cette attente il est beaucoup trop court, en longueur comme en profondeur, pour me satisfaire pleinement. Mon conseil – pas vraiment honnête – lisez ce livre dans une librairie (soixante pages seulement) ce qui vous fera du profit et avec l’argent économisé, achetez un autre livre pour vous réconcilier avec votre moralité.
« Nous nous rappelons aussi certains incidents lors desquels un individu a accompli une action qui entraînait une perte pour lui-même et un gain pour nous : nous avions affaire à un crétin. Nous nous remémorons des cas où un individu a agi de manière à procurer un bénéfice à tous les intéressés : c’est un être intelligent. Ces cas se produisent, en effet, mais tout bien réfléchi, il faut avouer qu’ils ne sont pas légion dans notre vie de tous les jours. »
Carlo M. Cipolla Les lois fondamentales de la stupidité humaine PUF