C’est une sorte de deuxième effet, le rebond local du dénouement national de dimanche soir. Alain Juppé a annoncé lundi sa décision de ne pas se porter candidat à l’élection législative sur la 2e circonscription de la Gironde.
Ca n’est pas à proprement parler une marche arrière, puisqu’il n’avait pas encore officiellement fait acte de candidature. Mais il l’avait évoqué ouvertement à plusieurs reprises, et tout le monde attendait de lui qu’il tente de prendre sa revanche sur la socialiste Michèle Delaunay, qui l’avait battu de quelques centaines de voix en 2007 (provoquant alors indirectement son départ du tout nouveau gouvernement). Le score enregistré par François Hollande à Bordeaux au premier tour avait toutefois commencé à faire planer le doute. Le résultat de dimanche, à l’échelon national comme local (59% pour François Hollande sur la 2e circonscription), l’a confirmé. Ce sera sans lui.
Bordeaux «à plein temps»
«Les Français comprennent de moins en moins le cumul des mandats et des responsabilités. C’est la raison pour laquelle j’ai décidé de ne pas être candidat. Je ne souhaite pas assumer de mandat national», a-t-il expliqué lundi. Dérobade ? «Je n’ai jamais fui le combat dans ma vie politique» a rappelé le Ministre sortant. À 66 ans, il a toutefois visiblement décidé d’éviter certaines batailles perdues d’avance. Mais rien à voir avec un retrait. Imputant la «poussée de la gauche» enregistrée dans la région à, notamment, «la puissance de l’implantation territoriale du PS», il considère que l’UMP doit se «mettre en position de reconquête». Or cette lutte-là il est bien décidé à la mener, et à tous les échelons. National («je peux avoir un rôle d’expérience compte tenu de ce qu’a été ma vie politique») et local : «Peut-être le fait que j’étais moins présent à Bordeaux ces derniers temps a joué dans ces résultats. C’est pourquoi je veux m’y consacrer à plein temps.» Son équipe et ses adversaires politiques sont donc prévenus, on devrait de nouveau beaucoup voir Alain Juppé sur le pavé bordelais et dans les débats à la CUB.
Florian prend la suite
Quant à la 2e circonscription, c’est à Nicolas Florian qu’elle échoit. Adjoint au maire de Villenave-d’Ornon, conseiller communautaire, Florian est surtout le secrétaire départemental de l’UMP. Par ce choix, Alain Juppé entend déconnecter l’élection à venir de la vie politique municipale et la situer sur des enjeux nationaux et des thématiques partisanes. Drôle de cadeau pour ce fidèle, dont on attendait plutôt la candidature sur son territoire de la 3e circonscription. Face à Noël Mamère, sur une terre de gauche, c’était aussi un casse-pipe. Alors tant qu’à faire...
Delaunay «surprise»
En face, Michèle Delaunay n’a pas caché sa «totale surprise» après l’annonce de la non-candidature d’Alain Juppé. «Je suis heureuse qu’il soit enfin touché par l’évidence du non-cumul des mandats», a t-elle ironisé. La campagne ne devrait pas, cela dit, être moins acharnée entre elle et Nicolas Florian. Si elle se dit confiante, la députée qui avait été élue de justesse en 2007 n’exclut pas non plus l’hypothèse d’une défaite. Et regrette presque Alain Juppé. «être battue par une personne d’envergure internationale, c’est plus glorieux que par une autre issue d’un parachutage à petite distance», a-t-elle dit lundi. Une sorte de mot de bienvenue pour le petit nouveau.•
Sophie Lemaire
Jean-Paul Garraud et le FN
Jean-Paul Garraud, député UMP de la 10e circonscription de la Gironde (Libournais), membre du collectif La Droite populaire, a posé lundi la question du «rapprochement» avec le FN, en se demandant s’il fallait devenir «pragmatique» ou rester «dans les blocages idéologiques». «Une majorité des électeurs de l’UMP et des électeurs du FN veulent un rapprochement. Qu’est-ce qui est le plus important pour la France ? Cette question, seule, doit nous guider.»
S’il n’y a pas eu de commentaire officiel de l’UMP, François Fillon déclarait peu après que son parti ne doit «pas céder aux menaces de l’extrême droite, dont le but est de nous diviser pour ensuite nous briser». Localement en revanche, ces propos ont été condamnés par la vice-présidente du Parti radical (PR) de Jean-Louis Borloo, la Bordelaise Nathalie Delattre, qui a demandé à l’UMP de Gironde de lui retirer son soutien. Face à l’emballement, le député a tenu hier à «préciser» sa position sur le site du quotidien «Sud Ouest», rejetant l’idée d’une alliance avec le FN. «J’ai toujours dit et redit que la Droite populaire n’était pas une passerelle vers le FN, mais était une digue contre le FN. (...) Je dis simplement qu’il faut s’organiser dès à présent pour que la Droite populaire, au sein de l’UMP, réponde à ceux qui sont partis ou qui ont voté blanc.» Le FN a réalisé une forte poussée sur les terres de Jean-Paul Garraud le 22 avril.