Le platane est assurément par son port majestueux et le frais ombrage qu'il procure, un des arbres les plus sympathiques aux promeneurs.
Cependant, les personnes qui habitent dans son voisinage savent bien qu'il répand une poussière irritante pour le nez, les yeux et la gorge, poussière provenant des fruits de l'arbre et surtout du duvet dont sont pourvues ses feuilles sur leur face inférieure.
Cette action irritante est telle que les ouvriers chargés d'élaguer les branches de platane, ou même seulement de les ramasser à terre, sont obligés de cesser leur travail, dès que le soleil s'élève et sèche les gouttes de rosée qui collaient et empêchaient de s'envoler les poils extrêmement légers dont il s'agit.
Mais voici que d'autres griefs seraient encore imputable au platane. D'après une étude M. Stéphen Artault, cet arbre hébergerait un acarien capable de s'attaquer à l'homme. En effet, en dehors de la période de pousse et de végétation, on voit souvent les ouvriers taillant les platanes, les enfants jouant avec les brindilles coupées, se plaindre de démangeaisons sur les bras et le cou.
Or si, vers la fin de l'hiver, on soulève les écailles de l'écorce du tronc et des branches, il est aisé d'y découvrir de véritables nids d'acariens réunis par groupes nombreux, et l'on peut se convaincre, en en glissant dans son col ou dans ses manches, que ce sont bien là les agents des démangeaisons.
Plus tard, quand le bourgeons sont ouverts, les acariens émigrent, et on rencontre les mêmes petites bêtes rouges disséminées sur la face inférieure des feuilles.
Cette constations est curieuse, car, jusqu'à présent le platane passait pour très rebelles aux maladies parasitaires, à cause de sa coriacité et de son amertume. En réalité, l'acarien, qui ne peut vivre à Paris que sur le platane, a dû s'adapter à un genre de vie spécial.
En effet, tandis qu'à la campagne l'acarien passe l'hiver sous l'écorce des arbres et descend au printemps sur les feuilles des fraisiers, haricots et autres plantes herbacées de nos jardins où il reste tout l'été jusqu'à une période avancée, sur nos boulevards, ne pouvant quitter le platane et devant se contenter de ses feuilles pour toute nourriture, il regagne ses quartiers d'hiver dès le mois d'août, époque où les feuilles sont déjà coriaces. IL n'a donc eu que trois ou quatre mois de vie active, tandis que le tétranyque (c'est le nom de l'acarien en question) des champs en a plus de sept.
Ces conditions défavorables ont eu pour résultat de diminuer la taille du tétranyque parisien, et aussi, sans doute, de le pousser à s'attaquer à l'homme, ce qu'il fait surtout à la fin de l'hiver.
Article de décembre 1900