La France a connu durant son histoire constitutionnelle contemporaine 23 présidents de la République, dont les pouvoirs, les rôles politiques, les visions furent bien différents au gré des époques et des régimes. Il existe néanmoins 2 constantes chez tout chef d'Etat que la France a connu à la plus haute fonction : d'abord, le fameux portrait présidentiel (auquel seul Louis Napoléon Bonaparte échappa), et ensuite l'image que le président de la République dégage et renvoie à l'ensemble du pays, qui comporte 3 « stéréo-types » majeurs depuis la V° République (époque à laquelle le président devient peu à peu la pièce centrale du système politique) dont les manifestations sont cependant inégales selon le titulaire de la fonction. Cet article est issu d'une conférence donnée à Epinal le 3 Novembre 2011 sur l'image du président en la présence de Fabrice Gartner (Professeur de Droit Public à l'université de Lorraine), Elodie Derdaele (Maître de Conférence en Droit Public à l'université de Lorraine) et Adeline Karcher.
Le portrait présidentiel
Son but essentiel est de représenter la fonction de président de la République, considéré en quelque sorte comme le « premier magistrat » (au sens politique et non juridique) du Pays. Ce portrait a toujours figuré dans toutes les Mairies de France. Durant la III° et même la IV° République, la place du président dans le régime politique, de par la constitution, n'est pas fondamentale : il n'est pas un dirigeant ni même un gouvernant à proprement parler, mais davantage un représentant de la Nation et de l'État, arbitre institutionnel. À ce titre, le président se tient sur le portrait à l'image de son rôle politique relativement effacé : sa posture est décalée et détachée, sobre, sans ostentation, sans grandeur, presque absent (notamment par son regard fuyant). Son seul but est de représenter la République, sans se mettre en valeur (sans personnification aucune de la fonction) à l'inverse de ce que furent les portraits de certains Rois ou Empereurs. Une symbolique est ajoutée, mais son rôle n'est pas tant de glorifier le personnage que de représenter là encore la chose publique.
La symbolique républicaine
Dans la mystique républicaine, le président est d'abord le Chef de l'État : il est donc un représentant de la fonction, assurant la continuité de l'Etat, mais également l'incarnation du pouvoir politique. À l'instar d'une Monarchie Républicaine, il a donc un rôle de garantir l'unité nationale, en particulier lors de ses discours, des sommets internationaux, et en tant que personnage politique clé du régime, il dispose de certaines distinctions (légion d'honneur, membre du conseil constitutionnel à vie suite à son mandat présidentiel, …). Cependant, s'est produite, de pair au développement de son rôle politique, une sacralisation de sa fonction : le président de la république a des honneurs autant que d'obligations, et ne s'appartient en quelque sorte pas totalement, apparaissant bien davantage comme un personnage public que comme une personne privée, tous l'ont sans doute plus ou moins appris à leurs dépends. Étant donc tout à la fois personnage public et personne privée, les présidents n'ont ainsi pu totalement unifier leur façon d'apparaître aux yeux du peuple, si bien que l'on peut distinguer chez tous, à des degrés divers, trois types d'image pour ce qui concerne ceux de la V° République.
L'image du président
On peut donc relever l'image « gaulliste », l'image « populaire », et l'image « populiste ».L'image gaulliste se caractérise par l'absence de toute image privée du président pendant son mandat, et de très peu avant et après celui-ci. Cette image est « républicaine », c'est à dire séparant l'homme de la fonction, contrôlée dans l'attitude, représentant une certaine grandeur et hauteur de vue, et respectée de tous. Le but est de représenter la fonction présidentielle uniquement, et de le faire avec solennité et dignité. L'image populaire est déjà imprégnée d'une stratégie de communication, dans le but de ressembler davantage au peuple. Ainsi les images privées se multiplient, même pendant le mandat présidentiel : elles sont familières, personnelles, mais n'ont encore que peu d'effet sur le peuple. Il s'agit seulement de passer pour un homme normal, plus proche du peuple. L'image populiste est la plus aboutie en terme de marketing politique : l'objectif n'est pas seulement de montrer un président proche (ce qui est encore imaginable) mais presque parfait, à la recherche d'une autre forme de légitimité confortant sa fonction. Cette image n'est pas proposée, ou acceptée, mais proposée, manipulatrice (faire du président une sorte de star), césariste et quelque peu combattue par les médias (bien que ceux-ci ne daignent pas, préalablement, de la véhiculer avec allégresse auparavant). Elle représente la modernité, la richesse des présidents, et si elle apparaît souvent comme très superficielle, elle a au moins l'avantage d'avoir pu révéler quelques « scandales ». L'image du président de la République est donc relativement variée tout au long de son mandat, qu'elle soit privée ou officielle. À l'heure où la France va changer de président (François Hollande l'ayant emporté Dimanche soir face à Nicolas Sarkozy au second tour des élections présidentielles), on peut se demander à la fois comment le prochain se présentera en privé, mais également comment il se tiendra en public.
Sources
-Conférence "L'image du Président" du 3 Novembre 2011 - Épinal.-Les présidents et leurs portraits.Rémi Decombe.