Par Julien Peluchon.
Il existe parfois des ovnis qui tombent entre nos mains sans crier gare, Pop & Kok en fait indéniablement partie. C’est un peu par hasard que je suis tombé dessus, à l’occasion d’une de mes nombreuse balade sur la toile (merci en passant au superbe « tuez les tous« , la bible de l’actualité zombie sur Internet). Vous le savez peut-être, mais tout ce qui tourne de prés ou de loin autour de la thématique des morts vivants m’intéresse particulièrement. Alors lorsqu’en plus l’aventure se situe dans une France post apocalyptique ou les rares survivants lutent contre des hordes de barbares sanguinaires prêts à tout pour une quelconque babiole ou un morceau de chaire fraiche, et que la vie est rythmée par une « utilisation » plus ou moins ingénieuse de zombies décharnés, mais bizarrement plus ou moins inoffensifs, mon sang ne fait qu’un tour et je me rue chez mon libraire préféré pour me procurer l’objet tant convoité.
A la fin du XXIème siècle, le monde n’est plus qu’un champ de ruine, il y a quelques années, une effroyable explosion est survenue un beau matin, un grand souffle bleu s’est répandu de par le monde, et sur son passage, l’immense majorité de la population y est passée. Quelques survivants hagards ont alors tenté de se reconstruire un semblant de vie au milieu des ruines fumantes. Mais rien n’est simple dans ce monde dévasté, personne n’est à l’abri des hordes de barbares sanguinaires qui sillonnent les routes en quête d’un hypothétique butin ou, plus probablement, d’une tuerie sauvage. Et puis il y a tous ces zombies qui déambulent bêtement un peu partout, ce n’est pas qu’ils soient agressifs ou dangereux, mais ils sont là, et contribuent largement à ce sentiment de décrépitude ambiant.
Pop & Kok vivent à Rouen, ils font parti de ces rares survivants qui essaient, tant bien que mal, de se reconstruire dans ce monde insalubre. Avec les années, les choses tendent à s’améliorer petit à petit, plus encore, si vous êtes un temps soit peu ingénieux et débrouillard, une foule d’opportunités « commerciales » s’offrent à vous. C’est un peu une nouvelle aire économique ou les plus audacieux trouvent fatalement une place. Mais Pop & Kok, même si ils ont la fibre du commerce, ne font pas toujours forcément les meilleurs choix.
C’est un peu leur vie que nous découvrons au travers de ce roman, ou comment échouer lamentablement dans ses choix de vie, comment se débattre en permanence dans un monde devenu cruel, ou c’est invariablement le plus fort qui l’emportera ? De déconvenue professionnelle en déconvenue amoureuse, nos deux compères se retrouveront
tout au long de l’aventure, pour le meilleur, mais souvent pour le pire. Le hasard de leur triste vie les conduira de Rouen aux rivages de la Manche, du côté de Berck, dans ce monde ou la notion d’espoir n’a que bien peu de valeur, ou plus grand chose n’a de sens. Alors bien évidemment cette histoire finira mal, toujours plongé dans une sorte de chaos inextricable.Un tout petit roman qui se dévore en quelques heures à peine. C’est vraiment superbement écrit, et le lecteur n’a que bien peu l’occasion de relever le nez de l’ouvrage une fois qu’il est commencé. Original à souhait, on s’écarte allègrement des poncifs du genre, je repense ici à la façon dont l’auteur a traité la question du zombie, il est plus représenté comme une sorte d’animal de compagnie docile dont il faut simplement se méfier des réactions (l’utilisation hallucinante de ces derniers pour produire une partie de l’électricité de la ville de Rouen par exemple). Et puis il y a ces deux personnages centraux, dont on ne peu faire autrement que s’y attacher, frémir et râler devant leurs mauvais choix, vivre avec eux cette décrépitude qui les guète chaque jour un peu plus, bref, s’enfoncer avec eux, comme pour mieux constater que vivre dans ce monde dévasté n’a finalement pas vraiment de sens… ou si peu…
Voici quelques petits liens concernant « Pop et Kok » qui pourront sans doute vous intéresser :
Pop & Kok (article Ouest France)
Présentation de l’ouvrage éditons du Seuil