L’euro et les marchés boursiers reculaient lundi, plombés par la poussée des partis extrémistes en Grèce alors que la victoire de François Hollande à la présidentielle française, largement anticipée, avait moins d’effet même si elle ajoute de l’incertitude en Europe.
Vers 10H00 (08H00 GMT), la Bourse de Paris cédait 1,42%, Francfort 1,43%, Milan 1,47% et Madrid 1,78%, Londres étant fermé en raison d’un jour férié. Athènes de son côté dévissait de 7,43%.
Les places financières asiatiques ont vécu une séance difficile, Tokyo clôturant en forte baisse de 2,78%, et Hong Kong de 2,61%, déprimées aussi par les mauvais chiffres sur l’emploi aux Etats-Unis, publiés vendredi.
La monnaie unique européenne remontait après avoir reculé à un plus bas en trois mois, s’échangeant à la même heure à 1,3013 dollar contre 1,3082 dollar vendredi vers 21H00 GMT.
« Si les marchés réagissent mal c’est clairement à cause de la Grèce. L’arrivée de M. Hollande au pouvoir avait été diabolisée. On se rend compte qu’elle a peu d’impact aujourd’hui », relève Philippe Waechter, directeur des études économiques chez Natixis Asset Management.Pour preuve, le taux d’emprunt de la France sur le marché obligataire, là où s’échangent les titres de dette déjà émis, était quasi stable au lendemain du second tour à 2,827% contre 2,818% vendredi.
Et l’agence d’évaluation financière Standard & Poor’s, qui avait retiré en janvier à la France sa note maximale « AAA », a estimé que l’élection du socialiste n’avait pas « d’impact immédiat » sur la note du pays ou sa perspective d’évolution.
« M. Hollande ne devrait pas remettre en cause le traité européen sur la stabilité financière, mais plutôt y adjoindre un volet sur la croissance. Sur ce point, il n’est plus seul à souhaiter cela en Europe, ce qui a tendance à rassurer les investisseurs », explique M. Waechter.
Longtemps réticente, Berlin a tendu la main dès dimanche soir au socialiste: la chancelière allemande Angela Merkel l’a invité en Allemagne et son ministre des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, a promis de travailler à un pacte de croissance, l’une des principales revendications de M. Hollande pendant sa campagne électorale.Sur le fond, « le risque d’une grave rupture entre l’Allemagne et la France semble très réduit », juge ainsi Holger Schmieding, de la banque Berenberg.
M. Hollande a aussi promis d’engager des dépenses pour relancer l’économie française au point mort, « une musique pas très douce aux yeux des investisseurs qui pourraient sanctionner la France lors de l’annonce des premières dépenses si elles ne sont pas accompagnées d’économies supplémentaires », tempère toutefois Jean-François Robin, stratégiste obligataire chez Natixis.
« La victoire de Hollande n’est pas une surprise, mais cela prouve que les sortants appliquant l’austérité de l’Union européenne éprouvent des difficultés à se faire réélire », soulignent les analystes de la National Australia Bank dans une note.
Un scénario qui s’est vérifié en Grèce où la politique de rigueur menée depuis deux ans sous la pression des bailleurs de fonds internationaux du pays a été massivement censurée par les électeurs qui ont laminé les deux partis pro-européens tenants de la rigueur.
Sur les cendres du bipartisme à la grecque, les partis opposés à un accroissement de l’austérité ont raflé, de la gauche radicale aux néo-nazis, près de 60% des voix, selon un sondage sortie des urnes.
« Les responsables européens qui se sont trompés sur les remèdes à appliquer au malade vont devoir gérer cela mais en attendant cela devrait amener beaucoup de volatilité sur les marchés », estime M. Waechter.
La remontée des craintes pour l’Europe et les mauvais chiffres de l’emploi américain ont par ailleurs entraîné un recul des cours du pétrole brut: le baril de « light sweet crude » perdait 1,45 dollar à 97,04 dollars dans les échanges de mi-journée en Asie, tandis que le Brent de la mer du Nord diminuait de 66 cents à 112,52 dollars.